Versets Coraniques dont
l'Interprétation est l'Objet de Divergence
A- L'invocation de quelqu'un d'autre qu'Allah
Sheikh Muhammed b. Abdel-Wahhâb, fondateur de l'Ecole wahhabite dit dans son livre
Les trois fondements et leurs arguments, p. 4:
«Sache qu'Allah t'accorde Sa grâce, que tout Musulman et toute Musulmane doivent apprendre ces trois questions et les pratiquer.(54)
1)- Allah nous créa
2)- Allah n'aime pas en matière de culte qu'on Lui associe quelqu'un d'autre, que ce soit un ange très proche ou un prophète envoyé (aux humains). Le prouve ce verset coranique: «
Les Moquées appartiennent à Allah, n'invoquez donc personne à côté d'Allah». (V. 18/LXXII)
Ils (les wahhabites) entendent par l'invocation de quelqu'un d'autre qu'Allah le fait que le Musulman dise par exemple:
(Ô Messager d'Allah! (ou un autre allié d'Allah), en vue de le faire intercéder en sa faveur. Tous leurs arguments reposent sur les versets susmentionnés.
B- Le jugement de quelqu'un d'autre qu'Allah
Selon eux, il est aussi condamnable que l'invocation de quelqu'un d'autre qu'Allah. Leurs antagonistes s'étonnent de voir cette ressemblance frappante entre l'argumentation wahhabite et celle des Khawârij (les dissidents à l'époque de l'Imam 'Ali (a. s.) qui taxèrent de renégats ceux qui avaient accepté l'arbitrage à Siffine. En effet, les deux camps s'appuient sur des versets tels:
«...
Le jugement n'appartient qu'à Allah. Je me confie en Lui. Qu'en Lui se confient ceux qui s'en remettent entièrement à Lui». (V. 67/XLL)
«
Chercherai-je un autre qu'Allah comme arbitre alors que c'est Lui Qui a fait descendre vers vous l'Ecriture? ...»
Réplique des antagonistes:
En réponse aux arguments wahhabites, leurs adversaires disent que les versets du Coran se clarifient les uns les autres. Ainsi, si l'on trouve dans le Coran:
«Le jugement n'appartient qu'à Allah», on trouve aussi ce verset:
« ... Juge entre eux ou bien détourne-toi d'eux, s'ils viennent à toi. Si tu te détournes d'eux, ils ne te nuiront en rien. Si tu les juges, juge-les avec équité ...». (V. 42/V)
Par ce verset, Allah permet à Son Messager de juger, d'arbitrer entre les Gens du Livre (Juifs). Dans un autre verset, il s'agit même de chercher l'arbitrage d'un particulier:
«Si vous craignez la séparation entre des conjoints, suscitez un arbitre de la famille de l'époux et un arbitre de la famille de l'épouse. Allah rétablira la concorde entre eux deux, s'ils veulent se réconcilier». (V. 35/IV)
Nulle contradiction donc entre ces versets. Celui qui stipule que le jugement appartient à Allah n'enseigne pas que ce jugement est similaire à celui des juges humains dans leurs tribunaux. Celui-ci est circonscrit, en conformité avec les lois en vigueur et limité aux personnes intéressées. Ces juges ne sont pas habilités à désigner des juges en leur nom, ce pouvoir étant celui d'une autorité supérieure. Autrement dit, les juges humains ne disposent pas du jugement absolu mais seulement de celui (relatif) de juger entre leurs semblables. Quant à Allah, IL juge selon Sa Science et Son Pouvoir, permet à qui IL veut de juger dans Sa Royauté et dans les limites qu'il veut car c'est à Lui qu'appartient le jugement absolu.
Ainsi quand les prophètes jugent, ils le font en dépendance avec le Jugement d'Allah. Ceux qui cherchent en arbitres à trancher le différend de deux conjoints, quand ils le font conformément aux bois d'Allah, n'appliquent pas le jugement de quelqu'un d'autre qu'Allah, ne le font pas non plus à l'exclusion d'Allah ou contre Sa volonté ou en concomitance avec Lui. Ils jugent selon Son ordre et après Son autorisation. Comme pour le jugement d'Allah, Ses autres attributs, dont des exemples vont suivre, ne souffrent d'aucune limite puisqu'ils sont absolus.
La Royauté appartient à Allah
Entre ce verset:
«La Royauté des cieux et de la terre et de ce qui est entre les deux appartient à Allah. Le retour final se fera vers Lui» (V. 18/V),
et celui-ci:
«... Et ce que détiennent vos mains», (Vs. 3, 24, 25, 36/IV),
il n'y a pas de contradiction puisque Allah - glorifié soit-IL - dit:
«Ô Allah, Souverain du Royaume! Tu donnes la royauté à qui Tu veux et Tu enlèves la royauté à qui Tu veux. Tu honores qui Tu veux et Tu abaisses qui Tu veux. Le bonheur est dans Ta main. Tu es, en vérité, Puissant sur toute chose». (V. 26/III).
Le Créateur, Celui Qui ressuscite les morts
Ainsi
«Allah est Créateur de toute chose» (V. 102/VI) et
«C'est Lui Qui fait vivre et Qui fait mourir». (V. 80/XXIII)
Ces deux versets ne sont pas contredits par celui selon lequel Allah permit à Jésus (a. s.) de créer et de faire vivre:
«Je suis venu à vous avec un signe de votre Seigneur: je vais, pour vous, créer d'argile comme une forme d'oiseau. Je souffle en lui et il est "oiseau" - avec la permission d'Allah. Je guéris l'aveugle, le muet et le lépreux; je ressuscite les morts avec la permission d'Allah». (V. 49/III)
L'Intercesseur, Le Maître
Quand on lit ce verset: «
Prendront-ils des intercesseurs en dehors d'Allah? Dis: Et s'ils ne possèdent rien, s'ils ne comprennent pas? Dis: l'intercession appartient à Allah. A Lui la Royauté des cieux et de la terre! Vous retournerez vers Lui». (Vs. 42-43/XXXLX)
Et cet autre verset :
«... Il n'y a d'intercesseur qu'avec Sa permission ...» (V. 3/X)
Nous comprenons que l'intercession appartient à Allah, qu'IL permet à Ses saints serviteurs d'intercéder et qu'ils ne le font pas en dehors de Lui.
Ce verset qui dit:
«La Royauté des cieux et de la terre appartient à Allah. IL fait vivre et IL fait mourir. Vous n'avez, en dehors d'Allah, ni maître, ni défenseur» (V. 116/IX), n'est nullement en contradiction avec cet autre verset:
«Vous n'avez pas de Maître en dehors d'Allah, de Son Messager et de ceux qui croient: ceux qui s'acquittent de la prière, qui font l'aumône tout en s'inclinant humblement». (V. 55/V)
Par conséquent, si nous disons qu'Allah est notre Maître ainsi que Son Messager et celui qui fait l'aumône en état de génuflexion parmi les croyants, cela ne relève en rien du polythéisme parce que la souveraineté (Autorité) appartient exclusivement à Allah Qui l'accorde à Son Prophète et à Ses alliés, à l'instar de l'autorité que détient le père sur son enfant.
L'invocation du Messager (SAW) par Laquelle on cherche accès auprès d'Allah
Comme nous avons vu qu'un juge, un propriétaire, un intercesseur, un créateur, un maître ou quelqu'un qui fait vivre ou fait mourir, ne jouit de son statut que par la permission d'Allah et non, en dehors de Lui ou avec Lui, de même l'invocation du Prophète (SAW) par laquelle on cherche accès auprès d'Allah ne signifie en aucun cas l'invocation en dehors de Lui ou avec Lui, de personne d'autre que Lui.C'est à dire que l'invocation du Prophète (SAW) n'est pas une application de ce verset:
«N'invoquez donc personne à côté d'Allah». (V. 18/LXXII)
Rappelons, à ce propos, le hadith authentifié par les traditionnistes, rapporté par Ahmed, At-Tirmidhî, Ibn Mâjah et Al-Bayhaqî, selon lequel le Messager d'Allah (SAW) enseigna à un Compagnon aveugle une invocation qu'il devait faire après la prière:
«Ô Allah, je Te demande en m'appuyant sur Ton Prophète Muhammad! Le Prophète de la miséricorde, ô Muhammad par Ta personne, je t'implore Allah pour qu'IL me satisfasse. Ô Allah accepte son intercession en ma faveur!»
Après l'intercession du Messager et l'invocation de cet homme, Allah exauça son vu et le guérit. Cette forme d'invocation par le Prophète (SAW) est une application de ces deux versets:
«Ô vous, qui croyez! Craignez Allah et recherchez les moyens d'aller à Lui ...» (V. 35/V)
«Ceux-là mêmes qu'ils invoquent recherchent le moyen de se rapprocher de leur Seigneur ...» (V. 57/XVII)