Assalamou ‘alaïkoum wa Rahmatou Allah iwa Barakatouhou ;
Allahouma Salli ‘ala Mouhamadin wa Ali Mouhamad.
Balagha al-‘ulâ bi kamalihi,
Kashafa al-dujà bi jamalihi
Hasunat jami’u khisalihi
Sallu alayhi wa aalihi
Comment peut-on parler encore de l’évènement de Ghadir ? ( on pourrait en effet penser en « « historien » » que c’est un évènement irrattrapable, que c’est passé , qu’on ne peut pas refaire l’histoire, et qu’en parler est une façon de se lamenter pour rien.). C’est voir les choses dans un temps linéaire qui n’est pas celui de Dieu. Laysa inda rabbikum sabah wa la masâ..
Or il n’en est rien, al-Ghadir, acte prophétique, nous engage tous comme nous engage toute la tradition prophétique. est encore vivant dans les esprits, un évènement qui sollicite les esprits des croyants, car il fut une tradition prophétique et quiconque entretient vivante une tradition, Dieu le fait vivre.
Pourquoi ce n’est pas une simple date comme une autre ?
(parce que c’est un évènement, un acte prophétique, c’est à dire quelque chose qui nous engage tous en tant que croyants. Car le Prophète n’agit pas en vain.
Ma atakum al-rasul fakhoudhouh, wa ma nahakum anhu fantahu !
C’est un évènement rapporté par les sources sunnites et chiites.
Rappeler al-ghadir, ce n’est pas régler un problème avec des hommes du passé, c’est renouveler le pacte avec l’Envoyé de Dieu, affirmer sa loyauté envers lui, c’est donc tenter d’accéder au mystère de la religion islamique, aller plus avant dans sa compréhension. Car un grand secret y a été révélé, qui résume tout l’enseignement de la révélation.
Cette méditation nous est d’autant plus profitable aujourd’hui, que dans l’épaisseur des siècles qui nous sépare de la période prophétique, nous avons perdu tout lien avec les différents acteurs ayant contribué à la première « grandeur » islamique. L’état de la oumma est tel qu’une médiation sur Ghadir Khum ne pourrait être que bénéfique.
Commenter :
Voyons le verset fondateur : ya ayyhua al-rasul balligh mâ unzila ilayka min rabbika …wa –in lam taf’al, fama ballaghta rissalatahu..
CORAN, AL MAIDA 5, 65
67] O Messager, transmets ce qui t'a été descendu de la part de ton Seigneur. Si tu ne le faisais pas, alors tu n'aurais pas communiqué Son message. Et Allah te protègera des gens. Certes, Allah ne guide pas les gens mécréants.
[68] Dis: O gens du Livre, vous ne tenez sur rien, tant que vous ne vous conformez pas à la Thora et à l'Evangile et à ce qui vous a été descendu de la part de votre Seigneur." Et certes, ce qui t'a été descendu de la part de ton Seigneur va accroître beaucoup d'entre eux en rébellion et en mécréance. Ne te tourmente donc pas pour les gens mécréants
On voit que le Prophète est mis en demeure de transmettre quelque chose qui lui a été révélé., inspiré. Ce quelque chose est d’une importance telle que toute son œuvre , tous ses efforts jusque là auraient été vains. Imaginez les argonautes , après avoir subi avec succès toutes les épreuves, échouer dans leur mission à la dernière épreuve, et rentrer bredouille, sans la toison d’or. La mythologie n’en n’aurait même pas fait mention. C’est par la dernière action que les grands hommes passent à la postérité, et deviennent grands. C’est parce qu’ils ont rapporté la toison d’or que les argonautes sont devenus un récit mythique.
Tout à coup la mission prophétique prend un sens inattendu. Le prophète (SAW) est venu annoncer que son frère ‘Ali est son lieutenant, son alter-ego, man kuntu mawlâh fahadha Aliyyun mawlah. Allahumma wâli ma wâlah, wa ‘adi man aadah.
C’est une question clé au centre du débat sunnisme-chiisme, mais je le dis tout de suite, nous n’allons pas nous intéresser a cet aspect de la question qui ne résoudra rien en vérité. Une nouvelle approche s’impose aujourd’hui. C’est une approche doctrinale et pas une approche politicienne ou politique. Au-delà du débat entre ‘’nous’’ et ‘’vous’’, il y a un débat pour le destin du monde, un débat pour la réflexion sur le sens même de la religion, de l’islam. C’est un évènement qui concerne le monde, comme tous les actes du Prophète.
Commentaire : Si l’islam se ramenait à ce qu’une certaine histoire de l’islam (historique), je veux dire, à l’histoire « officielle » de l’islam, je crois que les musulmans encore éveillés n’auraient rien d’autre à faire qu’à se rendre à la raison et constater que leur religion n’a rien de spécial, de particulier à leur offrir, sinon les encourager à rêver d’un passé dont ils sont assurés qu’il fut glorieux, et sur lequel il n’y aurait rien à dire. Malheureusement, c’est cette dernière tendance qui domine en ce moment où l’intégrisme ne voit pas d’autre « solution » pour « libérer » l’islam que l’activisme violent fut-il dépourvu de toute vision juste, que dis-je de tout programme clair et connu.
C’est le plus souvent une action désespérée.
Comment ramener les morts à la vie, comment restaurer le khalifat ?
Ne pensez pas que cela est propre aux « sunnites » à ceux qui se considèrent comme tels. Même les soi-disant « chiites » se sont comportés de manière semblable, lorsque les safavides ont au début 16ième siècle imposé « le chiisme » comme religion officielle en Iran. Ils ont cru ou surtout prétendu agir en partisans des imams (AS) en massacrant de nombreux villageois innocents qui étaient sunnites parce qu’ils se trouvaient être nés sunnites. De même, les wahabites ont autorisé le massacre de tous ceux qui n’étaient pas d’accord avec eux.
En réalité, ce type d’action ne relève ni du sunnisme ni du chiisme, mais est le propre des kharédjites qui pratiquaient la doctrine du takfir al-khasm.
Pensez qu’il existait beaucoup de poches de chiisme, même de chiisme duodécimain au Maroc, et que tout cela a été évacué par les nombreuses pressions sociales suscitées parfois par l’avènement des pouvoirs prétendument religieux.
Pensez que l’imam Ali, as, a toujours eu le souci de sauver des vies humaines, de les sauver dans ce monde, et de les sauver du châtiment de l’autre monde. Pensez que l’imam, blessé à mort, a recommandé à ses enfants al-Hassan et al-Hosseyn (AS), de traiter avec justice celui-là même qui l’avait poignardé, de lui donner à boire et à manger.
Je voudrais faire une digression pour rappeler qu’il existe deux sortes de réponses que les hommes apportent au vide cosmique lorsqu’ils le constatent. Soit ils le remplissent avec des choses, soit ils le remplissent avec des idées. Soit ils portent leur regard sur le monde, soit ils lèvent les yeux vers le ciel. En Arabie d’avant l’islam, deux familles typifiaient l’une et l’autre de ces attitudes. Les banou Oummayya cherchaient le monde, l’or, les palais, et les banu hachim avaient le souci d’Allah et de l’Autre Monde ! Cela peut s’illustrer par l’anecdote bien connue de Abdal-Muttalib qui dit à Abraha venu détruire la Kaaba (Karramaha allah) : lil bayti rabbun yahmih…
Il faut sortir de la division sunnisme-chiisme qui est un accident historique qui n’a plus de pertinence aujourd’hui comme on le voit d’ailleurs en politique (sunnites et chiites agissent dans les mêmes buts, ou en philosophie musulmane (pour la philosophie musulmane, la vérité n’est pas sunnite ou chiite). La théologie sunnite d’aujourd’hui n’est plus celle qui prévalait à l’époque de l’ach’arisme. Les choses ont évolué dans beaucoup de domaines.
La mondialisation impose aux musulmans de dépasser ce clivage, de cesser de le charrier comme une cause de leur division. Il faut abstraire le fait historique des conséquences et des manipulations que les générations de musulmans lui ont imposées.
Et se demander ce que peut signifier l’évènement de Ghadir dans la fonction prophétique, en sachant, comme je l’ai dit, que cet évènement est recensé aussi bien par les sources sunnites que chiites et que par conséquent, il les engage tous.
Les califes se son succédés, d’autres moins qualifiés leur on succédé. D’autres sont venus après, jusqu'à arriver à notre situation actuelle en passant par la phase de colonisabilité qu’ont traversée tous les pays musulmans.
Le destin de la oumma est tel aujourd’hui que son passé lui est devenu opaque, illisible. Nous voyons s’écrouler les unes après les autres les pensées fondées sur le salaf qui se fondent sur l’idée d’un ‘’retour’’ a une époque mythique. Car comme dit l’adage « tout temps passé fut meilleur ».
Incapables de remuer les fonds boueux de leur passé, les musulmans tentent de surmonter ce handicap, en le contournant, en ramenant le problème à une seule dimension. Les uns privilégient le fiqh, en fait, leur fiqh, d’autres la morale, l’éducation, etc.. et d’autres carrément la lutte pour le pouvoir politique. Mais on n’arrivera a rien si l’on ne s’est pas acquitté du devoir impérieux du « changement de/en soi », taghyir al-anfus qui est prescrit comme une sunnat Allah dans le Coran.
Les musulmans, en tant que oumma ont des problèmes qui sont ceux de toute société, et toute civilisation. Ils ont connu une grandeur, ils sont, hélas aujourd’hui, les derniers du peloton.
Les problèmes des musulmans sont nés de l’imperfection des musulmans en tant qu’hommes.
….
Les faits et gestes de l’Envoyé de Dieu (SAW), ses enseignements sont sources de méditation pour tous les temps, pour tous les peuples, pour toutes les conditions historiques.
Ces choses doivent être dissociées de l’histoire de la Oumma, afin que nous ne retombions pas dans le piège du débat stérile sunnisme-chiisme qui a plus alimenté les haines, que servi au rapprochement des musulmans.
Notre passé est suffisamment brouillé comme cela pour que nous ajoutions de la confusion à la confusion.
En même temps que le choix des premiers musulmans a conduit à la situation que nous connaissons, la vérité de l’enseignement prophétique à Ghadir Khom a continué à se manifester tout au long des siècles écoulés, au fur et à mesure que les hommes mesuraient la gravité des conséquences de certains choix..
La religion, l’essence de la religion, ne dépend pas de la politique des hommes. Tel est l’enseignement premier de notre histoire.
C’est la religion qui a créé la vague qui a permis à certaines personnalités de devenir des personnalités historiques. Ils ont été portés par la vague au sommet. Mais quand avec le temps, les hommes se sont éloignés de la religion, de l’essence de la religion, et qu’ils ont pensé qu’ils pouvaient même se passer d’elle, voire la combattre, ils ont été réduits à la déchéance. Ils ont été rejetés sur les rivages de l’histoire, comme tous les ingrats. Ils avaient scié la branche sur laquelle ils étaient assis. Ils ont cru pouvoir inverser impunément les rôles.
La grandeur de l’imam ‘Ali (AS) ne dépend pas de sa reconnaissance par des pouvoirs aveuglés par le seul pouvoir.
Il fut dit de ‘Ali (AS) qu’il a embelli la fonction califale, et que ce n’était pas celle-ci qui l’avait embelli.
‘Ali peut nourrir le pouvoir, mais il n’a pas besoin du pouvoir. Il est l’héritier en vertu d’une décision divine. Il a une fonction cosmique.
Cette fonction est celle-là même que le Prophète a énoncée dans une autre tradition où il a déclaré à ‘Ali qu’il était vis-à-vis de lui dans le même rapport que Aaron l’était vis-à-vis de Moïse. « Ne voudrais-tu donc point être pour moi, ce qu’était Aaron pour Moïse, sauf qu’il ne saurait y avoir de prophète après moi ?»
Etre avec ‘Ali, ce n’est pas se ‘’convertir’’ ou devenir chiite, ou naître chiite, adopter certaines façons de faire. Beaucoup de chiites ne le sont que par naissance. Et beaucoup de sunnites sont plus près de comprendre le sens de ‘Ali que des chiites qui ne le sont que de naissance.
Etre chiite signifie, partisan de ‘Ali, c’est comprendre que l’islam est le sens du monde.
Inna al-dîn inda Allah al-islâm.
Qu’il n’y a pas par conséquent pas de quoi s’inquiéter, car tout ce qui se passe dans le monde est une épreuve qu’il faut décoder, pour y voir que tout retourne à Dieu. En la décodant, le croyant cherchera à deviner ce qu’Allah attend de lui, à jouer son rôle sur terre. Tout se passe en nous. Dieu nous le promet qui dit qu’il ne changera rien à la situation d’une Communauté, tant que ses membres n’auront point changé ce qui est en eux-mêmes.
Nous vivons dans le monde que nous forgeons avec nos actes.
A propos de ce savoir l’imam a dit salûni qabla an tafqidûnî. (Questionnez-moi, avant que vous ne me perdiez)
Il a dit aussi ; je connais mieux les chemins du ciel que ceux de ce monde.
Percevoir la présence de Dieu en toute chose, voilà la liberté. L’imam Ali a dit : law rufi’a al-hijaab maa zdadtu yaqînan. (Si le voile était levé, cela n’aurait en rien rajouté à ma conviction)
Ne pas nuire aux créatures de Dieu, voilà la tranquillité.
Ce sens du monde est source de joie, car nous savons que nous n’allons pas nous reproduire indéfiniment, en vain, à attendre que la fin du monde se « lève ». ce sens du monde est symbolisé par la présence permanente dans le monde d’un imam. Cette présence pèse dans le destin du monde, en tant que témoin, exécutant, et gardien compétent de l’islam.
Ici, il est utile de réfléchir au sens de : ati’u Allah, wa ati’u al-rasula wa ULi al-amr minkum.
(Obéissez à Allah, obéissez au Messager et aux détenteurs du « pouvoir » parmi vous). La grande réflexion à avoir est de savoir qui sont les détenteurs légitimes et compétents de ces « pouvoirs » et quelles définitions donner de ces « pouvoirs ».
Savoir cela, ne veut pas dire que nous allons refaire l’histoire, maudire ou injurier je ne sais qui parmi les hommes du passé. Au contraire, en apprenant cela, le croyant devra se dire
Al-hamdou lillah alladhi ja’alanaa min al-mutamassikin bi wilâyat ‘Ali bnou abi Tâlib, alayhi al-salaam…
Remercier Dieu de lui avoir montré que l’histoire à une finalité, que notre présence au monde est prise en compte, que le regard bienveillant de Dieu est sur nous en permanence, que la religion du Prophète est vivante en toute circonstance, grâce au témoignage des saints, au premier rang desquels les imams de la Famille du Prophète, car il est dit que ma communauté ne sera jamais unanimement dans l’erreur.
Ne pas se laisser séduire par les ambitions politiques que Satan tente d’enjoliver à nos yeux en nous les présentant comme un service pour Dieu, alors qu’il ne s’agit que de secrètes ambitions de l’âme charnelle, du désir humain de puissance et de jouissance du Monde !…
J’ai demandé une fois à un homme politique qui prétendait n’être inspiré que par l’intérêt de l’islam. « Qui t’a demandé de le faire ? Es-tu sur d’avoir la compétence nécessaire pour connaître des intérêts des musulmans ? »
Le Prophète (SAW) n’a-t-il pas dit : lâ nuwalli haza al-amr man talabah, or toi tu demandes, tu aspires à devenir émir, ou calife ou je ne sais quoi d’autre.
N’est-ce pas pour cela, que l’imam légitime Ali, as, n’a pas cru utile de faire couler le sang des musulmans, en lançant une guerre contre Abou Bekr et Omar, qui l’avaient injustement spolié du Califat,lors du regrettable épisode de Sakfet Beni Sa’d ?
Mon ami politicien, m’a aussi dit qu’il ne craignait que Dieu. Je lui ai dit que c’était bien d’avoir du courage, mais que le courage n’est pas une vertu cardinale, sans la compréhension et l’intelligence des facteurs qui gouvernent tant ce Monde que l’Invisible !
Certes, un chef musulman doit être courageux. Mais le courage ne suffit pas, c’est l’intelligence qui détermine les choses. Yuzayinu lahumu al-shaytan a’mâlahum est plus pernicieux que yukhawiffuhumu al-shaytan. « Satan leur embellit leurs œuvres est plus pernicieux que le fait que Satan, les terrorise »
C’est le Prophète lui-même qui a nommé Ali, Amir al-mu’minin. Il l’est pour l’Eternité, c’est un titre accordé par Allah à un seul homme. Les autres hommes peuvent le porter, mais ce sera au mieux par métaphore, par mimétisme ou par tabarruk.
La fin de la prophétie, le fait que le cycle de la prophétie avait touché à sa fin avec la prophétie de Mouhammad, l’Envoyé de Dieu (SAW), ne signifiait pas une calamité. C’était une « bonne nouvelle », pour emprunter une expression chère à nos frères chrétiens. Elle annonçait, bien au contraire l’avènement d’un Monde où désormais les hommes jouiraient d’une liaison ininterrompue et donc permanente avec Dieu, en vertu de la révélation coranique et donc par l’intermédiaire d’hommes dont Dieu garantit l’impeccabilité.
Dieu ne peut pas ordonner aux hommes de suivre les « oulou al-amr », de leur obéir, s’Il n’avait pas en vue des Hommes dont Il répondait de la haute capacité, dont il les a dotés pour ce faire. C’est à leur propos qu’il a été dit que les « ulémas de la Oumma seront les équivalents des prophètes des banou Isrâ’îl. »
Rappelez vous que les enfants d’Israël ont été dirigés par plusieurs générations de prophètes, que cela n’est donc pas quelque chose de nouveau dans les sunan d’Allah.
Aujourd’hui, nous avons besoin de Ghadir pour renouveler notre pacte avec Dieu, pour rafraichir nos esprits!