salam
L’infaillibilité (Al ‘ismah) selon Sayyid Muhammad Hussein Fadlullah
Q : Des rumeurs courent dans certains milieux qu’au sujet de l’infaillibilité, vous avez un point de vue différent de l’opinion générale. Voulez-vous nous éclairer là-dessus ?
R : En réalité, je n’ai pas au sujet d’Al ‘ismah (l’infaillibilité) une opinion négative. Je crois même que ma méthode dans l’argumentation relative à cette question, est plus saine et plus précise que celle des autres. Parmi les arguments des Anciens leur assertion que la personne faillible perd (généralement) la confiance des gens, ne vont pas vers elle et ne l’écoutent point, ce qui aboutit à l’annulation du rôle du Prophète ou de l’Imam s’ils n’étaient pas infaillibles. Ainsi donc, l’infaillibilité a pour fonction de contenir la réalité des gens qui suivent exclusivement l’homme de confiance. Si Allah, par exemple, avait envoyé des prophètes faillibles ou que le Prophète avait désigné sur ordre divin, des Imams faillibles, les gens n’auraient pas placé leur confiance en eux et l’effet de la prophétie ou de l’Imamat s’en trouverait par conséquent entamé ou perdu.
Nous croyons que cette argumentation ne résiste pas à la critique parce que la raison souscrit effectivement à la nécessité de l’infaillibilité du Prophète ou de l’Imam lors de leur transmission du Message. Sinon les gens n’auraient pas confiance, sachant que cet élu est sujet à l’oubli, à l’inadvertance, à la tentation d’altérer le message…
Par contre, en dehors de sa mission, si l’on suppose que le prophète ou l’Imam se trompe dans les affaires qui le concernent ou dans la vie courante qu’il mène (erreur survenue dans un acte ordinaire, oubli dans une prière…), la raison ne refuse pas d’envisager cette possibilité dans ce domaine. Certains doctes Shi‘ites Sheikh As-çaduq notamment, son père et son sheikh affirmèrent même que la négation de l’inadvertance dans la conduite de l’Imam constitue le premier signe du ghuluw (extrémisme). Certains de nos savants contemporains, notamment As-sayyid Al Khû’îy –qu’Allah lui attribue Sa miséricorde- affirment qu’il n’est pas impossible que le prophète ou l’Imam subisse une inadvertance en dehors de l’accomplissement de sa mission.
A la lumière de ce qui précède, il semble que la raison ne juge pas nécessaire que le prophète ou l’Imam soit infaillible dans les autres affaires que la transmission du Message. Ceci paraît d’autant plus vrai qu’il ne se fait pas exposer pour une simple erreur, à la méfiance des gens. Dans le vécu actuel, nous remarquons que les gens restent fidèlement attachés à beaucoup de personnes actives dans le domaine politique, religieux ou social qui les intéresse en sachant qu’elles commettent des erreurs en dehors de l’activité qui fait l’objet de leur engagement ou même en dedans pourvu qu’elles ne le fassent pas délibérément et qu’elles s’en détachent rapidement.
Vu cette critique, nous avons dit que cette méthode dans l’argumentation ne peut constituer une base raisonnable (un fondement logique) pour fonder l’affirmation de l’infaillibilité générale c’est-à-dire celle qui accompagne le prophète ou l’Imam pendant et en dehors de la transmission du Message.
Nous avons alors essayé d’étudier la nature de la prophétie (pour pouvoir cerner la question). Sachons que la prophétie ne doit pas être assimilée à la fonction du facteur dont le rôle est de faire parvenir les lettres aux destinataires. Après, sa mission prend fin. Non, la mission du prophète est autre chose. Nous lisons dans le Coran : ‘‘C’est Lui Qui a envoyé aux Gentils un Prophète pris parmi eux, qui leur communique Ses versets, qui les purifie, qui leur enseigne le Livre et la Sagesse. Ils se trouvaient auparavant dans un égarement manifeste…’’ (Coran LXII, 2) et cet autre verset : ‘‘Ô toi, le Prophète ! Nous t’avons envoyé comme témoin, comme annonciateur de bonnes nouvelles, comme avertisseur appelant à Allah, avec Sa permission et comme un brillant luminaire’’ (Coran XXXIII, 45-46).
A la lumière de ces nobles versets, nous comprenons que le Prophète (SAW) n’était pas seulement annonciateur de bonnes nouvelles et avertisseur mais aussi un témoin et un brillant luminaire qui devait éclairer aux humains le chemin de la vérité et de la justice. Il est évident alors que l’homme destiné de par sa position à changer le monde sur cette base, doive être exempt du faux dans son esprit, son cœur et son mouvement. Il doit être aussi, en tant que brillant luminaire, exempt de toute obscurité dans son esprit, ses sens et sa conduite. La prophétie serait alors une lumière susceptible d’éclairer les esprits, les cœurs et la vie des gens. Ceci est d’autant plus vrai que le Livre révélé au Messager (SAW) est considéré aussi comme une lumière personnifiée par le Prophète. Celui-ci fut donc un Coran parlant et le Livre sacré fut le Coran silencieux.
Ce rôle grandiose assigné à la prophétie destinée à changer le monde sur la base de la vérité et de la justice, implique la nécessité que le Prophète soit entièrement vérité et loin de toute obscurité. Or, comme l’Imamat est un prolongement de la prophétie (Ô ‘Ali tu as auprès de moi le même statut qu’avait Hârûn auprès de Mûsâ, sauf qu’il n’y aura pas de prophète après moi’’) et que le rôle de l’Imam consiste à veiller sur la shari‘ah et à œuvrer pour que la ligne tracée par la prophétie se prolonge dans la vie des gens, il est nécessaire que l’Imam soit aussi infaillible au même titre que le Messager (SAW).
Pour ce qui est de l’étendue de l’infaillibilité, on peut dire que la personnalité (équilibrée) ne souffre pas de dédoublement. Ainsi l’homme qui n’oublie rien pendant la transmission du message, n’oublie pas non plus dans les autres affaires qui le concernent. De même, celui qui s’engage au côté de la vérité ou de la justice pendant qu’il transmet un message, ne s’en écarte pas quand il s’adonne à d’autres activités.
Reste à soulever un autre point relatif à l’infaillibilité. Celle-ci, sous sa forme extraordinaire, n’est pas le propre de l’homme. Celui-ci, dans l’exercice personnel de ses facultés ne peut s’empêcher de son propre chef, de commettre une erreur ou un écart (ne serait-ce qu’au niveau de l’acte) à moins qu’un jaillissement divin n’enveloppe l’âme d’un prophète ou d’un Imam de telle manière qu’il s’empêche à tous les niveaux de dévier ou d’être dans le faux. Mais là, on envisage la réaction négative de ceux qui opposent (à cette intervention divine) l’inconvénient du prédéterminisme. Cette question n’ayant pas été abordée objectivement et avec un esprit scientifique, nous allons la discuter selon l’approche suivante :
Reste à soulever un autre point relatif à ce sujet : l’élu infaillible choisit volontairement d’obéir à Allah et quand des conditions extérieures sont telles qu’il risque de commettre un péché, Allah l’en empêche en érigeant devant lui des barrières spécifiques qui l’en éloignent. L’infaillibilité ne signifie donc pas la négation du libre arbitre. Mais si la faiblesse humaine est en passe d’avoir le dessus, Allah -gloire à Lui- intervient. C’est ce qu’inspire le Coran qui dit à propos de Yûsuf (joseph) (a.s) : ‘‘Elle pensait certainement à lui et il aurait pensé à elle s’il n’avait pas vu la claire manifestation (Burhân) de son Seigneur’’ (Coran XII, 24) et cet autre verset : Joseph dit : ‘‘Mon Seigneur ! La prison me semble préférable au péché qu’elles m’incitent à commettre. Mais si tu ne détournes pas de moi leurs ruses, j’y céderai et je serai au nombre des ignorants’’ (Coran XII, 33). La protection divine peut venir de l’extérieur ou de l’intérieur. En tout cas, cette infaillibilité n’est pas incompatible avec le libre choix de la personne qui en bénéficie. Elle ne concerne d’ailleurs que le côté négatif de l’acte : la tentation de pécher. Celle-ci, consécutive à la faiblesse humaine, se trouve contrecarrée par un moyen préventif intérieur ou par le surgissement de quelque chose qui entrave la réalisation de la faute. C’est cette opinion qui concorde avec la croyance shi‘ite selon laquelle, le prophète naît infaillible et continue de l’être avant le début de son apostolat et après. L’Imam l’est aussi avant sa désignation à l’Imamat et après …
En définitive, nous ne considérons pas cette question de la nature de l’infaillibilité comme essentielle dans la croyance imamite. Que l’infaillibilité soit acquise volontairement ou donnée providentiellement, dans notre foi, le Prophète et l’Imam sont infaillibles aussi bien dans l’exercice relatif au Message que dans celui qui engage la pensée dans la vie réelle.
L’infaillibilité (Al ‘ismah) selon Sayyid Muhammad Hussein Fadlullah
Q : Des rumeurs courent dans certains milieux qu’au sujet de l’infaillibilité, vous avez un point de vue différent de l’opinion générale. Voulez-vous nous éclairer là-dessus ?
R : En réalité, je n’ai pas au sujet d’Al ‘ismah (l’infaillibilité) une opinion négative. Je crois même que ma méthode dans l’argumentation relative à cette question, est plus saine et plus précise que celle des autres. Parmi les arguments des Anciens leur assertion que la personne faillible perd (généralement) la confiance des gens, ne vont pas vers elle et ne l’écoutent point, ce qui aboutit à l’annulation du rôle du Prophète ou de l’Imam s’ils n’étaient pas infaillibles. Ainsi donc, l’infaillibilité a pour fonction de contenir la réalité des gens qui suivent exclusivement l’homme de confiance. Si Allah, par exemple, avait envoyé des prophètes faillibles ou que le Prophète avait désigné sur ordre divin, des Imams faillibles, les gens n’auraient pas placé leur confiance en eux et l’effet de la prophétie ou de l’Imamat s’en trouverait par conséquent entamé ou perdu.
Nous croyons que cette argumentation ne résiste pas à la critique parce que la raison souscrit effectivement à la nécessité de l’infaillibilité du Prophète ou de l’Imam lors de leur transmission du Message. Sinon les gens n’auraient pas confiance, sachant que cet élu est sujet à l’oubli, à l’inadvertance, à la tentation d’altérer le message…
Par contre, en dehors de sa mission, si l’on suppose que le prophète ou l’Imam se trompe dans les affaires qui le concernent ou dans la vie courante qu’il mène (erreur survenue dans un acte ordinaire, oubli dans une prière…), la raison ne refuse pas d’envisager cette possibilité dans ce domaine. Certains doctes Shi‘ites Sheikh As-çaduq notamment, son père et son sheikh affirmèrent même que la négation de l’inadvertance dans la conduite de l’Imam constitue le premier signe du ghuluw (extrémisme). Certains de nos savants contemporains, notamment As-sayyid Al Khû’îy –qu’Allah lui attribue Sa miséricorde- affirment qu’il n’est pas impossible que le prophète ou l’Imam subisse une inadvertance en dehors de l’accomplissement de sa mission.
A la lumière de ce qui précède, il semble que la raison ne juge pas nécessaire que le prophète ou l’Imam soit infaillible dans les autres affaires que la transmission du Message. Ceci paraît d’autant plus vrai qu’il ne se fait pas exposer pour une simple erreur, à la méfiance des gens. Dans le vécu actuel, nous remarquons que les gens restent fidèlement attachés à beaucoup de personnes actives dans le domaine politique, religieux ou social qui les intéresse en sachant qu’elles commettent des erreurs en dehors de l’activité qui fait l’objet de leur engagement ou même en dedans pourvu qu’elles ne le fassent pas délibérément et qu’elles s’en détachent rapidement.
Vu cette critique, nous avons dit que cette méthode dans l’argumentation ne peut constituer une base raisonnable (un fondement logique) pour fonder l’affirmation de l’infaillibilité générale c’est-à-dire celle qui accompagne le prophète ou l’Imam pendant et en dehors de la transmission du Message.
Nous avons alors essayé d’étudier la nature de la prophétie (pour pouvoir cerner la question). Sachons que la prophétie ne doit pas être assimilée à la fonction du facteur dont le rôle est de faire parvenir les lettres aux destinataires. Après, sa mission prend fin. Non, la mission du prophète est autre chose. Nous lisons dans le Coran : ‘‘C’est Lui Qui a envoyé aux Gentils un Prophète pris parmi eux, qui leur communique Ses versets, qui les purifie, qui leur enseigne le Livre et la Sagesse. Ils se trouvaient auparavant dans un égarement manifeste…’’ (Coran LXII, 2) et cet autre verset : ‘‘Ô toi, le Prophète ! Nous t’avons envoyé comme témoin, comme annonciateur de bonnes nouvelles, comme avertisseur appelant à Allah, avec Sa permission et comme un brillant luminaire’’ (Coran XXXIII, 45-46).
A la lumière de ces nobles versets, nous comprenons que le Prophète (SAW) n’était pas seulement annonciateur de bonnes nouvelles et avertisseur mais aussi un témoin et un brillant luminaire qui devait éclairer aux humains le chemin de la vérité et de la justice. Il est évident alors que l’homme destiné de par sa position à changer le monde sur cette base, doive être exempt du faux dans son esprit, son cœur et son mouvement. Il doit être aussi, en tant que brillant luminaire, exempt de toute obscurité dans son esprit, ses sens et sa conduite. La prophétie serait alors une lumière susceptible d’éclairer les esprits, les cœurs et la vie des gens. Ceci est d’autant plus vrai que le Livre révélé au Messager (SAW) est considéré aussi comme une lumière personnifiée par le Prophète. Celui-ci fut donc un Coran parlant et le Livre sacré fut le Coran silencieux.
Ce rôle grandiose assigné à la prophétie destinée à changer le monde sur la base de la vérité et de la justice, implique la nécessité que le Prophète soit entièrement vérité et loin de toute obscurité. Or, comme l’Imamat est un prolongement de la prophétie (Ô ‘Ali tu as auprès de moi le même statut qu’avait Hârûn auprès de Mûsâ, sauf qu’il n’y aura pas de prophète après moi’’) et que le rôle de l’Imam consiste à veiller sur la shari‘ah et à œuvrer pour que la ligne tracée par la prophétie se prolonge dans la vie des gens, il est nécessaire que l’Imam soit aussi infaillible au même titre que le Messager (SAW).
Pour ce qui est de l’étendue de l’infaillibilité, on peut dire que la personnalité (équilibrée) ne souffre pas de dédoublement. Ainsi l’homme qui n’oublie rien pendant la transmission du message, n’oublie pas non plus dans les autres affaires qui le concernent. De même, celui qui s’engage au côté de la vérité ou de la justice pendant qu’il transmet un message, ne s’en écarte pas quand il s’adonne à d’autres activités.
Reste à soulever un autre point relatif à l’infaillibilité. Celle-ci, sous sa forme extraordinaire, n’est pas le propre de l’homme. Celui-ci, dans l’exercice personnel de ses facultés ne peut s’empêcher de son propre chef, de commettre une erreur ou un écart (ne serait-ce qu’au niveau de l’acte) à moins qu’un jaillissement divin n’enveloppe l’âme d’un prophète ou d’un Imam de telle manière qu’il s’empêche à tous les niveaux de dévier ou d’être dans le faux. Mais là, on envisage la réaction négative de ceux qui opposent (à cette intervention divine) l’inconvénient du prédéterminisme. Cette question n’ayant pas été abordée objectivement et avec un esprit scientifique, nous allons la discuter selon l’approche suivante :
- A ceux qui prétendent qu’une infaillibilité prédéterminée sape le fondement de la rétribution dans ce sens que l’homme infaillible ne fait pas le bien volontairement, nous répondons que d’après la scolastique l’homme croyant et bienfaiteur est gratifié par Allah et non rétribué parce que tout en lui appartient à Allah ; son action, son esprit et ses organes par lesquels il adore et rend le culte à Son Seigneur, sont une propriété divine. Par conséquent, le croyant qui fait du bien mérite du bien mais par attribution et non par rétribution. En ce qui concerne l’infaillibilité, qu’est ce qui empêche qu’Allah octroie ce qu’Il veut à Son serviteur indépendamment des efforts fournis ou consents par ce dernier ? Il est le Sage et peut élire qui Il veut pour sauvegarder les intérêts du Message divin. Ce n’est pas quelque chose d’impossible.
- 2- Si Allah, nous demandent d’autres voix, prédétermine l’infaillibilité d’un homme, quel est alors son mérite en comparaison avec ses semblables ? Il se peut dans ce cas que ceux-ci soient meilleurs que lui puisqu’Allah ne les a pas munis de ce dont Il l’a doté !Pour répondre à cette objection, nous disons que le mérite vient d’Allah. C’est Lui Qui l’attribue. C’est Lui Qui donne la valeur et choisit parmi les gens comme parmi les anges des messagers qu’Il ne désigne pas sans raison. Quant au secret de cette Sagesse par laquelle Il préfère ceux-ci à ceux-là, le Coran dit : « Il ne lui est pas demandé compte de ce qu’Il fait alors qu’il leur est demandé compte de ce qu’ils font » (Coran XXI, 23).
Il n’est pas nécessaire que la valeur d’un mérite vienne toujours de la personne humaine. Disons que selon la Sagesse divine, ce mérite est une lumière créée en l’homme par Allah à l’instar du soleil qui est de loin, plus lumineux que la lune et d’autres corps célestes. Pourquoi ? Parce qu’Allah l’a voulu ainsi. La valeur en général provient donc du Créateur -gloire à Lui. Les exemples ne manquent pas : prenons la valeur du Beau : la beauté est donnée. L’homme beau n’a pas créé sa beauté. De même, en créant l’homme ‘‘dans la forme la plus parfaite’’ (Coran XCV, 4), Allah le préfère à l’animal. Cette préférence ne fut certainement pas choisie ou voulue par l’homme. Par conséquent, nous croyons que le mérite qui distingue une personne d’une manière ou d’une autre ne peut être au départ que du ressort divin.
- 3- Une autre objection consiste à dire que si l’infaillibilité était créée en l’homme désigné par Allah, il ne serait plus possible aux gens de le prendre comme modèle en raison du statut inaccessible qui est le sien. Cette allégation ne résiste pas non plus à la critique car il suffit que le modèle réunisse deux conditions : la qualité de l’acte (érigé en bon exemple) et son abordabilité. Il n’est pas nécessaire que le niveau de la personne qui cherche à suivre le modèle, soit identique à celui de la personne qui le représente. En effet, les gens aspirent à suivre l’exemple des savants, bien que ceux-ci aient atteint un degré très élevé de science et de vertu. En revanche, si le Prophète produit un miracle parce qu’il fut doté de certaines forces dont nous sommes privés, il nous est impossible de faire comme lui pour la simple raison qui nous en sommes incapables.
Reste à soulever un autre point relatif à ce sujet : l’élu infaillible choisit volontairement d’obéir à Allah et quand des conditions extérieures sont telles qu’il risque de commettre un péché, Allah l’en empêche en érigeant devant lui des barrières spécifiques qui l’en éloignent. L’infaillibilité ne signifie donc pas la négation du libre arbitre. Mais si la faiblesse humaine est en passe d’avoir le dessus, Allah -gloire à Lui- intervient. C’est ce qu’inspire le Coran qui dit à propos de Yûsuf (joseph) (a.s) : ‘‘Elle pensait certainement à lui et il aurait pensé à elle s’il n’avait pas vu la claire manifestation (Burhân) de son Seigneur’’ (Coran XII, 24) et cet autre verset : Joseph dit : ‘‘Mon Seigneur ! La prison me semble préférable au péché qu’elles m’incitent à commettre. Mais si tu ne détournes pas de moi leurs ruses, j’y céderai et je serai au nombre des ignorants’’ (Coran XII, 33). La protection divine peut venir de l’extérieur ou de l’intérieur. En tout cas, cette infaillibilité n’est pas incompatible avec le libre choix de la personne qui en bénéficie. Elle ne concerne d’ailleurs que le côté négatif de l’acte : la tentation de pécher. Celle-ci, consécutive à la faiblesse humaine, se trouve contrecarrée par un moyen préventif intérieur ou par le surgissement de quelque chose qui entrave la réalisation de la faute. C’est cette opinion qui concorde avec la croyance shi‘ite selon laquelle, le prophète naît infaillible et continue de l’être avant le début de son apostolat et après. L’Imam l’est aussi avant sa désignation à l’Imamat et après …
En définitive, nous ne considérons pas cette question de la nature de l’infaillibilité comme essentielle dans la croyance imamite. Que l’infaillibilité soit acquise volontairement ou donnée providentiellement, dans notre foi, le Prophète et l’Imam sont infaillibles aussi bien dans l’exercice relatif au Message que dans celui qui engage la pensée dans la vie réelle.