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La pondération de la raison et l’équilibre des passions

Albatoul

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Au Nom d’Allah, le Clément, le Miséricordieux

Que la Paix soit sur Mohammad et sur les Gens Purifiés de sa Maison



Les deux facultés que sont la raison et la passion

Le Noble Coran nous parle de deux facultés que possède l’homme : Une faculté positive qui l’élève vers les lieux de la responsabilité qui le rapproche de Dieu, à Lui la Grandeur et la Gloire, et qui lui assure le bonheur dans ce monde-ci et dans l’Autre monde ; et une faculté négative qui peut le faire sombrer dans les niveaux les plus bas, qui l’éloigne de Dieu, qui l’entraîne vers sa perte et qui plonge dans le chaos sa vie privée et publique.

Il y a la raison et l’affectivité, la pensée et l’instinct, le principe et le désir… Lorsque nous nous proposons de construire notre personnalité consciente et clairvoyante qui suit le droit chemin et qui s’attache à la raison dans tout ce qu’elle pense et dans tout ce qu’elle pratique dans la vie, il nous est alors indispensable de prendre la partie de la raison. Il en est ainsi parce qu’elle est la faculté qui permet à l’homme de faire la distinction entre le beau et le laid, entre le vrai et le faux et entre le bien et le mal. C’est elle qui pousse l’homme à choisir le vrai même s’il est amer, le bien même s’il est difficile et la droiture même si elle lui complique la vie.

La raison comme argument probant

Dieu a fait de la raison une lumière qui éclaire la vie de l’homme. C’est pour cela qu’Il la considère comme un argument probant entre Lui et Ses serviteurs. C’est que la raison ne perçoit que ce qui est vrai, et l’homme ne s’ouvre à la connaissance de Dieu que grâce à sa raison. La Tradition nous dit à ce propos : « Après avoir créé la raison, Dieu lui a dit : ‘Avance !’, et elle a avancé. Puis il lui a dit : ‘Recule !’, et elle a reculé. Alors, Il lui a dit : ‘Par Ma Gloire et Ma Majesté, Je n’ai créé une créature qui me soit plus chère que toi. C’est toi que J’ordonne de faire ou de ne pas faire. C’est toi que je rétribue et c’est toi que je punis’ ». Il en est ainsi car c’est la raison qui donne sa valeur à toute action. Et c’est pour cela que la Tradition nous dit : « Une heure de réflexion vaut mieux qu’une année de pratiques cultuelles ». Et qu’elle nous dit aussi : « Une prière de deux génuflexions faite par un savant vaut mieux que mille génuflexions faites /sans réflexion/ par un dévot ».

L’homme doit donc éduquer sa raison et la faire développer par la réflexion, de sorte qu’il pense à tout ce qui se présente à lui, de sorte qu’il en assume la responsabilité.

L’affectivité négative

Aux antipodes de la raison, il y a l’affectivité. Il s’agit d’une disposition en relation avec le sentiment et la sensibilité, mais elle est sans normes régulatrices, car elle procède de l’état psychologique et sentimental qui est en interaction avec les instincts et les sensations. Elle prend son élan à travers certaines conditions et relations qui entourent l’homme. On a souvent parlé, à ce propos, de l’amour aveugle. C’est un amour avec lequel l’homme est dépourvu de sa clairvoyance, de manière à ne pas savoir pourquoi il a aimé un tel ou pourquoi il l’a haï. Et sans qu’il ait étudié les éléments essentiels de l’amour et de la haine. Dieu, le Très-Haut, a fixé les règles que l’homme doit respecter quant à la question de l’amour et de la haine. Il nous a ainsi parlé de « l’amour pour Dieu et la haine pour Dieu ». Une Tradition dit à ce propos : « Si tu veux t’assurer que tu as du bien, regarde alors dans ton cœur. Si tu trouves qu’il aime ceux qui obéissent à Dieu et qu’il déteste ceux qui Lui désobéissent, cela veut dire que tu as du bien et que Dieu t’aime. Mais si tu trouves qu’il déteste ceux qui obéissent à Dieu et qu’il aime ceux qui Lui désobéissent, cela veut dire que tu n ‘as pas du bien et que Dieu te déteste. Enfin, l’homme est du côté de ce qu’il aime ».

L’affectivité peut donc conduire l’homme à sa perte. Et c’est pour cette raison que nous disions toujours que nous devrions donner à la raison une dose d’affectivité afin de l’affiner et de l’adoucir, et à l’affectivité une dose de raison afin qu’elle s’équilibre. Ainsi, il est indispensable pour l’homme engagé dans la vie de suivre sa raison, de la mettre en action et de la consulter. Il lui est également indispensable de ne pas suivre son affectivité et les passions de son âme, car cela est très dangereux pour sa destinée dans l’Autre monde. Dieu, à Lui la Grandeur et la Gloire, l’a bien exprimé dans Son Noble Livre en disant : ((Quoi ! Celui qui détient une preuve certaine, émanant de son Seigneur, est-il l’égal de celui que ses œuvres perverses ont séduit par leur faux éclat et qui suit aveuglement ses penchants ?)) (Coran XLVII, 14).

Dieu, le Très-Haut, a dit aussi : ((Les injustes n’en suivent pas moins aveuglement leur passion. Mais qui donc guidera ceux que Dieu a voulu perdre ? Nul ne viendra les secourir)) (Coran XXX, 29). Et aussi : ((D’autres générations qui les suivirent délaissèrent le culte du Seigneur et suivirent leurs penchants. A ceux-là sera réservé un sombre destin)) (Coran XIX, 59).

L’errance de la passion

Dieu, le Très-Haut, nous parle de certaines personnes déviantes qui cherchent à influencer et, par la suite, à faire dévier du bon chemin, ceux qui leur tiennent compagnie. Il dit à ce propos : ((Dieu veut revenir vers vous, alors que ceux qui suivent leurs passions veulent vous entraîner sur une pente dangereuse)) (Coran IV, 27). Dieu, le Très-Haut, nous parle aussi de ceux qui, dans la mesure où l’obéissance est une forme d’adoration, adorent leurs désirs en dehors de Dieu : ((N’as-tu pas vu celui qui prend sa passion pour une divinité ? Dieu l’égare sciemment ; Il met un seau sur ses oreilles et sur son cœur ; Il place un bandeau sur ses yeux. Qui donc, en dehors de Dieu, le dirigera ? Les hommes ne réfléchissent donc pas ?)) (Coran XLV, 23).

Le Messager de Dieu (P) a dit : ((Il n’y a pas sous le ciel une divinité qu’on lui voue un culte qui soit plus grande que la passion ».

Dans un enseignement à l’intention de tous ceux qui sont chargés de responsabilités publiques comme dans la justice, Dieu, le Très-Haut, s’est adressé à Son prophète Dawûd (David) en disant : ((Ô David ! Nous avons fait de toi un lieutenant sur terre. Juge les hommes selon la justice ; ne suis pas ta passion, elle t’égarerait loin du chemin de Dieu. Ceux qui s’égarent loin du chemin de Dieu subiront un terrible châtiment pour avoir oublier le Jour du jugement)) (Coran XXXVIII, 26).

Dieu, le Très-Haut, dit aussi : ((Raconte-leur l’histoire de celui auquel nous avions accordé nos signes. Il s’en débarrassa ; le démon le poursuivit et il fut au nombre de ceux qui s’égarent. Si nous l’avions voulu, nous l’aurions élevé, grâce à ces signes, mais il s’est attaché à la terre. Il a suivi ses passions. Il était semblable au chien : Il gronde quand tu l’attaques, il gronde quand tu le laisses tranquille : Tel est le peuple qui traite nos signes de mensonges. Raconte-leur le récit : Peut-être réfléchiront-ils ? )) (Coran VII, 175-176). Nous rencontrons très souvent ce type d’hommes qui possèdent de la connaissance mais qui n’agissent pas en conséquence pour retrouver la bonne direction. Dieu, le Très-Haut, dit aussi : ((Quant à celui qui fait preuve d’outrance et qui préfère la vie d’ici-bas, la Géhenne est son asile. En revanche, celui qui craint la présence de son Seigneur et qui interdit l’âme aux passions, le Paradis est son asile)) (Coran LXXIX, 37-39).

Nous devons, en tant que croyants, œuvrer dans le sens du développement de nos raisons afin de les consulter et leur permettre de contrôler nos instincts, nos désirs et nos affections. ‘Alî (p) a dit : « La langue du sage se trouve derrière son cœur et le cœur de l’hypocrite se trouve derrière sa langue ». Que dans notre vie, toute notre action, aussi diversifiée qu’elle puisse être, soit dirigée par la raison. Eloignons notre vie de toute sujétion à la passion, car la passion entraînera à la fournaise de la Géhenne celui qui la suit.

Son Eminence l'Ayatollah al-'Uzmâ Muhammad Hussein Fadlallah
 

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