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L'étoile et Fatima

sam

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L'étoile

Par Jacques Bonnet

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Collaborateur des Études Traditionnelles dans les années 1970, Jacques Bonnet — à qui cinq années de captivité en Allemagne durant la dernière guerre ont permis de s'imprégner de saint Thomas d'Aquin et de Dante, mais aussi d'aborder dans le texte arabe même quelques-unes des œuvres de soufis musulmans et en sanscrit les principales Upanishads — a publié de nombreux travaux consacrés notamment aux symboles traditionnels, dans la ligne de René Guénon. Parmi ses ouvrages signalons Au lever de l'étoile - Tradtion et symboles (1990), Les anges dans le judaïsme et le christianisme (1993), Le festin d'immortalité - Le banquet céleste (éd. Dervy, 1997) et plusieurs études remarquables consacrées à l'évangile de Saint Jean. Ce texte consacré à « l'étoile » est extrait d'un recueil aujourd'hui introuvable, publié en 1971 aux éditions Horvath, Les symboles traditionnels de la sagesse. Nous le reproduisons avec l'aimable autorisation de l'auteur. Jacques Bonnet voudra bien trouver ici, avec nos remerciements, l'expression de notre gratitude.


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St Jean, dans sa première épître dit que « Dieu est Amour » [1], après avoir dit qu'il est Lumière [2] et « dans la Lumière » [3].

Dans l'Apocalypse, Jésus est dit « l'étoile brillante du matin » [4]. Mais Jésus dit aussi : « Celui qui vaincra, je lui donnerai l'étoile du matin » [5]. C'est donc que cette étoile symbolise à la fois Jésus et l'Esprit-Saint. Il ne dit pas : « Je lui donnerai le soleil ou la lune », mais cette étoile, la planète Vénus qui apparaît la première (on la représente avec 8 branches, symboles des 8 béatitudes ou du 8e jour de la Résurrection). Cela correspond exactement à la parole de la 2ème épître de St Pierre [6] : « Jusqu'à ce que l'étoile du matin (phôsphoros) se lève dans vos cœurs ». Celui qui habite dans le cœur est bien l'Esprit-Saint.

Cela rejoint la réflexion de St Thomas d'Aquin à propos de l'étoile des Mages : « Certains voient dans l'étoile l'Esprit-Saint » [7], et celle d'Eusèbe : « L'étoile parlait aux mages comme l'Écriture nous parle ».

Il y a de multiples étoiles, comme il y a de multiples esprits. Dans la conception des Anciens qui s'est conservée en scolastique, les étoiles ou corps célestes sont aux corps d'en-bas ce que l'esprit est à l'âme et ce que les anges sont aux hommes qu'ils éclairent. Par une assimilation en diagonale, l'étoile de l'homme est sa personnalité, l'ange qui le guide, comme on parlait de l'astre de César, ou comme Enée guidé par les oracles l'était aussi par l'étoile en qui il voyait Vénus sa mère : « Matre dea monstrante viam, data tata secutus»[8]. Un peuple peut avoir une étoile. Vénus est l'astre de l'Islam. « Divinité prédominante dans l'Arabie préislamique, c'est aussi sous son signe qu'est née la loi de l'Islam » [9]. Sous le nom de Zahara, la « resplendissante », elle « guide vers la connaissance des choses cachées » [10]. En hébreu, zohorath, la « brillante » est aussi Vénus. C'est, d'après Eleazar de Worms, un des noms de l'archange Metatron, parèdre de la Shekina, c'est-à-dire de l'Esprit-Saint.

Le nom même de Vénus donné à l'étoile la plus resplendissante (comme celui d'Isis correspondait à l'étoile Sirius chez les Egyptiens) permet de rattacher l'influence de l'étoile à ce qui sera dit de la Dame.


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En Islam, le nom de Zaharâ donné à cette étoile est aussi celui de Fatima, fille du Prophète et symbole de la Sagesse [11]. Dans l'Arabie préislamique, la planète Vénus apparaît sous trois aspects symbolisés par trois déesses ayant le même époux et auxquelles le Coran fait allusion dans la sourate « L'Etoile » commençant par le verset: « J'en jure par l'étoile quand elle se couche ». Elles s'incarnaient dans trois acacias sacrés, près de La Mecque « à l'ombre desquels voyageurs et pèlerins cherchaient la fraîcheur » [12] et dans la pierre noire de la Kaaba qui est appelée bunayya, « jeune fille », et fut apportée à Abraham par l'ange Gabriel représenté sous les traits d'une femme [13].

Ces déesses n'étaient autres qu'Astarté, l'Ishtar des chaldéens dont l'étoile a précédé celle des Juifs, des Chrétiens et de l'Islam. Ishtar était à la fois déesse de l'amour et de la guerre, de même que Vénus était l'épouse de Mars. Les orientalistes modernes rapportent le premier aspect à l'étoile du soir et le deuxième à l'étoile du matin. De toutes façons l'étoile d'Ishtar était la planète Vénus.

Dans le christianisme, la vierge Marie, siège de la Sagesse, est appelée « stella maris », « stella matutina », comme aussi « arche d'alliance » et « maison d'or », tous nom de la Shekina. Elle est aussi nommée « tour de David », sous son aspect guerrier : « Quelle est celle qui apparaît comme l'aurore, belle comme la lune, pure comme le soleil, mais terrible comme des armées » [14].

Résumant le Moyen-Age, Dante qui a fait d'une Dame, Béatrice, son guide vers les cieux, a marqué du nom d' « étoile » les trois étapes de son ascension spirituelle :

E quindi uscimmo a riveder le stelle, à la fin de l'Enfer ; Puro e disposto a salire a le stelle, au terme du Purgatoire ; L'amor che move il sole e l'altre stelle, au dernier vers de son Paradis.


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De l'étoile polaire à “l'étoile du matin”

Lorsque le soleil se couche et que l'étoile du soir paraît à l'horizon, l'Eglise fait chanter le psaume 4 qui se termine par ln pace in idipsum dormiam et resquiescam, « en paix je m'endors et je trouve le repos ». Le verset 7 de ce psaume dit : « Qui nous fera voir le bonheur ? Fais lever sur nous la lumière de ta face, Dieu, tu as mis dans mon cœur plus de joie qu'au jour où leur froment, où leur vin déborde ». L'image est celle de l'étoile qui se lève, comme Dieu s'élève dans les cieux [15] et qui fait rayonner le visage de Dieu apportant la paix et le salut [16]. Cette image correspond exactement à la parole de St Pierre citée plus haut : « Jusqu'à ce que le jour paraisse et que l'étoile du matin se lève dans vos cœurs ». Tous les mots de ce verset évoquent l'Esprit Saint: « bonté» (ou bonheur), (toubh), « lumière » (aur), « visage » (pâne), « donner » (nâtan), « joie » (simhâ), « cœur » (lebh), « paix » (shâlôm).


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A l'ombre de tes ailes, ô jehovah

On peut s'attacher au nom correspondant de Dieu qui est Orfaniel (Lumière du visage de Dieu). Jacob avait nommé Phanuel (visage de Dieu), le lieu où il avait lutté avec l'ange [17] qui n'avait pas voulu dire son nom : « car, dit-il, j'ai vu Dieu face à face et ma vie a été sauve ; et le soleil se leva quand il eut passé Phanuel ». Dans l'angélologie hébraïque, l'ange qui porte ce nom divin d'Orfaniel a pour desservants des anges qui portent le nom de l'Esprit-Saint : Nathanael, « Dieu donné »[18], Zabdiel, « don de Dieu» [19], Ethnani, « mon don».

C'est, semble-t-il, l'alliance de l'étoile du matin, ou du soir, avec le jour qui justifie son rapprochement avec l'Esprit-Saint. Car les étoiles ont été faites, dit la Bible, pour éclairer la nuit. Elles sont une multitude, comme les anges qui éclairent les esprits des hommes. Parmi elles, l'étoile du soir symbolise la connaissance naturelle de l'ange et celle du matin celle qu'il a dans le Verbe divin. L'Ecriture les appelle des « armées» (tsâbâ), car elles combattent les passions humaines et elles se combattent aussi entre elles (comme Jacob combattait avec l'ange), Dieu restant leur chef [20]. C'est pourquoi dans le Sanctus de la messe il est nommé « Deus Sabaoth ». Elles sont réparties à droite et à gauche du trône de Dieu [21]. Elles chantent la gloire de Dieu [22] comme les moines le font pendant la nuit. Mais ce chant se fait plus clair et triomphant quand arrive l'aube : « Quand les astres du matin chantaient en chœur et que les fils de Dieu poussaient des cris d'allégresse » [23].

Ce que les Sémites nomades vivaient charnellement pour ainsi dire, durant les nuits étoilées favorables à la contemplation, les juifs pieux devenus sédentaires, les moines chrétiens l'ont ressenti à leur façon pendant leurs nuits de prières où ils luttaient contre leurs attaches terrestres et aspiraient à la venue du jour, « plus que les veilleurs n'attendent l'aurore », dit le psaume.

Ce jour apparaissait avec l'étoile du matin noyée dans la clarté solaire comme en celle de la divinité, condensant en elle-même la lumière des autres étoiles comme l'Esprit-Saint rassemble les lumières angéliques et prophétiques auxquelles St Pierre fait allusion en disant : « L'Ecriture prophétique à laquelle vous faites bien de prêter attention, comme à une lampe qui brille dans un lieu obscur, jusqu'à ce que le jour vienne à poindre et que l'étoile du matin se lève dans vos cœurs ».

Le terme employé par St Pierre est phôsphoros que traduit exactement le latin lucifer, c'est-à-dire « porteur de lumière », ce qualificatif étant repris dans la liturgie de Pâques : « Que ce cierge pascal accepté en odeur de suavité se mêle aux luminaires d'en haut (les étoiles). Que sa flamme soit trouvée par l'étoile du matin (lucifer matutinus), ce lucifer qui ne connaît pas le déclin ». Ce dernier mot par allusion à l'étoile du prince des anges déchus, suivant la parole d'Isaïe [24] : « Comment es-tu tombé du ciel, astre brillant, fils de l'aurore ; toi qui disais en ton cœur : je monterai dans les cieux, au-dessus des étoiles de Dieu j'élèverai mon trône ; je m'assiérai sur la montagne de l'Assemblée, dans les profondeurs du Septentrion, je monterai sur les sommets des nues, je serai semblable au Très-Haut ».

Dans ce texte, l'allusion au Septentrion évoque l'étoile polaire (obscure) qui règle le mouvement des cieux tandis que le « fils de l'aurore » est l'étoile du matin (lumineuse) qui accompagne le soleil, la manifestation de la divinité.

 

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