'Ashourâ', le jour où le sang des martyrs
a vaincu le sabre des injustes
par le Dr. Yahya Alaoui
Karbalâ est le nom de l’endroit où le petit-fils du Prophète Mohammad, Dieu le bénisse lui et les siens, est tombé martyr au milieu de ses fidèles compagnons, victimes de la soldatesque du calife usurpateur Yazîd fils de Mo‘âwiya, qui emmenèrent ensuite les femmes et les enfants de la famille du Prophète en captivité.
‘Âshûrâ’ désigne le dixième jour du mois islamique de moharram au cours duquel ce martyre eut lieu, et au cours duquel il est toujours commémoré avec la plus grande ferveur.
Karabalâ et ‘Âshûrâ’ sont le c½ur palpitant des fidèles de la Famille du Prophète, que la Paix soit avec eux, c½ur palpitant qui n’a cessé, au cours des siècles, de maintenir en vie l’esprit de justice et de vérité et continuera de le faire jusqu’au Jour dernier.
Plutôt qu’une analyse historique, qui ne peut qu’escamoter les dimensions à la fois les plus profondes et les plus humaines de cette tragédie, c’est à un récit que je vous convierais, un récit semblable à ceux qui se transmettent depuis des siècles dans les réunions commémoratives du martyre de Karbalâ’.
J'en publierais chaque jour une partie, si Dieu le veut, jusqu'au jour même du 'Ashourâ'. Mais avant de commencer, je vous invité à goûter quelques propos des Gens de la Demeure prophétique, que la Paix soit avec eux, et quelques vers d'un de leurs fidèles poètes.
Le grand savant Ahmad Ibn Hanbal rapporte dans son Mosnad (vol.1, p.85, had.648), que l’Imam ‘Alî, que Dieu ennoblisse son visage, a dit :
Un jour que j’entrais chez le Messager de Dieu, Dieu le bénisse lui et les siens, ses yeux débordaient de larmes. Je lui demandai :
« O Messager de Dieu, quelqu’un t’aurait-il faché ? Pourquoi tes yeux débordent-ils de larmes ?
— L’ange Gabriel, me dit-il, vient de me quitter. Il m’a raconté que [mon petit-fils] Hossayn sera tué au bord de l’Euphrate. “Veux-tu que je te fasse sentir de la terre [où il sera tué]?”, me dit-il. Je répondis que oui. Il tendit alors la main, prit une poignée de [cette] terre et me la donna… Alors je n’ai pu empêcher mes larmes de couler. » (Mosnad Ahmad Ibn Hanbal, vol.1, p.85, had.648).
دخلت على النبي صلّى الله عليه وسلّم ذات يوم وعيناه تفيضان قلت يا نبيّ الله أغضبك أحد ما شأن عينيك تفيضان قال بل قام من عندي جبريل قبل فحدّثني أنّ الحسين يقتل بشط الفرات قال فقال هل لك إلى ان أشمّك من تربته قال قلت نعم فمد يده فقبض قبضة من تراب فأعطانيها فلم أملك عينيّ أن فاضتا
(مسند أحمد، ج1 ص85 ح648)
Il est aussi rapporté de l'Imam 'Alî Ibn Moussâ ar-Ridâ, petit-fils de l'Imam Dja'far as-Sâdiq, lui-même arrière-petit-fils de l'Imam Hossayn, que la Paix soit avec eux, qu'il a dit:
« Moharram est un mois durant lequel les gens de la Djâhiliyya considéraient comme illicite de faire la guerre, et voilà qu'ils ont considéré licite d'y verser notre sang, qu'ils y ont porté atteinte à nos dignes épouses, qu'ils y ont capturé nos femmes et enfants et qu'ils ont mis le feu à notre campement et pillé ce qui s'y trouvait de nos trésors: ils ne firent en rien preuve du respect dû au Messager de Dieu en ce qui nous concerne.
En vérité, le jour de Hossayn a meurtri nos paupières et fait couler nos larmes. Celui qui nous est cher a été avili en une terre de Karbalâ qui nous laissa en héritage l'affliction (karb) et l'épreuve (balâ') jusqu'au jour où tout sera fini. Que ceux qui pleurent pleurent donc sur quelqu'un comme al-Hossayn, car de pleurer sur lui diminue les grands péchés.
Lorsqu'on entrait dans le mois de moharram, jamais on ne voyait mon père rire. Il était dominé par la peine jusqu'à son dixième jour, et lorsque ce jour arrivait c'était pour lui une journée de malheur, de tristesse et de pleurs, et il disait: "C'est le jour en lequel on a tué Hossayn…" »
قال الرضا عليه السلام إنّ المحرّم شهر كان أهل الجاهلية يحرّمون فيه القتال فاستحلّت فيه دماؤنا وهتكت فيه حرمتنا وسبي فيه ذرارينا ونساؤنا وأضرمت النيران في مضاربنا وانتهب ما فيها من ثقلنا ولم ترع لرسول الله حرمة في أمرنا.
إنّ يوم الحسين أقرح جفوننا وأسبل دموعنا وأُذلّ عزيزُنا بأرض كربلاء أورثتنا الكرب والبلاء إلى يوم الانقضاء فعلى مثل الحسين فليبك الباكون فإنّ البكاء عليه يحطّ الذنوب العظام.
ثم قال عليه السلام كان أبي إذا دخل شهر المحرّم لا يُرى ضاحكا وكانت الكآبة تغلب عليه حتىّ يمضي منه عشرة أيّام فإذا كان يوم العاشر كان ذلك اليوم يوم مصيبته وحزنه وبكائه ويقول هو اليوم الذي قتل فيه الحسين صلى الله عليه.
Le grand shaykh égyptien al-Bousîrî, auteur de la célèbre qasîda connue sous le nom d'al-Borda, a également composé un autre grand poème faisant l'éloge du Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens, connu sous le titre de al-Hamziyya fî madhi khayri l-bariyya (le Poème rimant en hamza à la gloire de la meilleure des créatures).
Voici quelques vers de ce dernier poème dans lesquels le shaykh s'adresse au Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens, en évoquant les malheurs qui s'abattirent sur ses deux petits-fils, les Imams al-Hassan et al-Hossayn, que la Paix soit avec eux:
Que j'honore ces deux martyrs
dont ni [la bataille du] Taff
ni [celle de] Karbalâ ne
me font oublier les malheurs
En ces deux, les subordonnés
ne respectèrent point ton droit
Quant aux chefs, ils trahirent bien
leur engagement envers toi.
Ils invertirent l'affection
et le soutien à tes parents
Et les hypocrites sortirent
leurs têtes de leurs trous trompeurs
Et leur c½urs se sont endurcis
à l'encontre de ceux-là dont
La terre déplora la mort
tout comme les pleura le ciel.
Et toi aussi, pleure-les donc
autant que tu peux les pleurer
Car c'est bien peu que de pleurer
quand le malheur est aussi grand.
Chaque journée et chaque terre,
de par mon affliction pour eux,
Est Karbalâ et 'Ashourâ',
[de par mon affliction pour eux].
(al-Hamziyya fî madhi khayri l-bariyya, "Poème rimant en hamza
à la gloire de la meilleure des créatures")
من شهيدين ليس يُنسيني الطفّ مصابيهما ولا كربلاء
ما رعى فيهما ذمامَك مرؤوسٌ وقد خان عهدك الرؤساء
أبدلوا الودّ والحفيظة في القربى وأبدت ضبابهَا النافقاء
وقست منهم قلوب على من بكت الأرض فقدَهم والسماء
فابكِهم ما استطعت إنّ قليلا في عظيم من المصاب البكاء
كلّ يوم وكلّ أرض لكربي منهم كربلا وعاشوراء
( الهمزية في مده خير البرية )
dont ni [la bataille du] Taff
ni [celle de] Karbalâ ne
me font oublier les malheurs
En ces deux, les subordonnés
ne respectèrent point ton droit
Quant aux chefs, ils trahirent bien
leur engagement envers toi.
Ils invertirent l'affection
et le soutien à tes parents
Et les hypocrites sortirent
leurs têtes de leurs trous trompeurs
Et leur c½urs se sont endurcis
à l'encontre de ceux-là dont
La terre déplora la mort
tout comme les pleura le ciel.
Et toi aussi, pleure-les donc
autant que tu peux les pleurer
Car c'est bien peu que de pleurer
quand le malheur est aussi grand.
Chaque journée et chaque terre,
de par mon affliction pour eux,
Est Karbalâ et 'Ashourâ',
[de par mon affliction pour eux].
(al-Hamziyya fî madhi khayri l-bariyya, "Poème rimant en hamza
à la gloire de la meilleure des créatures")
من شهيدين ليس يُنسيني الطفّ مصابيهما ولا كربلاء
ما رعى فيهما ذمامَك مرؤوسٌ وقد خان عهدك الرؤساء
أبدلوا الودّ والحفيظة في القربى وأبدت ضبابهَا النافقاء
وقست منهم قلوب على من بكت الأرض فقدَهم والسماء
فابكِهم ما استطعت إنّ قليلا في عظيم من المصاب البكاء
كلّ يوم وكلّ أرض لكربي منهم كربلا وعاشوراء
( الهمزية في مده خير البرية )
A suivre...