Réaction de Abu Bakr et de ‘Omar
Voyons maintenant, selon certains historiens de renommés, le commentaire d’Abu Bakr après avoir écouté Fatima Az-Zahra.
Il déclare : « Ô la fille du Messager de Dieu ! (…) Sans aucun doute, le Prophète est votre père et d’aucune autre femme ; le frère de votre mari et non d’un autre homme ; sans aucun doute il l’a préféré à tous ses compagnons et sans aucun doute aussi, Ali l’a soutenu dans tous les événements les plus cruciaux ; seul l’homme heureux peut vous aimer et seul l’homme ingrat et mauvais peut vous nuire.
Vous êtes la progéniture bénie du Messager de Dieu, les Elus parmi les autres, nos Guides pour notre bien, notre voie à suivre pour parvenir au Paradis, et vous – la meilleure des femmes – et la fille du meilleur des Prophètes, véridique dans ses conclusions, excellente dans son raisonnement. Vous ne pouvez pas être dépourvue de vos droits ni suspectée dans votre revendication (…)
Cependant, j’ai sûrement entendu votre père dire : « Nous, le groupe des Prophètes, nous ne faisons pas hériter les biens matériels, or, argent et immeubles, mais nous faisons hériter le Livre Saint, la sagesse, la science et la Prophétie. Et ce qui nous appartient en moyens de vie appartiendra au successeur après nous qui le gérera. » Bien, il en est aujourd’hui ainsi de ma position et de la propriété dont les revenus serviront au budget de la guerre et de la défense des Musulmans, et cette décision a été prise d’un commun accord entre les Musulmans, Elle n’émane pas d’une décision personnelle. Je n’abuse pas de mon pouvoir. Voilà mes biens, je les mets à votre disposition. Ô vous l’illustre Dame de la Nation de son père, et l’arbre béni de sa descendance… Voilà ! Pensez-vous encore que je viole la parole de votre père ? »
Alors, Fatima rejettera l’argument d’Abu Bakr faisant état d’un propos du Prophète disant que les Prophètes ne laissent pas d’héritage. Elle lui opposera l’argument coranique apportant les preuves du Droit d’héritage de la progéniture des Prophètes. Elle s’exclamera en disant :
« Gloire à Dieu !Mon père, le Messager de Dieu, ne s’est jamais éloigné ni opposé aux préceptes inscrits dans le Livre de Dieu, ni pratiqué, ni inventé, ni légiféré des lois qui lui soient contraires. Il a strictement et toujours pris à la lettre les recommandations et commandements divins, il s’en est toujours tenu à l’application des versets coraniques. Conspirerez-vous encore contre sa mémoire après son décès ? Allez-vous énoncer de faux témoignages et propos en son absence, selon la manière habituelle qui engendraient complots et séditions, dont mon père était la victime sa vie durant ? Alors que le Livre de Dieu est clair et édifiant en matière de règlement de tous litiges. Il y est écrit concernant l’héritage : « (…) Il héritera de moi ; il héritera de la famille de Jacob (…) » « Salomon hérita de David (…) »
Dieu, exalté soit-Il, a clairement inspiré et réglementé le Droit de l’héritage en désignant : les ayants droit, les principes du partage, la part qui revient à l’homme et celle qui revient à la femme, pour que soit écarté l’esprit de scepticisme, de suspicion des imposteurs et d’équivoque des égarés !
« Vos âmes, plutôt, vous ont suggéré quelque chose en vous faisant croire que votre action était bonne … (Il ne me reste plus donc) qu’une belle patience ! C’est Allah qu’il faut appeler au secours contre ce que vous raconter ! » (Coran 12/18)
Alors, Abu Bakr reprendra la parole pour dire : « Dieu est Véridique ainsi que Son Prophète. Sa fille est véridique. Elle est la source de la sagesse, le lieu de la Guidance et de la Miséricorde, le pilier de la Religion et l’argument irréfutable. Je ne peux écarter votre esprit de droiture ni refuser les propos de votre discours. Toutefois, entre vous et moi, il y a ces Musulmans. Ils m’ont prêté allégeance, rendu responsable, et conformément à leur volonté j’ai accepté. Je n’ai aucune intention ni désir de me comporter en despote ni vouloir bénéficier d’un quelconque avantage de ma position. Ils sont témoins. »
Ces propos, Abu Bakr voulait qu’ils soient entendus pour apaiser les esprits. L’opinion publique, irritée de la tournure que prenaient les événements, commençait à manifester son mécontentement à propos du fait injuste imposé à la fille du Prophète. Des voix et clameurs s’élèveront de la foule en soutien à Fatima. Son discours était la révélation cruciale du moment. Pour calmer l’ardeur de l’assemblée, Abu Bakr proférera des menaces. Il nous a été rapporté que ce jour-là un grand nombre de personnes pleureront de chagrin. Médine était en effervescence. De partout, des protestations en soutien à Fatima se faisaient entendre.
Alors, Abu Bakr, inquiété de l’ampleur du mouvement, dira à Omar : « Vous auriez dû me laisser appliquer la décision prise (la restitution de Fadak). Elle aurait apaisé les esprits. Puis, c’était, de notre part, la mesure à prendre la plus juste. »
Omar rétorquera : « Une telle décision était nuisible à votre position et un grave handicap pour votre pouvoir. Je vous ai conseillé par compassion à votre égard. »
Abu Bakr : « Quelle grave erreur que celle d’avoir oublié la fille de Mohammad ! Aujourd’hui, les gens ont été informés de la spoliation de ses droits, de son action en revendication et de nos complots en la matière ! »
Omar se voulant rassurant : « Après tout, ce n’est qu’un événement du jour. Il sera rapidement oublié comme si rien n’avait été dit et accompli. » Il déclamera quelque vers de sa composition dont la teneur exaltait le classement dans l’oubli de l’événement. Omar, s’adressant de nouveau à Abu Bakr lui suggéra ceci : « Accomplissez la prière. Acquittez-vous de l’aumône-azzakat. Recommandez le bien. Interdisez le mal. Assurez le tribut et les taxes. Respectez vos proches car Dieu dit : « Les bonnes actions dissipent les mauvaises. Ceci est un Rappel pour ceux qui se souviennent. » (Coran 11/114) Voyez-vous, après tout, un seul péché parmi une multitude de bonnes actions ce n’est pas grave. Soyez rassurés ! »
Abu Bakr, tranquillisé et satisfait des propos de Omar, lui tapotera l’épaule en signe d’approbation en disant ceci : « Vous avez contribué au soulagement de ma peine. »
Les droits de Fatima sont reconnus, mais ses biens ne lui sont pas restitués
Pris de l’esprit de réparation du dommage causé par le fait injuste et suite aux preuves apportées, le dirigeant prendra la décision de rendre ses biens à Sainte Fatima (s), mais un autre l’en empêchera. Toutefois, lorsque Sainte Fatima (s) quittera le dirigeant, un autre événement apparu soudainement.
Omar : « Qu’est-ce que vous avez dans la main ?! »
Abu Bakr : « Un décret que je viens d’écrire en faveur de Fatima, dans lequel je prends la décision de lui rendre la propriété de Fada, et l’ensemble de son héritage en provenance de son père. »
Omar : « D’où prendrez-vous les dépenses si les Arabes décident de vous combattre ? »
Puis, il s’empara du décret pour le déchirer. » (Fatima : The Gracious – adaptation : Odeh A. Muhawesh – éd: Ansarian Publications – Qom – R.I. D’Iran p. 182)
Lorsque Fatima sera envahie par la maladie, Abu Bakr et Omar décidèrent de lui rendre visite. Ils demanderont la permission d’entrer mais elle la leur refusa. Alors Abu Bakr fera la vœu de ne plus entrer dans une maison tant qu’il n’aurait pas rencontré Fatima pour lui réclamer son pardon.
En réponse à ce vœu, il passera la première attente dans le froid de la nuit. Omar, de l’autre côté, ira voir Ali (s) et s’adressera à lui : « Plus d’une fois nous sommes venus dans l’intention de visiter Fatima, afin de la récompenser, mais elle refuse catégoriquement de nous laisser entrer. Si vous allez la voir, pouvez-vous lui demander de notre part la permission d’entrer pour parler avec elle ? »
L’Imam Ali (s) : « Sûrement, je le lui demanderai ! » Puis, il entra dans la demeure de Fatima : « Ô fille du Messager de Dieu ! Vous avez connaissance de l’intention de ces deux hommes. Ils sont souvent venus jusqu’à votre demeure pour vous rencontrer, mais vous leur avez refusé l’accès de votre intérieur ; maintenant, ils viennent de me demander de servir d’intermédiaire pour que vous leur accordiez la permission d’entrer. »
Ayant obtenu son accord, Ali (s) sortira de la demeure pour prévenir les deux hommes de la permission d’entrer qui leur était accordée. Ils entreront donc dans la demeure. Ils lui présenteront leurs condoléances auxquelles elle ne répondra pas, se détournant d’eux. Ils déambuleront partout dans la pièce afin d’obtenir un regard, jusqu’au moment où elle adressera la parole à Ali : « Ali, veuillez me couvrir avec votre vêtement », puis elle dit ensuite aux femmes : « Tournez-moi vers eux ! »
Alors Abu Bakr dit : « Ô fille du Messager de Dieu ! Nous sommes venus jusqu’à vous avec l’intention d’obtenir votre complaisance et d’éliminer votre courroux à notre égard ; nous vous demandons de nous accorder votre pardon pour nos actes injustes accomplis à votre égard. »
Fatima : « Je n’accorderai aucun propos ni à l’un ni à l’autre tant que je n’aurai pas déposé plainte contre vous devant Dieu. Je me plaindrai de tous vos actes commis et décisions prises injustement à mon encontre. » Puis, s’adressant à l’Imam Ali : « Je ne m’adresserai à aucun d’eux tant que je ne leur aurai pas demandé s’ils se souviennent de ce qu’avait dit le Messager de Dieu à ce propos, je m’engagerai soit à leur parler, soit à me taire. »
Ils diront : « Par Dieu ! Elle en a le droit ! Nous exprimerons que ce qui est juste et nous ne témoignerons que pour ce qui est vrai. »
Fatima : « Au nom de Dieu, je vous demande de vous souvenir lorsque le Messager de Dieu vous appela à sortir au beau milieu de la nuit à propos d’un sujet concernant Ali. »
Eux : « Oui, par Dieu ! »
Fatima : « Au Nom de Dieu ! Je vous demande si vous avez bien entendu ce qu’il a dit : « Fatima est de moi, quiconque l’offense m’offense et celui qui m’offense, offense Dieu. »
Ils répondront l’un et l’autre : « Oui ! Par Dieu ! Nous en avons le souvenir ! »
Fatima : « Que la louange soit au nom de Dieu ! Ô Dieu ! Je vous prends à témoin : ils reconnaissent avoir entendu. Elle leva les mains vers le Ciel, et dit : « Ô Mon Dieu ! En vérité, ils m’ont offensée durant ma vie. Par Dieu ! Je ne vous pardonnerai pas tant que je ne rencontrerai pas mon Seigneur et déposé contre vous, devant Lui, à propos de ce que vous m’avez fait subir et infliger. »
A écouter les lamentations et les reproches de la fille du Prophète Mohammad (pslf), Abu Bakr – calife à l’époque des faits – se mettra à gémis et à exprimer des regrets : « Je voudrais que ma mère n’ai pas accouché de moi ! »
Omar : « C’est impensable que des gens aient pu vous considérer comme responsable de leurs affaires alors que vous en êtes incapable, et rien qu’une personne atteinte de la crainte de la vieillesse ! Vous êtes angoissé du courroux d’une femme et vous vous réjouissez de sa complaisance à votre égard. Qu’y a-t-il de mauvais pour celui qui courrouce une femme ? » Puis, ils quitteront la demeure. (Fatima : The Gracious – adaptation : Odeh A. Muhawesh – éd: Ansarian Publications – Qom – R.I. D’Iran p. 193)
“Elle dira avec fermeté aux gens : “Vous avez éloigné les ayants droit du pouvoir par votre perfidie et vous vous êtes enfermés dans le silence par complicité… Je connais les motifs et les raisons de votre attitude stérile à notre égard. Votre non-assistance à la famille du Messager de Dieu (pslf) sont à l’image de votre rancune et de votre désir de vengeance… » Puis, elle récitera ce verset : « Si vous êtes ingrats, vous et tous ceux qui sont sur la Terre, sachez que Dieu se suffit à Lui-même et qu’Il est digne de louanges. » (Coran 14/8)
La profonde tristesse de Fatima Az-Zahra témoignant de la trahison de certains compagnons
Un jour, le Prophète Mohammad (pslf) dira devant une assemblée considérable de notables musulmans : « Fatima est une partie de moi. Aussi, celui qui l’irrite m’irrite également. »
Un autre jour, en s’adressant à sa fille, il lui dira : « Ô Fatima ! Allah s’irrite lorsque tu t’irrites. Il est satisfait lorsque tu es satisfaite. ».
Les événements ayant suivi le décès de son père avaient bouleversé et réellement irrité Sainte Fatima Az-Zahra (s) au point où elle ira exprimer sa douleur auprès de la tombe de son père :
« A propos de la tristesse ressentie par Fatima Az-Zahra (s) après le Sublime retour à Son Créateur de l’âme de son père, le Bien-Aimé Prophète Mohammad (pslf), sa servante Fidda a raconté ceci :
« Au huitième jour faisant suite au décès de son père, Fatima (s) révélera l’ampleur de sa tristesse et de ses difficultés à vivre dans un monde hostile vidé de la présence de son père. Elle se rendit à la mosquée, et couverte de larmes, elle dira :
« Ô mon père ! Ô mon ami sincère ! Ô Mohammad ! Ô Abu Al-Qasim ! Ô le protecteur des veuves et des orphelins ! Qui peut vous remplacer à la Kaaba et à la mosquée ! Qui peut vous remplacer auprès de votre fille plongée dans la tristesse, la mélancolie et la douleur ! »
Puis Fidda continue son récit :
« Ensuite, Fatima (s) se dirigea vers la tombe du Prophète (pslf), ses pleurs et ses sanglots l’obligeront à une marche chancelante. Arrivée au Mizaneh, elle s’effondrera inconsciente. Aussi, les femmes accourront à son secours, et après lui avoir rafraîchi le visage avec de l’eau de source, elle manifestera de nouveau des signes de vie.
Fatima dira alors : « Mes forces se sont évanouies, ma résistance m’a fait défaut, mes ennemis se réjouissent de mon chagrin, et mon affliction me fait lentement mourir !
Ô mon père ! Je suis dans la perplexité et la solitude, affaiblie par le chagrin et profondément mélancolique ! Ma voix s’est éteinte mon dos s’est brisé ; ma vie est ballottée par les vicissitudes ; je ne trouver personne après vous, ô mon père, pour soulager ma peine ; personne pour m’aider en ces temps très difficiles, face auxquels je suis fragile et pleine d’impuissance ! Tel le précise les Révélations, le lieu de la présence de Gabriel (s) et de Michaël (s) a disparu avec votre départ, ô père !
Les intentions (des gens) ont changé. Les portes se sont fermées devant moi. Raisons pour lesquelles ce monde devenu hostile m’est difficile à vivre. Mes larmes se déverseront sur vous aussi longtemps qu’un souffle de vie sera présent en moi. Mon désir de vous rejoindre ne pourra cesser, mon affliction créée par notre séparation ne trouvera jamais de fin dans le monde d’ici-bas. »
Les sanglots de Fatima (s) allaient dès lors augmenter d’intensité :
« Ô mon père ! Avec votre départ, la lumière du monde a disparue. Les fleurs se sont fanées après s’être ouvertes à la vie tout le temps de votre présence parmi nous.
Ô mon père ! Ma mélancolie n’aura de fin tant que durera notre séparation.
Ô mon père ! Le sommeil m’a quitté depuis le jour de notre éloignement !
Ô mon père ! Où est-il celui qui était proche de la veuve et des orphelins ? Celui qui fût donné à la Communauté pour jusqu’au Jour de la Résurrection !
Ô mon père ! Après vous nous avons été placés dans le monde des opprimés ! Ô mon père ! Après vous les gens nous ont délaissés, oubliant la noblesse de notre lien glorieux qui nous unissait à votre présence parmi les gens.
Quelle larme peut-elle être retenue suite à votre Sublime retour vers notre Créateur ?
Quelle mélancolie peut-elle être éteinte après votre départ ? Quelles paupières peuvent-elles encore se refermer sur un sommeil paisible depuis votre absence ?
Ô mon père ! Vous êtes le printemps de la foi et la lumière des Prophètes ! Comment les montagnes vont-elles résister ? Et les mers ne pas s’assécher ? Et la Terre ne pas trembler ? Ô mon père ! Je suis tant affligée de la peine la plus pesante à porter, et ma déroute est sans fin.
Ô mon père ! Je suis atteinte de la plus profonde infortune et de la plus vaste calamité qui puissent être vécues dans le monde d’ici-bas. Les Anges vous pleurent, et les étoiles se sont immobilisées !
Depuis votre envol vers le Très-Haut, même votre minbar a perdu de sa splendeur, vidé de votre ineffable conversation intime avec votre Seigneur ! Certes, votre tombeau est comblé de votre présence et le Paradis satisfait de votre retour, de vos invocations et de vos prières.
Ô mon père ! Quelle mélancolie enveloppe les lieux de vos sermons et discours ! Combien je vais souffrir de tout ce qui se prépare à l’horizon de la déviance et jusqu’au jour où je vous rejoindrai ! Combien est affligé Abul Al-Hassan (Imam Ali (s)) : celui qui fût désigné à votre succession ! Le père de vos deux enfants : Al Hassan et Al-Hossein, vos bien-aimés. Celui qui vous a été confié dès son enfance, et dont vous ferez votre frère ! Celui que vous avez le plus aimé de tous vos compagnons. Le père de Al-Hassan, le premier à vous accompagner et à vous soutenir.
Vraiment, la mélancolie s’est emparée de nos cœurs. Nos pleurs nous font mourir lentement et notre détresse ne cesse de nous accompagner ! »
Puis, Dame Fatima (s) rejoindra sa demeure, toujours triste et en pleurs. Elle vivra ainsi jusqu’au jour où elle rejoindra son père bien-aimé, à peine quelques semaines après le Sublime retour à Son Créateur de l’âme du Prophète Mohammad (pslf). » (Fatima : The Gracious, 1990, p. 154.)
L’enterrement secret de Fatima, la preuve de sa colère
Fâtima ne survivra que 75 jours à la mort du Prophète (six mois selon Tabari : "Dans cette même année, au mois de ramadhân, mourut Fâtima, la fille du Prophète, six mois après la mort de son père ; elle était âgée de vingt-neuf ans. Elle sera enterrée de nuit par 'Alî et inhumée à Médine, - "Quand Fâtima mourut, elle demanda à être enterrée en secret ; la jalousie de A'icha menaçait sa sépulture" (Louis Massignon, "La notion du vœu", idem, p.590) -, mais l'endroit exact de sa sépulture sujet à controverse.
"Il fallait que Fâtima, cet otage de l'hospitalité arabe, qui priait non pour elle-même, mais pour les autres, meure dans la déréliction, emmurée dans son deuil filial, gardant à son père mort sa main, cette bay'a, ce serment d'allégeance, le shebbâk al-Rasûl : gage de sa promesse de venir la chercher la première, lui, après sa mort. En fait, elle mourut, 75 jours après lui, ayant accouché avant terme, d'un fils mort-né, Muhsin, sâbib al-sirr al-khafi ; malmenée comme une rebelle pour avoir refusé de sortir de sa "demeure d'afflictions" (bayt al-ahzân) et d'aller prêter serment. Elle avait, alors, "dénoué sa chevelure", geste noble de détresse suprême de la femme libre ; qu'elle renouvellera à la Résurrection : l'indignation de la Femme." "La Mubahala de Médine et l'hyperdulie de Fatima" Louis Massignon, (1943-1955), Opera minora, I, P.U.F., 1969
Plus fragile que son époux, profondément affectée par l’absence de son père, troublée par le comportement de l’esprit de la contestation des droits de la Famille du Prophète Mohammad (pslf), Fatima (s) sera chaque jour davantage envahie par la maladie : « Lorsque la maladie d’Az-Zahra s’aggrava, elle dira à son cher époux : « Mon cher cousin, je sens arriver la proximité de l’instant de mon Retour vers mon Créateur et de l’instant qui va me joindre à nouveau à mon père, et je voudrais te faire quelques confidences.2
Ali lui dira : « Recommande et confie-moi tout ce que ton cœur nécessite, ô fille du Messager de Dieu, exalté soit-Il (…) Je suis déjà tellement affecté et malheureux à l’idée de notre proche et irréversible séparation dans le monde d’ici-bas, la peine de ton absence m’attriste déjà… Par Dieu ! Je revis la même douleur continuelle qu’a créée en moi l’absence à nos côtés du Messager de Dieu (…) Demande et confie-moi ce que ton cœur nécessite, je te fais la promesse de m’acquitter de tes exigences avec dévouement ; j’accomplirai minutieusement et en toute sincérité tes ultimes volontés terrestres et je privilégierai tes exigences aux miennes. »
Elle lui demandera alors ceci : « Enterre-moi de nuit, dissimule le lieu de ma tombe, qu’aucun de ceux qui m’ont opprimée et maltraitée n’assiste à mes funérailles (…) Ô ! Mon cousin ! Si tu épouses une autre femme après moi, je te demande de cohabiter une journée et une nuit avec elle, et de consacrer la journée et la nuit suivantes à mes enfants ; de ne pas élever la voix sur eux, Ô père de Al-Hassan, Aba al-Hassan, car ils sont dans la tristesse des orphelins, de ceux qui deviendront des étrangers dans ce monde, de ceux qui sont affligés et abattus. Hier, ils ont assisté au Sublime Retour de leur bien-aimé grand-père, et aujourd’hui est arrivé l’instant du Retour de leur mère. Malheur à une communauté qui les tourmente, qui les déteste et qui les assassine. »
Quelques heures plus tard, elle se lèvera pour accomplir le bain rituel de la purification ; s’allongera à nouveau, face à la qibla – orientation vers laquelle se trouve la Sainte Kaaba – et elle laissera échapper son âme vers son Seigneur, satisfaite et apaisée à l’idée de rejoindre son bien-aimé père, le Messager de Dieu. L’Imam ressentira encore plus profondément l’absence d’une épouse modèle, d’une mère sainte et pleine d’affection à l’égard de ses enfants, d’une alliée exceptionnelle, jeune, vaillante, courageuse et dynamique dans le chemin de Dieu, exalté soit-Il. Ce furent les dernières recommandations de Fatima la Radieuse.
Les gens de Médine apprendront le décès de la fille du Messager de Dieu. Ils accourront chez elle pour accomplir la prière du défunt et participer à ses funérailles, mais tout avait déjà été réalisé. Ils en furent bouleversés, profondément attristés lorsqu’ils apprirent les dernières volontés de la fille du Prophète qui avait exigé d’être inhumée dans un absolu secret, dans l’obscurité de la nuit après qu’Ali et un groupe de ses fidèles compagnons eurent accompli pour elle la prière. »
Voyons maintenant, selon certains historiens de renommés, le commentaire d’Abu Bakr après avoir écouté Fatima Az-Zahra.
Il déclare : « Ô la fille du Messager de Dieu ! (…) Sans aucun doute, le Prophète est votre père et d’aucune autre femme ; le frère de votre mari et non d’un autre homme ; sans aucun doute il l’a préféré à tous ses compagnons et sans aucun doute aussi, Ali l’a soutenu dans tous les événements les plus cruciaux ; seul l’homme heureux peut vous aimer et seul l’homme ingrat et mauvais peut vous nuire.
Vous êtes la progéniture bénie du Messager de Dieu, les Elus parmi les autres, nos Guides pour notre bien, notre voie à suivre pour parvenir au Paradis, et vous – la meilleure des femmes – et la fille du meilleur des Prophètes, véridique dans ses conclusions, excellente dans son raisonnement. Vous ne pouvez pas être dépourvue de vos droits ni suspectée dans votre revendication (…)
Cependant, j’ai sûrement entendu votre père dire : « Nous, le groupe des Prophètes, nous ne faisons pas hériter les biens matériels, or, argent et immeubles, mais nous faisons hériter le Livre Saint, la sagesse, la science et la Prophétie. Et ce qui nous appartient en moyens de vie appartiendra au successeur après nous qui le gérera. » Bien, il en est aujourd’hui ainsi de ma position et de la propriété dont les revenus serviront au budget de la guerre et de la défense des Musulmans, et cette décision a été prise d’un commun accord entre les Musulmans, Elle n’émane pas d’une décision personnelle. Je n’abuse pas de mon pouvoir. Voilà mes biens, je les mets à votre disposition. Ô vous l’illustre Dame de la Nation de son père, et l’arbre béni de sa descendance… Voilà ! Pensez-vous encore que je viole la parole de votre père ? »
Alors, Fatima rejettera l’argument d’Abu Bakr faisant état d’un propos du Prophète disant que les Prophètes ne laissent pas d’héritage. Elle lui opposera l’argument coranique apportant les preuves du Droit d’héritage de la progéniture des Prophètes. Elle s’exclamera en disant :
« Gloire à Dieu !Mon père, le Messager de Dieu, ne s’est jamais éloigné ni opposé aux préceptes inscrits dans le Livre de Dieu, ni pratiqué, ni inventé, ni légiféré des lois qui lui soient contraires. Il a strictement et toujours pris à la lettre les recommandations et commandements divins, il s’en est toujours tenu à l’application des versets coraniques. Conspirerez-vous encore contre sa mémoire après son décès ? Allez-vous énoncer de faux témoignages et propos en son absence, selon la manière habituelle qui engendraient complots et séditions, dont mon père était la victime sa vie durant ? Alors que le Livre de Dieu est clair et édifiant en matière de règlement de tous litiges. Il y est écrit concernant l’héritage : « (…) Il héritera de moi ; il héritera de la famille de Jacob (…) » « Salomon hérita de David (…) »
Dieu, exalté soit-Il, a clairement inspiré et réglementé le Droit de l’héritage en désignant : les ayants droit, les principes du partage, la part qui revient à l’homme et celle qui revient à la femme, pour que soit écarté l’esprit de scepticisme, de suspicion des imposteurs et d’équivoque des égarés !
« Vos âmes, plutôt, vous ont suggéré quelque chose en vous faisant croire que votre action était bonne … (Il ne me reste plus donc) qu’une belle patience ! C’est Allah qu’il faut appeler au secours contre ce que vous raconter ! » (Coran 12/18)
Alors, Abu Bakr reprendra la parole pour dire : « Dieu est Véridique ainsi que Son Prophète. Sa fille est véridique. Elle est la source de la sagesse, le lieu de la Guidance et de la Miséricorde, le pilier de la Religion et l’argument irréfutable. Je ne peux écarter votre esprit de droiture ni refuser les propos de votre discours. Toutefois, entre vous et moi, il y a ces Musulmans. Ils m’ont prêté allégeance, rendu responsable, et conformément à leur volonté j’ai accepté. Je n’ai aucune intention ni désir de me comporter en despote ni vouloir bénéficier d’un quelconque avantage de ma position. Ils sont témoins. »
Ces propos, Abu Bakr voulait qu’ils soient entendus pour apaiser les esprits. L’opinion publique, irritée de la tournure que prenaient les événements, commençait à manifester son mécontentement à propos du fait injuste imposé à la fille du Prophète. Des voix et clameurs s’élèveront de la foule en soutien à Fatima. Son discours était la révélation cruciale du moment. Pour calmer l’ardeur de l’assemblée, Abu Bakr proférera des menaces. Il nous a été rapporté que ce jour-là un grand nombre de personnes pleureront de chagrin. Médine était en effervescence. De partout, des protestations en soutien à Fatima se faisaient entendre.
Alors, Abu Bakr, inquiété de l’ampleur du mouvement, dira à Omar : « Vous auriez dû me laisser appliquer la décision prise (la restitution de Fadak). Elle aurait apaisé les esprits. Puis, c’était, de notre part, la mesure à prendre la plus juste. »
Omar rétorquera : « Une telle décision était nuisible à votre position et un grave handicap pour votre pouvoir. Je vous ai conseillé par compassion à votre égard. »
Abu Bakr : « Quelle grave erreur que celle d’avoir oublié la fille de Mohammad ! Aujourd’hui, les gens ont été informés de la spoliation de ses droits, de son action en revendication et de nos complots en la matière ! »
Omar se voulant rassurant : « Après tout, ce n’est qu’un événement du jour. Il sera rapidement oublié comme si rien n’avait été dit et accompli. » Il déclamera quelque vers de sa composition dont la teneur exaltait le classement dans l’oubli de l’événement. Omar, s’adressant de nouveau à Abu Bakr lui suggéra ceci : « Accomplissez la prière. Acquittez-vous de l’aumône-azzakat. Recommandez le bien. Interdisez le mal. Assurez le tribut et les taxes. Respectez vos proches car Dieu dit : « Les bonnes actions dissipent les mauvaises. Ceci est un Rappel pour ceux qui se souviennent. » (Coran 11/114) Voyez-vous, après tout, un seul péché parmi une multitude de bonnes actions ce n’est pas grave. Soyez rassurés ! »
Abu Bakr, tranquillisé et satisfait des propos de Omar, lui tapotera l’épaule en signe d’approbation en disant ceci : « Vous avez contribué au soulagement de ma peine. »
Les droits de Fatima sont reconnus, mais ses biens ne lui sont pas restitués
Pris de l’esprit de réparation du dommage causé par le fait injuste et suite aux preuves apportées, le dirigeant prendra la décision de rendre ses biens à Sainte Fatima (s), mais un autre l’en empêchera. Toutefois, lorsque Sainte Fatima (s) quittera le dirigeant, un autre événement apparu soudainement.
Omar : « Qu’est-ce que vous avez dans la main ?! »
Abu Bakr : « Un décret que je viens d’écrire en faveur de Fatima, dans lequel je prends la décision de lui rendre la propriété de Fada, et l’ensemble de son héritage en provenance de son père. »
Omar : « D’où prendrez-vous les dépenses si les Arabes décident de vous combattre ? »
Puis, il s’empara du décret pour le déchirer. » (Fatima : The Gracious – adaptation : Odeh A. Muhawesh – éd: Ansarian Publications – Qom – R.I. D’Iran p. 182)
Lorsque Fatima sera envahie par la maladie, Abu Bakr et Omar décidèrent de lui rendre visite. Ils demanderont la permission d’entrer mais elle la leur refusa. Alors Abu Bakr fera la vœu de ne plus entrer dans une maison tant qu’il n’aurait pas rencontré Fatima pour lui réclamer son pardon.
En réponse à ce vœu, il passera la première attente dans le froid de la nuit. Omar, de l’autre côté, ira voir Ali (s) et s’adressera à lui : « Plus d’une fois nous sommes venus dans l’intention de visiter Fatima, afin de la récompenser, mais elle refuse catégoriquement de nous laisser entrer. Si vous allez la voir, pouvez-vous lui demander de notre part la permission d’entrer pour parler avec elle ? »
L’Imam Ali (s) : « Sûrement, je le lui demanderai ! » Puis, il entra dans la demeure de Fatima : « Ô fille du Messager de Dieu ! Vous avez connaissance de l’intention de ces deux hommes. Ils sont souvent venus jusqu’à votre demeure pour vous rencontrer, mais vous leur avez refusé l’accès de votre intérieur ; maintenant, ils viennent de me demander de servir d’intermédiaire pour que vous leur accordiez la permission d’entrer. »
Ayant obtenu son accord, Ali (s) sortira de la demeure pour prévenir les deux hommes de la permission d’entrer qui leur était accordée. Ils entreront donc dans la demeure. Ils lui présenteront leurs condoléances auxquelles elle ne répondra pas, se détournant d’eux. Ils déambuleront partout dans la pièce afin d’obtenir un regard, jusqu’au moment où elle adressera la parole à Ali : « Ali, veuillez me couvrir avec votre vêtement », puis elle dit ensuite aux femmes : « Tournez-moi vers eux ! »
Alors Abu Bakr dit : « Ô fille du Messager de Dieu ! Nous sommes venus jusqu’à vous avec l’intention d’obtenir votre complaisance et d’éliminer votre courroux à notre égard ; nous vous demandons de nous accorder votre pardon pour nos actes injustes accomplis à votre égard. »
Fatima : « Je n’accorderai aucun propos ni à l’un ni à l’autre tant que je n’aurai pas déposé plainte contre vous devant Dieu. Je me plaindrai de tous vos actes commis et décisions prises injustement à mon encontre. » Puis, s’adressant à l’Imam Ali : « Je ne m’adresserai à aucun d’eux tant que je ne leur aurai pas demandé s’ils se souviennent de ce qu’avait dit le Messager de Dieu à ce propos, je m’engagerai soit à leur parler, soit à me taire. »
Ils diront : « Par Dieu ! Elle en a le droit ! Nous exprimerons que ce qui est juste et nous ne témoignerons que pour ce qui est vrai. »
Fatima : « Au nom de Dieu, je vous demande de vous souvenir lorsque le Messager de Dieu vous appela à sortir au beau milieu de la nuit à propos d’un sujet concernant Ali. »
Eux : « Oui, par Dieu ! »
Fatima : « Au Nom de Dieu ! Je vous demande si vous avez bien entendu ce qu’il a dit : « Fatima est de moi, quiconque l’offense m’offense et celui qui m’offense, offense Dieu. »
Ils répondront l’un et l’autre : « Oui ! Par Dieu ! Nous en avons le souvenir ! »
Fatima : « Que la louange soit au nom de Dieu ! Ô Dieu ! Je vous prends à témoin : ils reconnaissent avoir entendu. Elle leva les mains vers le Ciel, et dit : « Ô Mon Dieu ! En vérité, ils m’ont offensée durant ma vie. Par Dieu ! Je ne vous pardonnerai pas tant que je ne rencontrerai pas mon Seigneur et déposé contre vous, devant Lui, à propos de ce que vous m’avez fait subir et infliger. »
A écouter les lamentations et les reproches de la fille du Prophète Mohammad (pslf), Abu Bakr – calife à l’époque des faits – se mettra à gémis et à exprimer des regrets : « Je voudrais que ma mère n’ai pas accouché de moi ! »
Omar : « C’est impensable que des gens aient pu vous considérer comme responsable de leurs affaires alors que vous en êtes incapable, et rien qu’une personne atteinte de la crainte de la vieillesse ! Vous êtes angoissé du courroux d’une femme et vous vous réjouissez de sa complaisance à votre égard. Qu’y a-t-il de mauvais pour celui qui courrouce une femme ? » Puis, ils quitteront la demeure. (Fatima : The Gracious – adaptation : Odeh A. Muhawesh – éd: Ansarian Publications – Qom – R.I. D’Iran p. 193)
“Elle dira avec fermeté aux gens : “Vous avez éloigné les ayants droit du pouvoir par votre perfidie et vous vous êtes enfermés dans le silence par complicité… Je connais les motifs et les raisons de votre attitude stérile à notre égard. Votre non-assistance à la famille du Messager de Dieu (pslf) sont à l’image de votre rancune et de votre désir de vengeance… » Puis, elle récitera ce verset : « Si vous êtes ingrats, vous et tous ceux qui sont sur la Terre, sachez que Dieu se suffit à Lui-même et qu’Il est digne de louanges. » (Coran 14/8)
La profonde tristesse de Fatima Az-Zahra témoignant de la trahison de certains compagnons
Un jour, le Prophète Mohammad (pslf) dira devant une assemblée considérable de notables musulmans : « Fatima est une partie de moi. Aussi, celui qui l’irrite m’irrite également. »
Un autre jour, en s’adressant à sa fille, il lui dira : « Ô Fatima ! Allah s’irrite lorsque tu t’irrites. Il est satisfait lorsque tu es satisfaite. ».
Les événements ayant suivi le décès de son père avaient bouleversé et réellement irrité Sainte Fatima Az-Zahra (s) au point où elle ira exprimer sa douleur auprès de la tombe de son père :
« A propos de la tristesse ressentie par Fatima Az-Zahra (s) après le Sublime retour à Son Créateur de l’âme de son père, le Bien-Aimé Prophète Mohammad (pslf), sa servante Fidda a raconté ceci :
« Au huitième jour faisant suite au décès de son père, Fatima (s) révélera l’ampleur de sa tristesse et de ses difficultés à vivre dans un monde hostile vidé de la présence de son père. Elle se rendit à la mosquée, et couverte de larmes, elle dira :
« Ô mon père ! Ô mon ami sincère ! Ô Mohammad ! Ô Abu Al-Qasim ! Ô le protecteur des veuves et des orphelins ! Qui peut vous remplacer à la Kaaba et à la mosquée ! Qui peut vous remplacer auprès de votre fille plongée dans la tristesse, la mélancolie et la douleur ! »
Puis Fidda continue son récit :
« Ensuite, Fatima (s) se dirigea vers la tombe du Prophète (pslf), ses pleurs et ses sanglots l’obligeront à une marche chancelante. Arrivée au Mizaneh, elle s’effondrera inconsciente. Aussi, les femmes accourront à son secours, et après lui avoir rafraîchi le visage avec de l’eau de source, elle manifestera de nouveau des signes de vie.
Fatima dira alors : « Mes forces se sont évanouies, ma résistance m’a fait défaut, mes ennemis se réjouissent de mon chagrin, et mon affliction me fait lentement mourir !
Ô mon père ! Je suis dans la perplexité et la solitude, affaiblie par le chagrin et profondément mélancolique ! Ma voix s’est éteinte mon dos s’est brisé ; ma vie est ballottée par les vicissitudes ; je ne trouver personne après vous, ô mon père, pour soulager ma peine ; personne pour m’aider en ces temps très difficiles, face auxquels je suis fragile et pleine d’impuissance ! Tel le précise les Révélations, le lieu de la présence de Gabriel (s) et de Michaël (s) a disparu avec votre départ, ô père !
Les intentions (des gens) ont changé. Les portes se sont fermées devant moi. Raisons pour lesquelles ce monde devenu hostile m’est difficile à vivre. Mes larmes se déverseront sur vous aussi longtemps qu’un souffle de vie sera présent en moi. Mon désir de vous rejoindre ne pourra cesser, mon affliction créée par notre séparation ne trouvera jamais de fin dans le monde d’ici-bas. »
Les sanglots de Fatima (s) allaient dès lors augmenter d’intensité :
« Ô mon père ! Avec votre départ, la lumière du monde a disparue. Les fleurs se sont fanées après s’être ouvertes à la vie tout le temps de votre présence parmi nous.
Ô mon père ! Ma mélancolie n’aura de fin tant que durera notre séparation.
Ô mon père ! Le sommeil m’a quitté depuis le jour de notre éloignement !
Ô mon père ! Où est-il celui qui était proche de la veuve et des orphelins ? Celui qui fût donné à la Communauté pour jusqu’au Jour de la Résurrection !
Ô mon père ! Après vous nous avons été placés dans le monde des opprimés ! Ô mon père ! Après vous les gens nous ont délaissés, oubliant la noblesse de notre lien glorieux qui nous unissait à votre présence parmi les gens.
Quelle larme peut-elle être retenue suite à votre Sublime retour vers notre Créateur ?
Quelle mélancolie peut-elle être éteinte après votre départ ? Quelles paupières peuvent-elles encore se refermer sur un sommeil paisible depuis votre absence ?
Ô mon père ! Vous êtes le printemps de la foi et la lumière des Prophètes ! Comment les montagnes vont-elles résister ? Et les mers ne pas s’assécher ? Et la Terre ne pas trembler ? Ô mon père ! Je suis tant affligée de la peine la plus pesante à porter, et ma déroute est sans fin.
Ô mon père ! Je suis atteinte de la plus profonde infortune et de la plus vaste calamité qui puissent être vécues dans le monde d’ici-bas. Les Anges vous pleurent, et les étoiles se sont immobilisées !
Depuis votre envol vers le Très-Haut, même votre minbar a perdu de sa splendeur, vidé de votre ineffable conversation intime avec votre Seigneur ! Certes, votre tombeau est comblé de votre présence et le Paradis satisfait de votre retour, de vos invocations et de vos prières.
Ô mon père ! Quelle mélancolie enveloppe les lieux de vos sermons et discours ! Combien je vais souffrir de tout ce qui se prépare à l’horizon de la déviance et jusqu’au jour où je vous rejoindrai ! Combien est affligé Abul Al-Hassan (Imam Ali (s)) : celui qui fût désigné à votre succession ! Le père de vos deux enfants : Al Hassan et Al-Hossein, vos bien-aimés. Celui qui vous a été confié dès son enfance, et dont vous ferez votre frère ! Celui que vous avez le plus aimé de tous vos compagnons. Le père de Al-Hassan, le premier à vous accompagner et à vous soutenir.
Vraiment, la mélancolie s’est emparée de nos cœurs. Nos pleurs nous font mourir lentement et notre détresse ne cesse de nous accompagner ! »
Puis, Dame Fatima (s) rejoindra sa demeure, toujours triste et en pleurs. Elle vivra ainsi jusqu’au jour où elle rejoindra son père bien-aimé, à peine quelques semaines après le Sublime retour à Son Créateur de l’âme du Prophète Mohammad (pslf). » (Fatima : The Gracious, 1990, p. 154.)
L’enterrement secret de Fatima, la preuve de sa colère
Fâtima ne survivra que 75 jours à la mort du Prophète (six mois selon Tabari : "Dans cette même année, au mois de ramadhân, mourut Fâtima, la fille du Prophète, six mois après la mort de son père ; elle était âgée de vingt-neuf ans. Elle sera enterrée de nuit par 'Alî et inhumée à Médine, - "Quand Fâtima mourut, elle demanda à être enterrée en secret ; la jalousie de A'icha menaçait sa sépulture" (Louis Massignon, "La notion du vœu", idem, p.590) -, mais l'endroit exact de sa sépulture sujet à controverse.
"Il fallait que Fâtima, cet otage de l'hospitalité arabe, qui priait non pour elle-même, mais pour les autres, meure dans la déréliction, emmurée dans son deuil filial, gardant à son père mort sa main, cette bay'a, ce serment d'allégeance, le shebbâk al-Rasûl : gage de sa promesse de venir la chercher la première, lui, après sa mort. En fait, elle mourut, 75 jours après lui, ayant accouché avant terme, d'un fils mort-né, Muhsin, sâbib al-sirr al-khafi ; malmenée comme une rebelle pour avoir refusé de sortir de sa "demeure d'afflictions" (bayt al-ahzân) et d'aller prêter serment. Elle avait, alors, "dénoué sa chevelure", geste noble de détresse suprême de la femme libre ; qu'elle renouvellera à la Résurrection : l'indignation de la Femme." "La Mubahala de Médine et l'hyperdulie de Fatima" Louis Massignon, (1943-1955), Opera minora, I, P.U.F., 1969
Plus fragile que son époux, profondément affectée par l’absence de son père, troublée par le comportement de l’esprit de la contestation des droits de la Famille du Prophète Mohammad (pslf), Fatima (s) sera chaque jour davantage envahie par la maladie : « Lorsque la maladie d’Az-Zahra s’aggrava, elle dira à son cher époux : « Mon cher cousin, je sens arriver la proximité de l’instant de mon Retour vers mon Créateur et de l’instant qui va me joindre à nouveau à mon père, et je voudrais te faire quelques confidences.2
Ali lui dira : « Recommande et confie-moi tout ce que ton cœur nécessite, ô fille du Messager de Dieu, exalté soit-Il (…) Je suis déjà tellement affecté et malheureux à l’idée de notre proche et irréversible séparation dans le monde d’ici-bas, la peine de ton absence m’attriste déjà… Par Dieu ! Je revis la même douleur continuelle qu’a créée en moi l’absence à nos côtés du Messager de Dieu (…) Demande et confie-moi ce que ton cœur nécessite, je te fais la promesse de m’acquitter de tes exigences avec dévouement ; j’accomplirai minutieusement et en toute sincérité tes ultimes volontés terrestres et je privilégierai tes exigences aux miennes. »
Elle lui demandera alors ceci : « Enterre-moi de nuit, dissimule le lieu de ma tombe, qu’aucun de ceux qui m’ont opprimée et maltraitée n’assiste à mes funérailles (…) Ô ! Mon cousin ! Si tu épouses une autre femme après moi, je te demande de cohabiter une journée et une nuit avec elle, et de consacrer la journée et la nuit suivantes à mes enfants ; de ne pas élever la voix sur eux, Ô père de Al-Hassan, Aba al-Hassan, car ils sont dans la tristesse des orphelins, de ceux qui deviendront des étrangers dans ce monde, de ceux qui sont affligés et abattus. Hier, ils ont assisté au Sublime Retour de leur bien-aimé grand-père, et aujourd’hui est arrivé l’instant du Retour de leur mère. Malheur à une communauté qui les tourmente, qui les déteste et qui les assassine. »
Quelques heures plus tard, elle se lèvera pour accomplir le bain rituel de la purification ; s’allongera à nouveau, face à la qibla – orientation vers laquelle se trouve la Sainte Kaaba – et elle laissera échapper son âme vers son Seigneur, satisfaite et apaisée à l’idée de rejoindre son bien-aimé père, le Messager de Dieu. L’Imam ressentira encore plus profondément l’absence d’une épouse modèle, d’une mère sainte et pleine d’affection à l’égard de ses enfants, d’une alliée exceptionnelle, jeune, vaillante, courageuse et dynamique dans le chemin de Dieu, exalté soit-Il. Ce furent les dernières recommandations de Fatima la Radieuse.
Les gens de Médine apprendront le décès de la fille du Messager de Dieu. Ils accourront chez elle pour accomplir la prière du défunt et participer à ses funérailles, mais tout avait déjà été réalisé. Ils en furent bouleversés, profondément attristés lorsqu’ils apprirent les dernières volontés de la fille du Prophète qui avait exigé d’être inhumée dans un absolu secret, dans l’obscurité de la nuit après qu’Ali et un groupe de ses fidèles compagnons eurent accompli pour elle la prière. »