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'Ashourâ', le jour où le sang des martyrs a vaincu le sabre des injustes

Attaque de la Kabaa

As-salam' aleykom,

Un frère sur un autre forum m'a rapporté ceci :

"en 930 la kaaba de la Mecque a été volé par les qarmatis, dit les chiites ismaélite"

Pourriez-vous m'en dire plus inchAllah ?

Salam wa rahmatulah.
 
La ilaha ila Lah Mohammad Rassoul Allah Ali waliyoLah

Yateem a dit:
As-salam' aleykom,

Un frère sur un autre forum m'a rapporté ceci :

"en 930 la kaaba de la Mecque a été volé par les qarmatis, dit les chiites ismaélite"

Pourriez-vous m'en dire plus inchAllah ?

Salam wa rahmatulah.

Elle fut d'abord attaqué par l'armée de yazid le maudit et reconstruite par la suite.
 
muslim_li_Lah a dit:
Elle fut d'abord attaqué par l'armée de yazid le maudit et reconstruite par la suite.

As-salam' aleykom wa rahmatulah,

Tout à fait mais la soi disant attaque des Chiites Ismaelites ? Qu'en est il vraiment ?

Barakallahou fik.
 
La ilaha ila Lah Mohammad Rassoul Allah Ali waliyoLah

Yateem a dit:
As-salam' aleykom wa rahmatulah,

Tout à fait mais la soi disant attaque des Chiites Ismaelites ? Qu'en est il vraiment ?

Barakallahou fik.

crois tu vraiment que des chiites attaqueraient la Kaaba, la maison sacré?????
 
As-salam,

muslim_li_Lah a dit:
crois tu vraiment que des chiites attaqueraient la Kaaba, la maison sacré?????

Croyez vous vraiment que je puisse le penser ? lol

Bon, je vous explique, je suis sur un autre forum qui profère des accusations sur les Chiites, donc j'essaie de répondre à cette rumeur dont je n'avais jamais entendu parler.

Bref, d'où provient cette rumeur ? Voilà, la question est peut être mieux posée...:happy:

Salam wa rahmatulah.
 
Salam Yateem,

J'ai effectué une petite recherche sur le net et j'ai trouvé ce site qui parle de cet épisode... http://www.ismaili.net/Source/fd0328e.html

Sinon, il y a d'autres sites qui ont relayé cet épisode pour servir leur propagande anti-Islam.

C'est vraiment désolant tout cela.

Wa Salam.
 
Mou'adib a dit:
Salam Yateem,

J'ai effectué une petite recherche sur le net et j'ai trouvé ce site qui parle de cet épisode... http://www.ismaili.net/Source/fd0328e.html

Sinon, il y a d'autres sites qui ont relayé cet épisode pour servir leur propagande anti-Islam.

C'est vraiment désolant tout cela.

Wa Salam.

Wa Salam Akhi Mou'adib ! Comment vous portez vous ?

Merci pour votre lien akhi, seulement je ne suis pas Anglophone mais je vais essayer de traduire cela. Cependant, si vous maitrisez l'Anglais pourriez vous faire un résumé inchAllah ?

Barakallahou fik, que Dieu:swt: vous illumine inchAllah.

Salam wa rahmatulah.
 
La ilaha ila Lah Mohammad Rassoul Allah Ali waliyoLah

Au Nom d’Allah, le Clément, le Miséricordieux.
Que la prière et le salut d’Allah soient sur le Sceau des Prophètes,
le Messager d’Allah, Mohammed (S), et sur sa sainte Famille Purifiée (AS).​

Assalamo alikoum,

Yateem a dit:
As-salam,

Croyez vous vraiment que je puisse le penser ? lol

Biensur que non, je sais que tu fais parti de ceux qui aiment le Noble Prophète swa et sa sainte famille a.s.

Bon, je vous explique, je suis sur un autre forum qui profère des accusations sur les Chiites, donc j'essaie de répondre à cette rumeur dont je n'avais jamais entendu parler.

Et tu vas en entendre de plus belles et aussi des vertes et des pas mûrs, mon frère; avec ces gens là toutes les discutions prennent fin, sauf une seule : " les chiites"

Bref, d'où provient cette rumeur ? Voilà, la question est peut être mieux posée...:happy:
Salam wa rahmatulah.

Il y a parmis nos frères "sunnites" des extrémistes qui nous pif pas, alors les rumeurs vont bon train, mais si tu leur parles de yazid qui lui et son armée ont détruit la kaaba et violé des femmes, alors le débats est clos.
tu comprendère mon fréro.

Par exemple si tu leur demande de te répondre sur certains sujets ils ne répondent pas il dévient et changent de sujets de façon à ce que ce soit toi le fautif, le vilain qui tente de salir l'honneur des pieux sahabas, qui eux ont les mains souiller de sang d'innocents par milliers en plus.

Assalamo alikoum et que la miséricorde d'Allah vous accompagne en tout temps et tout lieu.
 
Yateem a dit:
Wa Salam Akhi Mou'adib ! Comment vous portez vous ?
Salam mon très cher frère Yateem,
Très bien merci grâce à ALLAH awj.

Et toi mon très cher j'espère du fond du coeur que tu vas bien et en bonne santé, toi et toute ta famille incha'ALLAH.

Merci pour votre lien akhi, seulement je ne suis pas Anglophone mais je vais essayer de traduire cela. Cependant, si vous maitrisez l'Anglais pourriez vous faire un résumé inchAllah ?
Je ne maîtrise pas d'une manière parfaite l'anglais... Ce site, je l'ai trouvé en faisant une recherche sur internet... Et comme il y a une relation avec les Ismaelites, je me suis dis que le contenu devrait être pertinent.

Barakallahou fik, que Dieu:swt: vous illumine inchAllah.

Salam wa rahmatulah.
Qu'ALLAH :azwj: vous illumine également, qu'Il vous accorde Sa miséricorde et qu'IL te fasse habiter le paradis avec les rapprochés et les gens de bien.

Wa aalaykum essalam, mon très cher frère.
 
L'Imam Al-Hussayn et le Jour de 'Achourâ', par Abbas Ahmad al-Bostani

[PARCHEMIN]
L'Imam Al-Hussayn et le Jour de 'Achourâ'​


Compilé et traduit en français par
Abbas Ahmad al-Bostani​


Publication de la Cité du Savoir


Editeur
Abbas Ahmad al-Bostani
(La Cité du Savoir)
C.P. 712, Succ. (B)
Montréal, Qc., H3B 3K3
Canada​
[/PARCHEMIN]
 
[PARCHEMIN]
Table des matières​

  • <a href="#3">Introduction du Traducteur 2</a>
  • <a href="#4">Qui est l'Imam al-Hussayn? 7 </a>
  • <a href="#5">Les Racines du Mal 15 </a>
  • <a href="#6">L' Imam al-Hussayn et le Respect scrupuleux des Engagements et des Pactes 26 </a>
  • <a href="#7">Yazid s'empare du Califat 29 </a>
  • <a href="#8">Pourquoi Al-Hussayn s'est-il soulevé? 36 </a>
  • <a href="#9">A Médine 50 </a>
  • <a href="#10">Adieu, Messager de Dieu! Al-Hussayn quitte M&eacute;dine 55</a>
  • <a href="/forumv/showthread.php?t=4505&page=2#11">Dans L'Enceinte Sacrée et Sûre, (La Mecque) 59 </a>
  • <a href="/forumv/showthread.php?t=4505&page=2#11">Muslim Ibn 'Aqil à Kûfa 69 </a>
  • <a href="/forumv/showthread.php?t=4505&page=2#13">Relâchement et retournement de la situation 75 </a>
  • <a href="/forumv/showthread.php?t=4505&page=2#14">Vers Karbalâ' 83 </a>
  • <a href="/forumv/showthread.php?t=4505&page=2#15">La Terre du Rendez-vous 99 </a>
  • <a href="/forumv/showthread.php?t=4505&page=2#16">La Nuit de 'ÂCHOURÂ' 106 </a>
  • <a href="/forumv/showthread.php?t=4505&page=2#17">La Mémorable Bataille 109 </a>
  • <a href="/forumv/showthread.php?t=4505&page=2#18">Les Veuves... les Orphelins et la Mutilation des Cadavres 120 </a>
  • <a href="/forumv/showthread.php?t=4505&page=2#19">Les Captifs à Kûfa 123 </a>
  • <a href="/forumv/showthread.php?t=4505&page=2#20">I - Al-Hussayn, à travers de brefs témoignages du Prophète et de quelques grandes figures du monde musulman 135 </a>
  • <a href="/forumv/showthread.php?t=4505&page=3#21">II-L'Imam al-Hussayn par lui-même 136 </a>
  • <a href="/forumv/showthread.php?t=4505&page=3#22">Bibliographie Sommaire 137</a>
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[PARCHEMIN]
Introduction du Traducteur

Au Nom de Dieu, le Clément, le Miséricordieux.

[j]Qui dit 'Âchourâ', dit tragédie qui n'a cessé d'émouvoir et de plonger dans la douleur des millions de Musulmans depuis plus de treize siècles, et événement politique crucial qui a influé fortement sur le cheminement de l'expérience islamique.

Tragédie, 'Âchourâ' est en effet le jour anniversaire de l'assassinat tragique du petit-fils chéri du Prophète, l'Imam al-Hussayn, et de quelques dizaines de ses compagnons et proches parents, massacrés en même temps que lui, sous les yeux de leurs femmes et de leurs enfants, sur une terre étrangère, après avoir subi un calvaire douloureux et effectué une marche pénible d'environ deux mille kilomètres, qui les a conduits de Médine (en Arabie) à Karbalâ' (en Irak).

Evénement historique crucial, cette tragédie est l'aboutissement du soulèvement de l'Imam al-Hussayn, qui avait pour but de donner un coup d'arrêt à la légalisation et à la généralisation de la déviation du Message de l'Islam par les Omayyades, et notamment par Yazid qui avait placé son pouvoir personnel et ses vices au-dessus de tous les tabous islamique, et dont les soldats n'ont pas hésité, sur ses ordres, à sévir contre la ville du Prophète, Médine, en s'y livrant à un génocide barbare et à des viols collectifs(1), avant de marcher sur la Mecque, pour y détruire et incendier la Maison de Dieu, la Sainte Ka'ba. La place particulière qu'al-Hussayn occupait dans le coeur du Prophète et des Musulmans, le sacrifice inégalable qu'il a consenti pour défendre la cause sublime à laquelle il s'est identifié, les pratiques odieuses et la répression sanguinaire des autorités illégitimes qu'il a combattues, tous ces facteurs ont fait du soulèvement du petit-fils du Messager de Dieu, le symbole de la résistance à tous les pouvoirs tyranniques et déviationnistes, et l'inspirateur de maintes révoltes et révolutions que les masses musulmanes ont déclenchées depuis lors contre des gouvernants despotiques qui avaient tendance à faire passer le souci de la conservation du pouvoir ou "la raison d'Etat" avant la morale islamique et les préceptes de la Chari'a.

Il est naturel dès lors que tous les régimes héréditaires - des Omayyades aux Ottomans en passant par les Abbassides - qui se sont imposés à la Umma depuis l'assassinat ignoble d'al-Hussayn aient tout fait pour que le récit de ce crime odieux (qu'aucun Musulman - y compris ses instigateurs - ne pouvait ne pas désapprouver) et de ce "Soulèvement noble et rayonnant", (qui ne saurait ne pas exalter l'élan révolutionnaire de tout musulman attaché aux valeurs sublimes de l'Islam authentique et originel, et de tout Musulman hostile à la déviation, à l'injustice et à la tyrannie) ne fût pas porté à la connaissance des masses, et qu'il n'occupât pas la place primordiale qui lui revient légitimement dans l'histoire du Message. C'est ce qui expliquerait sans doute pourquoi la tragédie d'al-Hussayn, les causes et les effets de son Soulèvement, qui n'ont jamais cessé d'émouvoir des dizaines de millions de Musulmans dans les quatre coins du monde, sont relativement ignorés ou partiellement et improprement connus par d'autres musulmans dans beaucoup de régions de la planète, et ce, bien que des dizaines de grands historiens, biographes et écrivains, anciens et contemporains - allant de l'imam Ahmad Ibn Hanbal à Abbas Mahmoud al-Aqqâd, d'Ibn Taymiyyeh à Mohammad Mahdi Chams el-Dine, d'Ibn Kathir à Aboul A'lâ al-Mawdoudî - se soient penchés sur le double aspect de ce sujet, les uns pour mettre en évidence l'atrocité de la tragédie, les autres pour souligner les différentes péripéties de l'événement historique.

Consciente de l'importance du sujet de 'Âchourâ' dans l'histoire de l'Islam et dans le cheminement de l'expérience islamique, et par conséquent de son importance, pour tous ceux qui s'intéressent de près ou de loin à cette histoire, et constatant l'absence d'ouvrages en français le concernant, nous nous sommes proposé de préparer le présent livre à l'intention des lecteurs francophones.

Mais il convient de noter tout de suite que ce modeste livre ne prétend ni restituer l'ensemble des éléments dramatiques de la tragédie pour susciter chez le lecteur l'émotion profonde que celle-ci suscite généralement chez tous ceux qui la connaissent dans ses moindres détails, ni rapporter toutes les péripéties du Soulèvement pour expliquer et justifier son importance dans l'histoire de l'Islam et dans l'esprit et le coeur des Musulmans. Ses auteurs ont seulement voulu décrire les lignes générales de la tragédie et brosser les grands traits de l'événement historique. Soucieux avant tout d'apporter au lecteur le plus possible d'éléments sur le double aspect du sujet, ils ont fait abstraction aussi bien de "l'art" de présenter une tragédie que des détails "techniques" chers à l'historien. Désireux de donner au lecteur une idée générale du "contenu", ils ne se sont pas attardés sur les détails formels des événements rapportés. Tout en prenant un soin particulier à vérifier l'authenticité et l'exactitude des faits historiques qu'ils mentionnent, et dont font part les principaux historiens et transmetteurs de Hadith, qui font autorité chez les différentes écoles et tendances juridico-religieuses musulmanes, ils se sont contentés de renvoyer le lecteur, le plus souvent à deux ou trois d'entre eux - tels Ibn Tâwûs, al-Cheikh al-Mufîd... etc. Ce choix d'un nombre limité de références n'est pas dicté par une préférence ou un parti pris pour celles-ci, mais parce que ces références répétées se chargent elles-mêmes d'énumérer les différentes sources historiques des faits, des Hadiths et des événements soulignés, et de démontrer leur authenticité ou leur bien fondé, ce qui permet aux auteurs de ce livre d'éviter des détails superflus et sans grand intérêt pour un lecteur désirant se faire avant tout une idée d'un sujet dont il n'aurait pas une grande connaissance.

Quant à la traduction, elle a été soumise à ces mêmes préoccupations, c'est-à-dire celles de la primauté du "contenu" sur la "forme", de la clarté des textes sur leurs détails formels, chaque fois que cela était nécessaire. Aussi n'avons-nous pas hésité à supprimer des textes arabes des passages difficilement traduisibles en français ou incompréhensibles pour le lecteur français, lorsque nous estimions que de telles suppressions ne nuisaient pas au contenu et qu'elles facilitaient la lecture et la compréhension du récit.[/j]

Abbas Ahmad al-Bostani​

___________________________

1. Voir: Aboul-A'lâ al-Mawdoudî, "Al-Khilâfah wal Mulk" (Le Califat et le Royaume), Dâr al-Qalam, Kuwaït.[/PARCHEMIN]
 
[PARCHEMIN]
Qui est l'Imam al-Hussayn?

[j]«Je ne me rendrai jamais à vous comme un soumis, ni ne me résignerai jamais comme un esclave».

L'écho de ce cri de refus et de défi qu'a lancé l'Imam al-Hussayn, à la face de la puissance déviationniste omayyade avant de tomber en martyr, retentit encore dans la vallée de Tûfûf(2), comme il a toujours retenti dans les oreilles de toutes les générations qui se sont succédé depuis son assassinat. Il n'a cessé d'agiter toutes les phases de l'histoire, comme un tourbillon qui moissonne les tyrans, ou un volcan qui fait trembler les trônes des injustes, en réveillant toutes les consciences libres et en galvanisant l'esprit révolutionnaire et de jihad missionnaire chaque fois que la déviation et les forces du mal poussent à l'excès leur arrogance.

Depuis son martyre, des millions et des millions de Musulmans se sont rendus à sa tombe pour se rappeler que la sauvegarde du Message et de la Sunna (la Tradition du Prophète) exige parfois le sacrifice de soi, même si l'on a toutes les possibilités de l'éviter.

Aujourd'hui, cette tombe, transformée au fil des siècles en un site imposant de merveilles, dressant ses dômes et ses minarets dorés au centre de Karbalâ' (ville située à une centaine de kilomètres au sud-ouest de Bagdad) témoigne par sa splendeur de l'attachement profond et inébranlable des générations successives de Musulmans à cette personnalité islamique hors du commun, par le sens qu'il a su donner à son combat pour préserver l'Islam d'une déviation imminente.

Au fil des siècles des écoles littéraires spécifiques se sont créées pour dépeindre les tableaux épiques du martyre d'al-Hussayn, et des milliers de littérateurs et des poètes ont consacré leurs plumes et leurs talents à l'évocation et à la description de sa tragédie, de son héroïsme et des moindres détails de sa noble vie.

Aujourd'hui, on ne compte plus le nombre de révoltes, de soulèvements et de révolutions qui ont éclaté en ayant pour moteur et agent galvanisateur, la mémoire de la Révolution d'al-Hussayn, l'exemple de son sacrifice, de sa foi, et de ses principes.

Quel est donc ce personnage qui a tant marqué l'histoire et les coeurs des musulmans, en général, et des adeptes des "Ahl-ul-Bayt"(3) en particulier? Pourquoi, des Musulmans légitimistes qui se disent avant tout attachés au Coran et à la Sunna du Prophète prennent-ils pour symbole de cet attachement, la personnalité et l'action de cette figure de proue de la légitimité en Islam, al-Hussayn, petit-fils du Prophète?

1- Son appartenance familiale

Al-Hussayn est le fils de l'Imam 'Ali Ibn Abi Tâlib, cousin et gendre du Prophète, et de la Dame Fatima al-Zahrâ, fille chérie du Prophète Muhammad et de la Dame Khadîjah al-Kubrâ. Il est le troisième Imam des Musulmans légitimistes (les Chiites imamites), après son père, l'Imam 'Ali Ibn Abi Tâlib (le lère Imam, et 4ème successeur officiel du Prophète), et son frère l'Imam al-Hassan (2ème Imam).

Al-Hussayn est né à Médine, le 25 Cha'bân de l'an 4 de l'Hégire(4). La famille du Prophète l'a accueilli à sa naissance avec amour et tendresse, et c'est le Messager de Dieu, lui-même, qui lui donna le nom d'al-Hussayn(5).

Al-Hussayn fut élevé et grandi dans le giron du Prophète, de l'Imam 'Ali et de Fâtimah al-Zahrâ.

Il fut donc nourri de la morale prophétique et élevé selon les principes du Message islamique, les principes du Bon Droit, de la justice et de la dignité.

2- Sa position auprès du Prophète et sa place dans la Sunna

Fait significatif - lorsqu'on sait que la Sunna ou la Tradition consiste en les paroles, les gestes et le comportement du Prophète - le Messager de Dieu le couvrait publiquement de son amour et de sa tendresse, et le portait ainsi que son frère aîné, al-Hassan, contre sa poitrine en exprimant à haute voix, devant ses Compagnons, cet amour paternel généreux:

«Ô mon Dieu! Je les aime et j'aime ceux qui les aiment».(6)

La métaphore suivante en dit long sur l'amour que le Prophète éprouvait et exprimait pour ses deux petits-fils:

«Mes deux fils(7) que voici sont mes deux basilics de ce bas-monde ». (8)

Et les propos suivants ne laissent plus de doute sur la portée et la profondeur de cet amour:

«Al-Hussayn fait partie de moi, et je fais partie d'al-Hussayn. Dieu aimera celui qui aura aimé al-Hussayn».(9)

«Celui qui aime al-Hassan et al-Hussayn m'aura aimé, et celui qui les déteste, m'aura détesté».(10)

Propos réitérés et confirmés à maintes autres occasions. Par exemple, lorsqu'un jour, le Prophète qui accomplissait sa prière, que al-Hassan et al-Hussayn se bousculaient sur son dos, en ces moments de recueillement, et que des gens vinrent les éloigner, dit:

«Laissez-les... Par mon père et ma mère, celui qui m'aime, doit les aimer aussi».(11)

Ou encore cette autre métaphore révélatrice et on ne peut plus claire, utilisée par le Prophète pour mettre en évidence la position prédestinée d'al-Hussayn auprès de Dieu:

«Celui qui se réjouirait de voir un homme destiné au Paradis,(12) qu'il regarde al-Hussayn».(13)

Ainsi, le Prophète a donc pris soin de faire connaître aux Musulmans le sort de martyr qui attendait al-Hussayn, dés son enfance et de désigner sa position privilégiée dans la Umma, pour que celle-ci ne pardonne jamais à quiconque aurait le malheur de devenir parmi les assassins de son bien-aimé.

Les assassins d'al-Hussayn ne pourraient jamais prétexter l'oubli ou l'ignorance de ces paroles du Prophète pour qu'on puisse leur pardonner un jour, car le Prophète s'était attaché à les mettre suffisamment en évidence pour que de grandes figures de l'Islam, tels que Abou Bakr al-Çiddiq et Ibn 'Omar, trouvent toujours l'occasion de les répéter à l'intention des Musulmans. En effet c'est Abou Bakr qui a dit un jour:

«J'ai entendu le Messager de Dieu dire: "Al-Hassan et al-Hussayn sont les deux Maîtres de la jeunesse du Paradis"».(14)

Quant à Ibn 'Omar, c'est bien après l'assassina d'al-Hussayn qu'il rappela à des Irakiens venus lui poser un question canonique sur les moustiques, ce que le Prophète avait dit à propos de la position privilégiée qu'occupaient auprès de lui ses deux petits-fils: «Les Irakiens, dit-il, amer, m'interrogent sur les moustiques, alors qu'ils ont tué le fils de la fille du Messager de Dieu, lequel Messager avait dit "ce sont (al-Hassan et al-Hussayn) mes deux basilics(15) dans ce bas monde"».(16)

Conscients de cette place de choix qu'al-Hussayn occupai dans le coeur et la pensée du Prophète et dans sa famille, les Musulmans ne pourront pas ne pas sentir qu'à travers son assassinat, c'était le sang du Prophète qui fut répandu si injustement et si tragiquement dans la terre de Karbalâ', comme nous le verrons plus loin. Ils ne cesseront jamais de penser à ce crime impardonnable perpétré contre la famille du Prophète ne pourra se réparer que par le rétablissement des principes l'Islam pour lesquels l'Imam al-Hussayn s'était soulevé, et p une révolte permanente contre ceux qui persistaient à dévier ces principes. De là les révolutions successives, dont ce d'al-Tawwâbine(17), contre le régime ommayyade, auteur ce crime. Le sang d'al-Hussayn sera ainsi le volcan qui ébranlera les piliers de l'Etat Omayyade et détruira son entité.

Malgré toutes les tentatives perfides des Omayyades de justifier l'assassinat d'al-Hussayn et de déformer la noble cause pour laquelle il se battait, l'attachement des Musulmans au petit-fils du Prophète alla grandissant après son martyre. Car, comment auraient-ils pu se détacher de lui, s'ils voulaient rester attachés au Message de leur religion, alors qu'ils savaient que ce martyr faisait partie des Ahl-ul-Bayt (la famille du Prophète) que le Coran leur ordonne d'aimer:

«Dis: " Je ne vous demande aucun salaire pour cela, si ce n'est votre affection envers les proches".(18) A celui qui accomplit une telle action, nous répondrons par quelque chose de plus beau encore». (Coran, XLII, 23);

et dont il souligne la purification:

«Ô vous, les gens de la Maison! Dieu veut seulement éloigner de vous la souillure et vous purifier totalement». (Coran, XXXIII, 33);

et qu'il associe au Prophète:

«Si quelqu'un te contredit après ce que tu as vécu en fait de science, dit: "Venez! Appelons nos fils(19) et vos fils, nos femmes et vos femmes, nous ferons alors une exécration réciproque en appelant une malédiction de Dieu sur les menteurs"». (Coran, III, 61)[/j]

___________________________

2. Un surnom de la ville de Karbalâ', qui était à l'origine le lieu du martyre d'al-Hussayn, et actuellement la ville de son sépulcre et de ceux de ses compagnons. Elle est située à 170 Km au sud-ouest de Bagdad.

3. La famille du Prophète

4. Al-Cheikh al-Mufid, "Al-Irchâd", p. 198

5. Selon certaines sources historiques, Fâtimah al-Zahrâ mit al-Hussayn au monde après six mois de grossesse seulement. Voir à cet égard: Muhib al-Dîn al-Tabari (mort en 694 H.), "Thakhâ'ir al-'Oqbâ", p. 118.

6. M. D. al-Tabari, p. 124, et Ibn Kathîr: "Istich-hâd al-Hussayn" (le Martyre d'al-Hssayn), p. 138

7. Le Prophète avait coutume d'appeler, par affection, ses deux petits-fils: "mes fils".

8. Id. Ibid.

9. Al-Tarmathî, cité par Ibn Kathîr dans "Istich-hâd al-Hussayn", op. cit. p. 139

10. M. D. al-Tabari, op. cit. p. 124

11. Id. Ibid., op. cit., p. 229. Ce Hadith est cité par Abou Hâtam.

12. Le Prophète savait de par sa mission prophétique divine qu'al-Hussayn serait martyr. Or tout martyr en Islam est destiné au Paradis.

13. Id. Ibid., p. 229

14. Id. Ibid., p. 129

15. C'est-à-dire, le parfum, l'aromate, le plaisir...

16. Id. Ibid., p. 124

17. De l'arabe "tawbah" (repentir). La révolution d'al-Tawwâbîn déclenchée contre les Omayyades, à Kûfa. Il avait pour motif principal d'exprimer le regret et le repentir de ceux qui avaient fait défection lot soulèvement d'al-Hussayn. Ceux qui l'ont déclenchée (Sulayman al-Khaz'i et al-Mucib Ibn Najbah al-Fazari) voulaient venger le sang d'al-Hussayn et ses compagnons, répandu par les Omayyades.

18. Les proches du Prophète et plus précisément les Ahl- ul-Bayt, dont fait partie al-Hussayn.

19. Il s'agit de l'Imam al-Hassan et de son frère l'Imam al-Hussayn.
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Les Racines du Mal

[J]Après l'assassinat du troisième calife, 'Othman Ibn 'Affân, les Musulmans prêtèrent serment d'allégeance à l'Imam 'Ali et le désignèrent pour diriger les affaires de l'Etat. Toutefois, Mu'âwîyah Ibn Abi Sufiyân, gouverneur de Syrie refusa la désignation de l'Imam 'Ali et fit scission en se proclamant Calife de la Province de Syrie.

Lorsqu'on se penche sur cette période difficile de l'histoire de l'Islam, on remarque que l'Imam 'Ali avait à faire face à trois blocs politiques:

1- Le parti Omayyade, dirigé par Mu'âwîyah Ibn Abi Sufiyân.

2- Le bloc des Khârijites (scissionnistes) qui firent sécession dans l'armée de l'Imam 'Ali après s'être révoltés contre lui.

3- Le bloc de Â'ichah et de Talhah et al-Zubair Ibn al-'Awâm.

Après une période de guerres et de conflits entre l'Imam 'Ali et ces partis, ce dernier a pu venir à bout du mouvement de de Â'ichah et de Talhah et al-Zubair lors de la célèbre bataille d'Al-Jamal qui s'est déroulée à Basrah. Il a pu vaincre également l'armée du Mu'awiyah dans la bataille de Çiffine qui a débouché sur un arbitrage et des négociations que l'Imam 'Ali a fini par refuser, ayant constaté que Mu'âwîyah avait bel et bien recouru à une ruse de guerre et à une machination politique visant à diviser son armée. En effet, une partie de cette armée avait refusé l'arbitrage et s'était mutinée. La mutinerie a conduit l'Imam 'Ali à livrer bataille aux sécessionnistes (la Bataille d'al-Nahrawân) qui furent vaincus et dispersés.

Dans ce climat de confrontation, de guerres sanglantes et de conflits, un groupe de Khârijites ont élaboré un plan pour l'assassinat de Mu'âwîyah, de 'Amr Ibn al-'Âç et de 'Ali Ibn Abi Tâlib. Ils ont mis leur plan à exécution, pour ce qui concerne le dernier nommé. Ainsi, un jour, alors que l'Imam 'Ali faisait sa prière de l'Aube à la Mosquée de Kûfa, 'Abdul Rahmân Ibn Muljim le frappa d'un coup d'épée empoisonnée sur la tête. C'était le 19 Ramadân de l'an 40 Hégirien. Il mourra en martyr, après deux jours d'agonie, des suites de sa blessure, le 21 Ramadân. Avec cet assassinat la Umma perdit le plus cher de ses hommes, le modèle exemplaire de ses avant-gardes, le porte-drapeau des Musulmans.

Après le martyre de cet homme politique et d'Etat, de cet homme de doctrine et de principes, l'équilibre social et politique du mouvement de la Umma et de sa pensée fut rompu, le Message commença à être vidé de son contenu, et la Tradition du Prophète et de ses successeurs, bafouée. Le "Califat Bien Dirigé"(20) qui présidait jusqu'alors à la destinée de la Umma et qui s'efforçait de maintenir et de poursuivre la Tradition du Prophète, s'éclipse et s'effondra sous les martellement des coups que lui assénaient des hommes avides de pouvoir personnel, pour céder la place au parti omayyade qui ne s'embarrassait de rien pour s'imposer aux Musulmans.

Ainsi dès l'assassinat de l'Imam 'Ali, le gouverneur de Syrie, Mu'âwîyah, estima que le moment était venu pour étendre le champ de son Califat sécessionniste à tout le territoire de la Umma, en se proclamant cette fois-ci Calife de tous les Musulmans, et ce, bien qu'il sache, comme tous les Musulmans, que le Califat revenait à la personnalité prestigieuse que fut l'Imam al-Hassan, en raison de sa sainteté, de sa position politique et sociale élevée, de la grande estime en laquelle l'avait tenu le Prophète, du testament de son père l'Imam 'Ali, le désignant pour sa succession, et du serment d'allégeance que lui prêtèrent les Musulmans. Aussi, écrivit-il au Calife Bien-Dirigé légitime, l'Imam al-Hassan, pour le sommer d'abdiquer s'il ne voulait pas guerroyer.

Al-Hassan n'était pas homme à céder au chantage. Sachant qu'il avait la légalité et la légitimité pour lui, il ne pouvait guère donner l'impression d'abdiquer de son plein gré. Les Musulmans lui ayant prêté serment d'allégeance, son devoir était d'assumer le Califat et ses responsabilités. Aussi mobilisa-t-il ses armées et engagea-t-il un combat acharné contre les dissidents que commandait Mu'âwîyah.

Ce dernier, sachant qu'il ne pouvait pas compter seulement sur la force armée pour vaincre le Calife légitime, le petit-fils du Prophète, fidèle à lui-même et fort de l'expérience perfide qu'il avait acquise lorsqu'il se mutina contre la légitimité du quatrième successeur officiel du Prophète, l'Imam 'Ai, étala la carte maîtresse de sa stratégie: la ruse et la corruption. Il se mit à la recherche d'hommes et de commandants attachés aux artifices matériels de ce bas-monde, dans l'armée légitime de l'Imam al-Hassan. Il leur offrit pots-de-vin et commissions, et leur fit des promesses de promotion. Le virus de la corruption produisit ses effets vénéneux.

Constatant que la trahison, les défections, la désinformation et la falsification des données de la situation, pourraient entraîner les Musulmans dans une guerre fratricide interminable, et soucieux de préserver l'unité de la Umma face aux menaces grandissantes de l'ennemi extérieur (les Romains), l'Imam al-Hassan décida d'arrêter l'effusion de sang, en attendant des jours meilleurs et des circonstances plus favorables et plus sereines pour rétablir la vérité, la légitimité et la légalité islamiques.

Il accepta ainsi de conclure un traité de paix avec Mu'âwîyah, prévoyant le retour à la légalité après la mort de celui-ci, au respect des prescriptions du Coran et de la Tradition du Prophète et de ses successeurs, les quatre Califes Bien Dirigés.(21) Le traité comportait grosso modo les clauses et les articles suivants:

1- Al-Hassan fils de 'Ali, fils de Abou Tâlib, a accepté de se réconcilier avec Mu'âwîyah, fils de Abou Sufiyân, et de lui céder la Wilaya (la tutelle, la direction, le Califat) des Musulmans à condition que ce dernier les gouverne selon le Livre de Dieu, la Sunna du Prophète et la conduite des Califes "Bien-Dirigés et guidés dans le Droit Chemin", et qu'il ne désigne personne à sa succession.(22)

2- Le Califat après Mu'âwîyah(23), reviendra à al-Hassan ou à son frère al-Hussayn s'il venait à lui arriver quelque chose.(24)

3- Personne parmi les habitants de Médine, de Hejâz et d'Irak, n'a le droit de faire aucune réclamation concernant des faits accomplis(25) à l'époque du père d'al-Hassan (l'Imam 'Ali).(26)

4- Les employés de Mu'âwîyah doivent s'abstenir d'injurier de leurs tribunes, l'Imam 'Ali.

5- Tout le monde doit se sentir en sécurité où qu'il se trouve dans la terre de Dieu, Le Très-Haut.

6- Mu'âwîyah n'a pas le droit de disposer des biens se trouvant dans la trésorerie de Kûfa. Ces biens doivent rester à la disposition de l'Imam al-Hassan.

7- Mu'âwîyah ne doit pas faire montre de haine envers al-Hassan et son frère al-Hussayn, ni porter préjudice à leurs partisans, leurs adeptes, leurs biens, leurs enfants et leurs femmes.

Ainsi le Califat Bien-Dirigé a pris fin avec cette cession du Califat de l'Imam al-Hassan Ibn 'Ali en faveur de Mu'âwîyah. A la suite de cet acte de cession, al-Hassan retourna à Médine, après s'être chargé des fardeaux du Califat pendant les six mois qui avaient suivi le martyre de son père, l'Imam 'Ali.

Mais l'encre du Traité de réconciliation était à peine sèche, que Mu'âwîyah déclara qu'il ne respecterait guère ses engagements.

«... J'ai promis des choses à al-Hassan, dit-il à ses amis, et je lui en ai accordé d'autres. Mais je les foule toutes de mes pieds, et je ne respecterai rien des promesses que je lui ai faites...»(27)

Alors que al-Hassan et al-Hussayn s'aient retirés officiellement de la scène politique, Mu'âwîyah et ses acolytes accentuèrent leur hostilité (dont les racines remontaient aux premiers jours de l'Islam) à l'égard des partisans des Ahl ul-Bayt(28). La répression reprit de plus belle et le calvaire des Musulmans ne cessa de s'aggraver... jusqu'au décès de l'Imam al-Hassan des suites de son empoisonnement.(29)

A la mort d'al-Hassan, alors que Mu'âwîyah se hâtait de désigner(30) son fils Yazid pour sa succession, au mépris des clauses du Traité et des traditions des Califes Bien-Dirigés, les Musulmans, les légitimistes en tête, se tournèrent vers l'Imam al-Hussayn pour lui prêter serment d'allégeance et destituer le gouvernement de Mu'âwîyah.

En effet la décision de Mu'âwîyah de désigner son fils et de demander aux Musulmans de lui prêter serment d'allégeance, contrairement aux normes et aux règles islamiques en vigueur(31), suscita la colère de l'opinion publique et provoqua une levée de boucliers, surtout parmi les personnalités islamiques de notoriété publique, tels que l' Imam al-Hussayn, fils de l'Imam 'Ali, 'Abdul Rahmân, fils du Calife Abou Bakr, 'Abdul Rahmân al-Zubair, 'Abdullah Ibn 'Omar... ainsi que bien d'autres figures de premier plan.

Ci-après, nous reproduisons en les résumant quelques scènes et témoignages historiques sur le refus des notables de la Umma de se soumettre au désir de Mu'âwîyah de désigner à sa succession son fils Yazid:

«En l'an 50 (de l'Hégire), Qûhistân fut pris de force et Mu'âwîyah appela les Syriens à prêter serment d'allégeance à son fils Yazid comme héritier présomptif; ce qui fut fait. Et c'était la première fois qu'un calife désignait son fils pour sa succession... Ensuite il écrivait au gouverneur de Médine, Marwân, pour qu'il obtienne des Médinois la prestation de serment d'allégeance à Yazid. Marwân s'exécuta et tint à ses administrés le discours suivant: «Amîr al-Mu'minîn(32) a décidé de désigner pour vous son fils Yazid, comme continuateur de la sunna de Abou Bakr et de 'Omar.

- "C'est plutôt la sunna (tradition) de Cyrus et de César", rétorqua 'Abdul Rahmân Ibn Abou Bakr. "Abou Bakr et 'Omar n'ont pas légué le Califat à leurs fils ni à aucun membre de leur famille"».

En l'an 51, Mu'âwîyah fit le pèlerinage et là aussi, il s'attacha à demander aux gens de prêter serment d'allégeance à son fils.

Il convoqua tout d'abord Ibn 'Omar qui refusait la désignation de Yazid, et lui dit sur un ton de reproche et de menace:

«Tu me disais que tu n'aimais pas passer une seule nuit noire sans avoir un commandant! Pour ma part, je te mets en garde contre toute tentative de diviser les Musulmans et de semer la discorde entre eux».

Ibn 'Omar remercia et loua Dieu, et dit:

«Avant toi il y avait des califes qui avaient des fils. Le tien n'est pas meilleur que les leurs. Pourtant, ils n'ont pas vu en leurs fils ce que tu vois dans le tien. Ils ont choisi pour les Musulmans ce qu'ils ont estimé bon de choisir. Quant à me mettre en garde contre toute tentative de diviser les Musulmans, de toute façon, je ne l'aurais jamais fait, car je suis l'un d'eux. S'il y a unanimité pour quelqu'un, j'en ferai partie».

Mu'âwîyah lui dit: «Que Dieu te couvre de Sa Miséricorde». Après quoi, Ibn 'Omar sortit.

Puis Mu'âwîyah convoqua Ibn (le fils de) Abou Bakr, prononça la profession de foi islamique(33) et se mit à discourir. Ibn Abou Bakr l'interrompit en lui disant:

«Si tu veux à tout prix désigner ton fils, fais-le; tu en répondras devant Dieu. Quant à nous, par Dieu, nous ne le ferons jamais. Par Dieu, tu dois soumettre cette affaire (de succession) à la consultation des Musulmans, sinon nous te destituerons».

Et sans plus attendre il sortit. Mu'âwîyah, lui lança, menaçant et sournois:

«Doucement! Ne te montre pas aux Syriens avant que le les informe ce soir que tu nous a prêté serment d'allégeance, car j'ai peur qu'ils te tuent (s'ils pensent que tu ne l'as pas fait). Par la suite tu pourras faire ce que tu voudras».

Enfin ce fut le tour d'Ibn al-Zubair de se présenter devant Mu'âwîyah. Celui-ci dit à celui-là: «Ô fils de Zubair! Tu es un renard malicieux qui ne sort d'un trou que pour entrer dans un autre. Tu t'es adressé à ces deux hommes(34), tu as soufflé dans leurs narines et tu les as fait changer d'avis!»

Ibn al-Zubair répondit: «Si tu en as assez du Califat, démets-toi et allons prêter serment d'allégeance à ton fils. Si nous prêtons serment d'allégeance à toi et à ton fils, lequel de vous devrions-nous écouter et auquel de vous devrions-nous obéir?! La prestation de serment d'allégeance ne pourra jamais être faite à la fois à toi et à ton fils».

Ibn al-Zubair parti, Mu'âwîyah monta sur la tribune, remercia et loua Dieu, et s'écria: «Nous avons constaté que les dires des gens sont inexacts. Ils ont prétendu que Ibn 'Omar, Ibn Abou Bakr et Ibn al-Zubair ne prêteraient pas serment d'allégeance à Yazid. Or ils ont écouté, obéi, et ils lui ont prêté serment d'allégeance».

Là, les Syriens crièrent:

«Par Dieu, nous ne serons pas satisfaits, jusqu'à ce qu'ils prêtent serment d'allégeance devant des témoins. Autrement nous leurs couperons la tête».

«Dieu soit glorifié! Que les gens ont hâte d'en vouloir aux Quraich(35)! Je ne veux plus entendre aucun de vous répéter cela», leur dît Mu'âwîyah, avec affectation.

Mu'âwîyah descendit de la tribune et prit le chemin de la Syrie. Les gens se mirent à affirmer que Ibn 'Omar, Ibn Abou Bakr et Ibn al-Zubair avaient prêté serment d'allégeance, cependant que les intéressés eux-mêmes s'écriaient: «Non, par Dieu, nous n'avons pas prêté serment d'allégeance». Les gens dirent: «Si».(36) [/J]

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20. "Al-Khilâfah al-Rachidah"- "le Califat des quatre premiers successeurs du Prophète": Abou Bakr, 'Omar, 'Othmân, 'Ali (et provisoirement, al-Hassan)

21. "Al-Khulafâ' al-Rachidien": Les quatre premiers successeurs officiels du Prophète: Abou Bakr, 'Omar Ibn al-Khattab, 'Othman Ibn 'Affân et 'Ali Ibn Abi Tâlib.

22. Ibn al-Çabbâgh al-Mâliki, "Al-Fuçûl al-Muhemmah", p. 163

23. Jalâl al-Dm al-Ciûti, "Târikh al-Khulafâ", p. 191

24. "Umdat al-Tâlib", par Ibn a1-Muhannâ (décédé en l'an 911 hégirien), cité par Cheikh Râdhi 'Âle Yassine, "Çulh al-Hassan", p. 260

25. Il s'agit de la restitution par l'Imam 'Ali des biens de la Trésorerie distribués injustement par 'Othman Ibn 'Affân à ses proches.

26. Jalâl al-Dîn al-Ciûti, op. cit., p. 191

27. Al-Cheikh al-Mufîd, "Al-Irchâd", op. cit., p. 191

28. La famille du Prophète: L'Imam 'Ali et ses descendants.

29. L'an 50 hégirien, entre les mois de Çafar et de Rabi' al-Awwal.

30. D'aucuns disent que Mu'âwîyah désigna son fils pour sa succession avant même le décès de l'Imam al-Hassan.

31. Voir Abou-A'lâ al-Mawdoudi, "Al-Khilâfah wal-Mulk" (Le Califat et le royaume) pp. 99-120

32. Titre du Calife = Commandeur des croyants

33. Al-chahâdatayn = «J'atteste qu'il n'y a de divinité que Dieu; j'atteste que Muhammad est le Messager de Dieu».

34. C'est-à-dire les deux hommes qui l'ont précédé chez Mu'âwîyah, Ibn 'Omar et Ibn Abou Bakr.

35. Les trois hommes qui venaient d'être présentés à Mu'âwîyah sont de la tribu de Quraich.

36. Jalâl al-Din al-Ciûti, "Târikh al-Khulafâ", p. 196
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L' Imam al-Hussayn et le Respect scrupuleux des Engagements et des Pactes

[J]La "Chari'a"(37) islamique définit la conduite politique et la fonde sur des règles morales, doctrinales et juridiques rigoureuses. Elle accorde aux pactes et aux traités une immunité inviolable. Dieu dit, en effet:

«Ô vous qui croyez! Respectez vos engagements...» (Coran, V, 1)

et:

«Tenez vos engagements, car les hommes seront interrogés sur leurs engagements». (Coran, XVII, 34)

Les Imams d'Ahl-ul-Bayt (l'Imam 'Ali et ses descendants) représentaient à cet égard l'exemple à suivre. En tant que continuateurs de l'expérience du Prophète, et gardiens du Message ils tenaient à ce que leur conduite politique soit l'incarnation et l'application effective de la jurisprudence politique de la chari'a islamique. La devise: «La fin justifie les moyens» n'ait guère la leur. La morale primait tout lorsqu'ils étaient aussi bien avec les masses populaires qu'avec les adversaires. Cette morale politique leur à certes coûté, très cher, dans la lutte acharnée qu'il ont menée contre la corruption et la déviation des Omayyades et ensuite des Abbassides. Mais qu'importait pour eux! Ce dont ils se souciaient, n'était point de remporter des victoires éphémères et momentanées, mais de fixer des règles et des attitudes que l'histoire devrait enregistrer et que les générations futures devront suivre. Après tout, ils étaient les continuateurs de la Tradition du Prophète, et leur mission ne se limitait pas à leur époque contemporaine, mais s'étendait à toute l'histoire future l'humanité.

Ainsi, lorsque les masses populaires, acquises à la cause des Ahl-ul-Bayt, ont souffert le martyre en subissant le traitement cruel que leur réservaient les Omayyades, et qu'ils se sont tournés vers al-Hussayn (après le décès de son frère al-Hassan en l'an 50 H.) pour lui demander de déclencher une action susceptible de conduire à la destitution de Mu'âwîyah, l'Imam al-Hussayn récusa leur initiative en leur faisant valoir qu'il y avait entre lui et Mu'âwîyah un pacte (signé par l'Imam al-Hassan) qu'il continuerait à respecter, pour sa part, et était illégal de dénoncer; et ce, bien qu'il ait refusé catégoriquement la désignation de Yazid comme successeur de son père au Califat.

Al-Cheikh al-Mufid, citant les témoignages d'al-Kalbi, d'al-Madâ'inî et d'autres biographes, nous relate dans les lignes suivantes cet épisode de la vie de l'Imam al-Hussayn:

«L'Imam al-Hassan était juste décédé, les Chiites d'Iraq envoyèrent à l'Imam al-Hussayn des messages dans lesquels ils affirmaient leur volonté de lui prêter serment d'allégeance en vue de le porter au Califat et de destituer Mu'âwîya. Al-Hussayn rejeta cette requête en arguant du pacte qui existait entre lui et Mu'âwîyah, et qu'il n'était pas permis de le dénoncer avant l'expiration du délai prévu. Il leur dit que c'est seulement après la mort de Mu'âwîya (mort qui marque la fin de la validité de ce pacte) qu'il pourrait étudier et envisager leur proposition concernant sa désignation pour le califat»(38) [/J]

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37. La loi islamique

38. "Al-Irchâd", op. cit. p. 200
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Yazid s'empare du Califat

[J]Avant de mourir, Mu'âwîyah réussit à aplanir les difficultés et à transférer le pouvoir et la présidence de l'Etat Islamique à son fils Yazid, après avoir brisé la résistance de l'opposition à son projet, moyennant argent, ruse et terreur. Mais malgré ce travail énorme accompli par le fondateur de la dynastie omayyade, le nouveau pouvoir se sentait mal assuré, et Yazid savait qu'il lui était difficile de se faire admettre et de défier les valeurs et les principes de la Umma, laquelle fut éduquée par le Prophète dans l'amour et le respect des Ahl-ul-Bayt, et dans laquelle ce dernier avait insufflé une âme "civilisationnelle" spécifique et des valeurs politiques particulières. La Umma, ou une partie d'elle tout au moins, connaissait donc les qualités de l'Imam al-Hussayn et les défauts de Yazid, elle distinguait clairement la personnalité de celui qui devrait la guider, savait quels étaient ses droits et ses devoirs, et refusait par conséquent la tyrannie de ce régime héréditaire que les Omayyades s'obstinaient à lui imposer.

La Umma venait de vivre vingt ans sous un régime autoritaire et despotique, basé sur un parti unique, le parti des Omayyades, qui s'était emparé seul du pouvoir, des biens des Musulmans et de l'administration de l'Etat. Cela a suffit pour que les Musulmans éprouvent un sentiment de révolte contre ce régime qui semblait maintenant vouloir se perpétuer par un système dynastique et héréditaire, et qu'ils se décident à destituer ce nouveau calife (Yazid) imposé par son père et son prédécesseur (Mu'âwîyah).

Pour se sortir de cette longue situation difficile de crises, de terreur, de domination politique et de corruption interminable, il était naturel que les mécontents se mettent à la recherche d'un leader révolutionnaire capable d'apporter un changement radical, d'un dirigeant prestigieux capable d'affronter le pouvoir établi et d'un homme de foi et de principes susceptible de mettre fin à la corruption et de rétablir les valeurs de l'Islam. Or, à cette époque-là, personne ne pouvait se mesurer à la personnalité d'al-Hussayn pour assumer un rôle aussi difficile.

Al-Hussayn était le petit-fils du Prophète, le fils de l'Imam 'Ali, le maître de Quraich et le meilleur de ses contemporains par son savoir, sa piété, sa compétence et sa morale. C'était un homme de notoriété publique; aucun Musulman n'ignorait sa haute position, et personne ne méconnaissait sa personnalité. Courageux, tout le monde se rappelle le ferme refus qu'il opposa à Mu'âwîyah lorsque celui-ci obligea les Musulmans à prêter serment d'allégeance à son fils Yazid qu'il avait désigné pour sa succession.

Yazid lui-même était conscient de toutes ces qualités qui faisaient d'al-Hussayn le danger numéro un pour son pouvoir. Aussi concentrant sa pensée et ses craintes sur la personne d'al-Hussayn. Dès les premiers jours de son accession au pouvoir, il écrivit à Walîd Ibn 'Otbah Ibn Abi Sufiyân, gouverneur omayyade de Médine, une lettre dans laquelle il lui demanda:

«Convoque al-Hussayn, 'Abdullah Ibn 'Omar et Ibn al-Zubayr; et obtiens d'eux coûte que coûte leur serment d'allégeance (à mon califat). Ne les relâche pas avant de l'en avoir obtenu...».(39)

Al-Walîd ouvrit la lettre. Il y lut l'annonce de la mort de Mu'âwîyah et de la proclamation de Yazid comme Calife, ainsi que la mission politique difficile que ce dernier lui confiait. Il garda secret le contenu de la lettre, et il se donna un délai de réflexion. Après quoi il décida de consulter Marwân, une personnalité omayyade influente. Il le convoqua, lui fit part de l'ordre de Yazid et lui demanda comment agir avant que les choses ne s'aggravent et que la situation ne deviennent incontrôlable. Marwân ne voyait d'autre façon d'agir que le recours à l'effet de surprise et à la terreur. Il exposa ainsi son point de vue:

«Je pense que tu dois les convoquer maintenant et leur ordonner de prêter serment d'allégeance à Yazid. S'ils obtempèrent, je les laisse tranquilles; et s'ils refusent, je les décapiterai avant qu'ils ne sachent la mort de Mu'âwîyah; car s'ils l'apprenaient, chacun d'eux irait de son côté pour s'opposer au califat de Yazid et pour se proclamer soi-même calife. Quant à Ibn 'Omar, il ne se battrait pas, et il n'aimerait pas commander la Umma, sauf s'il y était poussé involontairement».(40)

Al-Walîd accepta le plan et «envoya à al-Hussayn et à Ibn al-Zubayr un messager adolescent, 'Abdullah Ibn 'Omar Ibn 'Othman, pour leur demander de venir immédiatement chez lui. Le messager les trouva assis dans une mosquée. Il leur fit part du message d'al-Walîd leur demandant de se rendre immédiatement chez lui (à une heure où habituellement il ne recevait pas), et il attendit la réponse. Les intéressés lui dirent: "Va-t-en, nous viendrons tout de suite"».(41)

«Cette convocation est singulière!», pensaient al-Hussayn et son Compagnon. «Que veut al-Walîd?»

Les deux hommes pressentirent la gravité de la situation et devinèrent que quelque chose de nouveau venait sans doute de se produire. Sinon pourquoi cette convocation inhabituelle?! A cette heure indue?

«Ibn al-Zubayr confia son inquiétude à al-Hussayn: "Que veux-il de nous à cette heure où il ne reçoit pas normalement?"

- "Je pense que leur tyran (Mu'âwîyah) est mort, et qu'il (al-Walîd) nous convoque pour obtenir de nous la prestation de serment d'allégeance avant que la nouvelle ne se propage publiquement", répondit al-Hussayn.

- "Je ne penserais pas autrement", acquiesça Ibn al-Zubayr, avant d'ajouter: "et que vas-tu faire?"

- "Je vais maintenant rassembler mes hommes afin de les poster prés de la porte avant d'entrer chez lui", dit al-Hussayn.

- "Mais j'ai peur pour toi. Si tu entres chez lui...", s'inquiéta al-Zubayr.

- "Je n'irai le voir qu'en étant à même de refuser (la prestation de serment d'allégeance)", le rassura al-Hussayn».(42)

C'est donc dans cet esprit de confrontation et de défi courageux et avec une détermination inébranlable qu'al-Hussayn décida dès le début de faire face au pouvoir corrompu et illégitime de Yazid. Car il était conscient des conséquences désastreuses incalculables de la désignation de Yazid à la tête de la direction des affaires et de l'administration de la Umma. Il connaissait parfaitement Yazid et savait pertinemment ce qu'il valait politiquement, moralement et spirituellement. Il fallait absolument l'empêcher de s'emparer du titre de la légitimité qu'il s'efforçait d'obtenir par tous les moyens. L'Imam al-Hussayn savait qu'il n'avait pas d'autre alternative pour l'en empêcher, que le sabre, la révolution, le jihad et le sang.

Aussi convoqua-il ses frères, ses proches parents et son entourage. Trente hommes décidèrent de l'accompagner chez al-Walîd. Lorsqu'ils y arrivèrent al-Hussayn plaça ses hommes de sorte qu'ils pouvaient observer la réunion et intervenir à tout moment, car il n'ignorait pas que la malhonnêteté et la traîtrise étaient le fort des Omayyades. Aussi dit-il à ses compagnons: «Si je vous appelle ou que vous entendez ma voix s'élever, venez tous dans ma direction. Autrement, restez à vos places jusqu'à ce que de revienne».(43)

Il entra chez al-Walîd, près duquel il vit Marwân Ibn al-Hakam. Lorsque le gouverneur de Médine lui demanda, comme il l'avait prévu, de prêter serment d'allégeance a Yazid, al-Hussayn dit: «Émir! La prestation de serment d'allégeance ne doit pas être faite en secret. Si tu appelles les gens demain (pour cette affaire), appelle-moi avec eux».

Marwân Ibn al-Hakam s'empressa d'intervenir sur un ton d'avertissement et de menace: «Non, Emir! N'accepte pas! Récuse son prétexte! S'il persiste à refuser je le décapiterai».

Al-Hussayn se fâcha et dit à ce dernier: «Malheur à toi, fils de Zarqâ. Tu veux me décapiter! Par Dieu tu as menti et tu t'es rendu mesquin».

Puis s'adressant à al-Wâlid, il dit: «Emir! Nous sommes la famille du Prophète, le métal du Message et le lieu de fréquentation des Anges. C'est par nous que Dieu a débuté (le Message) et c'est par nous qu'IL (l')a achevé. Par contre Yazid est un libertin qui ne cache pas son libertinage, un alcoolique et un assassin de l'âme(44) que Dieu interdit de tuer. Quelqu'un comme moi ne saurait donc prêter serment d'allégeance à quelqu'un comme lui. Vous et nous, (nous) allons attendre pour voir lequel d'entre nous est le plus en droit de prétendre au Califat».

Ayant exprimé clairement et sans détour son intention, al-Hussayn sortit. Marwân se fâcha et dit à al-Wâlid: «Tu m'as désobéi!» Ce dernier répondit: «Malheur à toi! Tu m'as conseillé de perdre ma religion et ma vie. Par Dieu je n'accepterais pas la possession de tout ce bas-monde contre l'assassinat d'al-Hussayn. Par Dieu je ne pense pas que quelqu'un puisse rencontrer Dieu avec une balance légère,(45) s'il a sur la main le sang d'al-Hussayn; Dieu ne le regardera pas et ne l'innocentera jamais. Il subirait une douloureuse torture».(46)

L'Imam al-Hussayn retourna auprès des siens, plus que jamais déterminé à mener le jihad et à déclarer la révolution en faisant de la Mecque sa base de départ et le champ d'action de son mouvement. [/J]

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39. Ibn al-Athîr, Tom. IV, p. 14

40. Ibn al-Athîr, Tom. IV, p. 14

41. Ib. Ibid.

42. Ib. Ibid.

43. Ibn al-Çabbagh al-Mâlikî, "Al-Fuçûl al-Muhimmah", p. 182.

44. Allusion aux nombreux versets coraniques interdisant de tuer une âme innocente. Par exemple: «Ne tuez pas l'âme que Dieu a interdit de tuer» (Coran, XVII, 33), «Celui qui a tué un homme qui lui-même n'a pas tué (...) est considéré comme s'il avait tué tous les hommes...» (Coran, V, 32)

45. Bilan positif des actions (ou avec peu de péchés)

46. Ibn Tâwûs, "Maqtal al-Imam Hussayn", p. 10-11
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Pourquoi Al-Hussayn s'est-il soulevé?

[J]Dans une lettre adressée à son frère Muhammad Ibn al-Hanafiyyah ainsi que dans d'autres occasions, al-Hussayn évoque les raisons de son départ de Médine, de son refus du pouvoir de Yazid, et de sa révolution contre lui. Il y explique le sens de son mouvement et les fondements de sa confrontation avec le nouveau régime Omayyade. Ci-après l'essentiel de cette lettre:

«Je ne me suis pas soulevé de gaieté de coeur, ni pour une quelconque insatisfaction personnelle, ni par subversion ni injustement. Je me suis soulevé pour réformer la Umma de mon grand-père, le Messager de Dieu, pour commander le bien et interdire le mal, et pour suivre les traces de mon grand-père et de mon père ... »

Préserver le Message de l'Islam et la Tradition du Prophète, tels sont les deux mots-clé de la Révolution d'al-Hussayn.

Aucun élément d'ordre personnel n'entra jamais dans ses motivations.

Quant à son refus absolu du pouvoir de Yazid, il l'a expliqué clairement à Ibn al-Wâlid, comme nous l'avons vu plus haut: «Yazid est un libertin qui ne cache pas son libertin alcoolique et un assassin de l'âme interdite... Quelqu'un comme moi ne saurait prêter serment d'allégeance à qu comme lui ... »

Le Gardien du Message ne peut aucunement confier celui-ci à son transgresseur. Rien de plus légitime.

Et c'est dans une autre lettre, adressée, celle-ci, au habitants de Kûfa qu'il souligne les conditions requises en Islam pour un prétendant à la direction politique des Musulmans, l'Imamat(47):

«Par ma religion, l'Imam ne peut être que celui qui gouverne selon le Livre, qui établit l'équité, qui a pour religion la Religion Vraie, qui s'en tient scrupuleusement aux Prescriptions de Dieu...»(48)

Or Yazid était un débauché qui affichait sa débauche.(49) L'essentiel de ses préoccupations étaient: les jeux, les divertissements, les femmes, les boissons alcoolisées, les courses de chevaux, la chasse etc... Comment dès lors, al-Hussayn, ce petit-fils du Prophète, ce gardien du Message, ce membre des Ahl-ul-Bayt dont «Dieu a effacé la souillure»(50), pouvait-il consentir et contribuer à la désignation de quelqu'un comme Yazid pour la direction de la Umma, direction à laquelle ne doit accéder qu'un homme d'une intégrité exemplaire et possédant une connaissance profonde et parfaite des lois et des statuts de la Chari'â?

En appelant les gens à se joindre à lui dans son soulèvement il ne leur promettait qu'une chose: le retour au Message de Dieu et à la Tradition du Prophète.

«... Je vous appelle au Livre de Dieu et à la Sunna de Son Prophète... Car la Sunna est assassinée et l'hérésie, ressuscitée. Si vous écoutiez mes paroles et obéissiez à mes instructions... Je vous conduirais dans la bonne voie... Que la Paix et la Miséricorde de Dieu soient sur vous».(51)

Une situation indigne de l'expérience islamique:

De l'étude de la situation politique, économique et sociale de l'époque qu'avait vécue al-Hussayn, ainsi que de l'examen des lettres, des messages, des correspondances et des discours qu'on connaît de cette époque, il ressort que ce qui prévalait durant cette période du règne des Ommayyades, c'était:

1- Le despotisme et le népotisme du Pouvoir. En effet, une classe politique privilégiée, un parti tribal despotique a monopolisé le pouvoir tout au long de cette période. Il s'agit du parti Omayyade qui s'est réservé le pouvoir et l'administration s'est accaparé des biens de l'Etat, en en privant de la Umma. L'Etat est devenu la chasse gardée des Omayyades, et leur propriété privée.

2- Les assassinats (d'opposants), la terreur et le sang.

3- La dilapidation des biens de la Umma et de la naissance d'une classe de riches dans une société où prévalaient la pauvreté et le besoin. En outre, beaucoup de ceux qui occupaient des postes de responsabilité et des postes-clé étaient incompétents.

4- La déviation dans la conduite: la déviation se développait dans la vie publique et les manifestations de la corruption sociale commençaient à se généraliser dans la conduite des individus et des groupes.

5- L'absence de la loi, et la primauté du tempérament et de l'intérêt personnels des gouverneurs dans la conduite des affaires de la Umma.

6- La naissance d'une classe d'inventeurs et de falsificateurs de Hadiths, et de déformateurs de la Sunna du Prophète que d'écoles théologiques, telles que "Al-Jabariyyah" et "Al-Murji'ah", dans le but de justifier et de légitimer la conduite politique déviationniste du Pouvoir.

La déviation d'un bon nombre des valeurs et des lois de l'Islam était trop évidente pour être ignorée de quiconque se penche sur l'histoire de cette période. Une lecture minutieuse de cette histoire convaincra tout observateur averti que la Révolution d'al-Hussayn était une nécessité islamique historique, et que les mobiles et les causes de cette Révolution ont été engendrés par les conditions très détériorées dans lesquelles vivaient les Musulmans et la Umma.

Prenons un exemple pour illustrer cette dégradation de la situation des Musulmans et de cette déviation de l'expérience islamique: l'Islam avait établi une situation de paix civile et de sécurité dans le territoire islamique, comme en témoigne ce verset:

«Celui qui a tué un homme qui lui-même n'a pas tué, ou qui n'a pas commis de violence sur la terre, est considéré comme s'il avait tué tous les hommes; et celui qui sauve un seul homme est considéré comme ayant sauvé tous les hommes». (Coran, V, 32)

Or la terreur et la liquidation physique constituaient un trait saillant des Omayyades. Le parti omayyade au pouvoir a fait de l'usage du sabre, du fouet et de la prison une monnaie courante contre les Musulmans et notamment contre les adeptes d'Ahl-ul-Bayt, les dirigeants de l'opposition parmi les partisans de l'Imam 'Ali, d'al-Hassan et d'al-Hussayn.

En témoigne l'un des survivants de cette période de terreur, dans un discours qu'il tint à ses amis et dans lequel il leur rappelait le calvaire qu'ils vivaient et leur reprochait leur résignation: «On vous tuait, on coupait vos mains et vos pieds, on crevait vos yeux, et on vous suspendait au tronc des palmiers, parce que vous aimez les "Gens de la Maison" de votre Prophète (les Ahl-ul-Bayt); et vous restiez pourtant dans vos maisons et obéissiez à votre ennemi ... »(52)

Mu'âwîyah avait entrepris l'éradication des leaders de l'opposition et des notables des partisans et des adeptes d'Ahl-ul-Bayt. Il en a tué un nombre que l'histoire n'a pu précise exactement. Nous pouvons en citer quelques-uns:

1- Hajar Ibn 'Aday, un Comagnon auguste qu'al-Hâkim a décrit, dans "Al-Mustadrak", comme un ascète parmi les Compagnons du Prophète.(53)

«L'Imam al-Hussayn a protesté auprès de Mu'âwîyah l'assassinat de ce Compagnon et de ses amis(54), dans un qu'il lui adressa:

«N'est-tu pas l'assassin de Hajar, frère de Kindah, ainsi que des fidèles Priants qui refusaient l'injustice, se terrifiaient devant l'hérésie, ne craignaient pas d'être blâmés par " blâmeur" lorsqu'il s'agissait de défendre la Cause de Dieu?... Tu les as assassinés injustement après leur avoir donné toutes les assurances(55) et juré tout de ne leur tenir rigueur ni d'un ancien différend entre toi et eux, ni de rancunes éprouvais à leur égard».(56)

2- 'Amr Ibn al-Hanq al-Khazâ'i: c'était un Compagnon, un Emigrant(57) qui occupait lui aussi une position auguste auprès du Prophète. Il fut décapité à Mouçol(58) et sa tête fut transportée à Damas. C'était la première fois depuis l'avènement de l'Islam qu'on transportait, ainsi, une tête d'une ville à une autre. Par la suite, sa tête fut apportée à sa femme détenue dans la prison de Mu'âwîyah. Lorsqu'on jeta la tête de son mari dans son giron, elle la regarda et dit aux hommes de Mu'âwîyah: "Vous l'avez éloigné de moi pendant longtemps; puis vous me l'avez offert assassiné. Bienvenue donc à ce cadeau qui ne saurait être ni indésirable ni indésiré".

3- 'Abdullah Ibn Yahiyâ al-Hadrami et ses compagnons.

4- Rachid al-Hejri, qui fut démembré vivant.

Nous avons cité jusque là à titre indicatif les noms de quelques Compagnons éminents qui furent assassinés avec leurs amis par les Omayyades. La liste est loin d'être close. Il ne s'agit pas ici de dresser une liste d'assassinats, mais de montrer l'ampleur de la répression et la légèreté avec laquelle le régime omayyade liquidait des Compagnons du Prophète et des Musulmans intègres, pour leur opposition aux transgresseurs de la Sunna et leurs protestations contre les pratiques illégales.

A travers le témoignage suivant sur des événements qui se sont produits à Basrah, Ibn al-'Athir nous permet de nous faire une idée des massacres perpétrés contre les opposants et avec quelle désinvolture et insouciance les hommes de Mu'âwîyah commettaient leurs crimes:

«Lorsque Ziyâd se fit remplacer par Samra - pendant son absence - à la tête du gouvernement de Basrah, ce dernier accéléra le rythme des exécutions. Selon Ibn Sirine, il a tué huit mille personnes pendant l'absence de Ziyâd. Lorsque Ziyâd retour, lui dit: «N'as-tu pas peur d'avoir assassiné un innocent (parmi eux)?» Samra répondit: «Non, si j'en avait assassiné le double, je n'aurais pas eu une telle crainte». Abou al-Sawâri, al-'Adwi témoigne: «Samra a tué quarante sept membres de ma tribu en une seule journée. Ils étaient tous des colligeurs(59) du Coran».(60)

Outre les massacres et les persécutions des opposants et des adeptes d'Ahl-ul-Bayt, les autorités omyyades menaient parallèlement une campagne de désinformation, de falsification et de déformation contre l'opposition conduite par les deux petits-fils du Prophète. On entendait prononcer depuis les tribunes des Omayyades, des discours provocateurs regorgeant de mensonges, d'injures et de contre-vérités à l'encontre l'Imam 'Ali Ibn Abi Tâlib.

Ces agissements ont suscité la colère de la Umma en général, d'al-Hassan et al-Hussayn, de leur partisans, des Compagnons et des Suivants(61) en particulier, ceux-ci ayant bien connu l'Imam 'Ali, sa position, son jihad justice, sa science et sa plume.

Al-Mas'oudi, citant al-Tabari, rapporte un incident entre Sa'ad et Mu'âwîyah, qui montre que ce dernier était l'instigateur de cette campagne de propagande et que les pieux des Compagnons et les avant-gardes de la Umma s'y étaient opposés:

«Mu'âwîyah accomplissait le pèlerinage et déambulait dans la Maison avec Sa'ad. Lorsqu'il termina, il se rendit à Dar al-Nadwa et fit s'asseoir Sa'ad près de lui sur son lit. Il se mit à injurier 'Ali. Sa'ad s'approcha et dit: «Tu m'as fait asseoir auprès de toi sur ton lit et tu t'es mis à injurier 'Ali. Par Dieu, si j'avais seulement une seule des qualités que possédait 'Ali, je l'aurais aimée mieux que la possession de ce sur quoi le Soleil se lève; et si j'avais les enfants de 'Ali, je les aurais mieux aimés que la possession de ce sur quoi le Soleil se lève! Par Dieu si c'était à mon propos que le Prophète eût dit (ce qu'il avait dit à propos d'Ali), le jour de Khaybar: "Demain je donnerai l'étendard à un homme que Dieu et Son Prophète aiment, et qui aime Dieu et son Prophète; il n'est pas un fuyard; par lui, Dieu donnera la victoire", ce serait préférable pour moi à la possession de ce sur quoi le Soleil se lève. Par Dieu si c'était à moi que le Prophète eût dit - ce qu'il avait dit à l'Imam 'Ali -: "N'acceptes-tu pas d'être à moi ce que Haroun était à Moïse, à cette différence près qu'il n'y aura pas de Prophète après moi?", ce serait mieux pour moi que la possession de ce sur quoi le Soleil brille. Que Dieu ne me pardonne jamais si j'entrais une seconde fois chez toi pour le restant de ma vie ». Puis il se leva et partit.(62)

Ibn al-'Athir nous relate un autre incident du même genre: «Un jour, Yosr Ibn Arta'ah était chez Mu'âwîyah. Lorsque celui dit du mal de 'Ali, en présence d'Ibn 'Omar al-Khattab et sa mère Om Kalthoum, fille de 'Ali, Yosr leva le bâton sur lui et le blessa».(63)

Il raconte encore: «Lorsque al-Moghira fut nommé gouverneur de Kûfa, il confia la région d'al-Ray à Kathir Ibn Chehâb qui s'attachait à injurier 'Ali de la tribune. Kathir à Ray jusqu'à ce que Ibn Ziyâd fût désigné pour être à la tête du gouvernorat d'al-Kûfa».(64)

Selon al-Mas'oudi: «Ziyâd rassemblait les gens à la porte de son château et les incitait à maudire 'Ali. Celui qui refusais s'exécuter, il le soumettait, sans autre forme de procès, à l'épée».(65)

Cette campagne de dénigrement contre l'Imam 'Ali ne prit fin qu'avec l'avènement de 'Omar Ibn 'Abdul 'Aziz, lequel en ordonna l'arrêt, et entreprit l'épuration de l'appareil gouvernemental de ses prédécesseurs.(66)

Outre ces facteurs qui ont attisé les flammes de la révolution et galvanisé l'ardeur de l'opposition qui réclamait l'application des statuts de la justice et de l'égalité que l'Islam avait promulgués, ainsi que le respect de la volonté de la Umma et des valeurs et des principes relatifs au gouvernement, à la politique et à la façon de traiter la Umma, il y avait des facteurs économiques et financiers qui justifiaient le Soulèvement des défenseurs de l'Islam vrai. En effet, le régime Omayyade avait suspendu les lois de la distribution économique (promulguées par l'Islam) établissant l'égalité dans les dons distribués, l'interdiction de l'accaparement, l'obligation de la solidarité l'entraide sociales au bénéfice des classes démunies, et la lutte contre la pauvreté. En effet le Coran dit:

«Annonce un châtiment douloureux à ceux qui thésaurisent l'or et l'argent sans rien dépenser dans le chemin de Dieu». (Coran, IX, 34) et «Ce que Dieu a octroyé à Son Prophète comme butin pris sur les habitants des cités appartient à Dieu et à Son Prophète, aux pauvres, au voyageur, afin que ce ne soit pas attribué à ceux d'entre vous qui sont riches. Prenez ce que le Prophète vous donne, et abstenez-vous de ce qu'il vous interdit. Craignez Dieu! Dieu est terrible dans Son Châtiment!» (Coran, LIX, 7).

Les classes défavorisées, constatant jour après jour la détérioration de leur situation économique, ont pris conscience que ces préceptes du Coran n'avaient aucune application réelle, et que face à l'accentuation de leur privation et de leur indigence, la richesse s'accumulait entre les mains d'une catégorie particulière.

L'histoire nous montre clairement la disparité dans le niveau de vie des deux catégories qui composaient la Umma. Une majorité démunie et vivant dans la privation, et une minorité qui ne savait que faire de l'argent dont elle s'accaparait. Ainsi, les historiens ont souligné que la fortune d'Amr Ibn al-'Âç, le gouverneur de l'Egypte sous Mu'âwîyah se composait de 325 mille dinars en nature, de 100 mille dirhams en monnaie, 200 mille dinars en récolte, et d'une propriété célèbre en Egypte, dont la valeur était de 10 mille dinars; que lorsque 'Abdul Rahrnân Ibn 'Awf divisa son héritage en 16 parts, chacune de ses femmes a obtenu 80 mille dirhams».(67)

Selon Ibn al-'Athir, Marwân Ibn al-Hakam obtint 500 mille dinars des revenus africains.(68)

On a estimé la fortune de Ya'li Ibn 'Omayya à 500 mille dinars, auxquels il faut ajouter près de 300 mille dinars composés de prêts et de biens immobiliers(69) , et on affirme que lors de sa mort, il a laissé une fortune de 250 mille dirhams.(70)

Selon Saïd Ibn al-Musayyab, Zayd Ibn Thâbit a légué une quantité d'or et d'argent telle, qu'on fut amené à les effriter avec des marteaux; sans parler de ses propriétés et autres biens estimés à 100 mille dinars.(71)

Ces fortunes colossales pour l'époque ne pouvaient laisser indifférentes la majorité écrasante des masses Musulmanes qui réclamaient l'application des principes égalitaires de l'Islam. En voyant Yazid vautré dans une vie de débauche et préoccupé de ses chiens, de ses singes et de ses boissons, et en constatant que son entourage et ses gouverneurs faisaient de même (c'est l'époque de Yazid que le chant public, la consommation d'alcool et l'apparition des clubs de nuit, ont vu le jour à la Mecque et à Médine),(72) les classes défavorisées soucieuse de voir s'appliquer l'égalité islamique, se sont tourné al-Hussayn, pour qu'il rétablisse la situation en tant que dirigeant capable d'appliquer les statuts et les lois islamiques qu'elles avaient connus à l'époque du Prophète.

Situation politique pourrie où prévalaient corruption, népotisme et déviation, doublée d'une injustice économique flagrante, toutes les conditions objectives et légales étaient pour un soulèvement général que l'Imam al-Hussayn ne pouvait pas légalement ne pas déclencher. Ce petit-fils du Prophète et fils de l'Imam 'Ali, investi qu'il était, par le Texte, de la mission de sauvegarder le Message islamique, ne pouvait pas faillir à cette mission en restant les bras croisés alors que les valeurs de l'Islam étaient bafouées publiquement et ouvertement; même s'il était sans illusion quant à l'issue immédiate de sa révolution. Il lui importait peu qu'il remporte ou non la bataille qu'il devait livrer. Pour lui, ce qui comptait c'était d'accomplir sa Mission divine, et de réaliser la victoire de sa Cause. De là sa grandeur et la noblesse de sa Révolution exemplaire.[/J]

___________________________

47. De: "imam"= celui qui guide, qui se met devant.

48. A-Cheikh al-Mufid, op. cit. p. 204

49. Voir al-Mawdoudi, op. cit. p. 11

50. Voir le verset coranique déjà cité, et dans lequel, il est dit: «Ô vous, les gens de la Maison! Dieu veut seulement éloigner de vous la souillure». (Coran, XXXIII, 33)

51. 'Abdullah al-Muqarram, "Maqtal al-Hussayn", pp. 140-141

52. "Târikh al-Tabari", Tom. VII, p. 104, cité par Cheikh Râdhi Âl Yacîn, "Çulh al-Hassan", p. 320

53. Cité par Cheikh Râdhi Âl Yacin, "Çulh al-Hassan", op. cit., p. 32

54. Mu'âwîyah a assassiné Hajar Ibn 'Aday et un groupe de ses amis:

1) Charik Ibn Chaddâd al-Hadhrami

2) Cifi Ibn Chaddâd al-Hadhrami

3) 'Abudul Rahmân Ibn Hassan al-'Anzi

4) Qabiçah Ibn Rabi'ah al-'Abçi

5) Kaddâm Ibn Hayyân al-'Anzi

6) Muhriz Ibn Chihâb al-Timimi,

pour leur opposition à son gouvernement et leur allégeance à l'Imam 'Ali.

55. Allusion à la cinquième clause du Traité de la Réconciliation de Mu'âwîyah et de l'Imam al-Hassan.

56. Al-'Allama al-Majlisi, " Bihâr al-Anwâr", Tom. X, p. 149, cité par Râdhi Âle Yaçîn, op. cit., p. 338

57. "Les Emigrants" sont les Musulmans qui ont émigré avec le Prophète, de la Mecque à Médine pour échapper à la persécution des polythéistes mecquois.

58. Grande ville, au nord de l'Iraq

59. Il voulait dire sans doute des "rémemorateurs" du Coran.

60. Ibn al-'Athir, "Al-Kâmel fil Târîkh", Tom. III, p. 462

61. Les compagnons des Compagnons du Prophète

62. Al-Mas'oudi, "Murûj al-Dahab", Tom. III, p. 14

63. Ibn al-'Athir, "Al-Kâmil Fil Târikh", Tom. IV, p. 12

64. Id. Ibid., Tom. III, p. 413

65. Al-Mas'oudi, "Murûj al-Dahab", Tom. III, pp. 183-184

66. Aboul A'lâ al-Mawdoudi, op. cit., p. 13

67. Al-Mas'oudi, "Murûj al-Dahab", Tom. III, p. 23

68. Al-Kâmil, Tom. III, p. 91, éd. 1385 H.

69. Al-Mas'oudi, Tom. II, p. 333

70. Tabaqât Ibn Sa'ad, Tom. III, QI, p. 105, cité par Cheikh Muhammad Hussain Âl Yacîn, op., cité p. 136

71. Ibn al-'Athir, op. cité Tom. II, p. 333

72. Al-Mas'oudi, "Murûj al-Dahab", Tom. III, pp. 67-68
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A Médine

[J]L'Imam al-Hussayn a mesuré la gravité de la situation et s'est rendu compte de la volonté du parti omayyade de transformer coûte que coûte le califat en un règne héréditaire. Il a constaté que le Traité signé entre Mu'âwîyah et son frère al-Hassan était resté lettre morte et que si Mu'âwîyah lui-même l'avait totalement négligé, ses successeurs ne semblaient guère vouloir être plus royalistes que le roi à cet égard. Il a compris que la Umma ne tarderait pas à connaître un désastre politique effroyable, et que son devoir légal (religieux) lui imposait de ne pas décevoir l'espoir que la Umma mettait en lui pour la sortir du calvaire.

La situation politique à Médine était incertaine et trouble. Al-Wâlid, gouverneur de Médine, et Marwân, l'un des piliers du pouvoir omayyade, que le Prophète avait expulsé de cette ville, et qui y pesait actuellement d'un poids grandissant, n'ont pas désarmé face à son refus de prêter serment d'allégeance à Yazid, et semblaient vouloir l'y contraindre à tout prix, puisqu'ils l'avaient de nouveau convoqué.

Il lui fallait prendre rapidement la décision qui s'imposait pour faire face à la nouvelle situation. Aussi dit-il aux messagers de Wâlid et de Marwân, venus lui apporter la convocation de leurs maîtres: «Attendez jusqu'à demain. Puis, vous verrez et nous verrons».(73)

En examinant une dernière fois les données du problème auquel il était confronté, il estima qu'il ne pouvait accepter légalement le fait accompli pour les raisons suivantes:

1- Yazid s'est emparé du califat en violation des termes du Traité de Réconciliation qui stipulait qu'après la mort de Mu'âwîyah le Califat reviendrait aux ayants droit, soit à al-Hassan ou à défaut, à son frère al-Hussayn.

2- La passation du Califat à Yazid s'est déroulée de façon contraire à celle que les Musulmans avaient connue auparavant, soit le système de «choura» (la consultation).(74)

3- L'incompétence et la disqualification de Yazid pour diriger la Umma.

4- L'emprise du parti et de la famille omayyades sur le Pouvoir.

5- La déviation des principes islamiques de justice et d'égalité, et le pouvoir personnel au lieu de celui de la loi.

Aussi décida-t-il de quitter Médine pour la Mecque, avec sa famille, son entourage et ses compagnons, la deuxième nuit après son entretien avec al-Wâlid. C'était donc le point de départ de la longue et pénible marche historique d'al-Hussayn, d'une cascade de sang qui ne cessera de couler à travers l'histoire, rappelant à tout moment, aux injustes, que l'injustice à des limites, et aux déviationnistes, que le Message a toujours des gardiens dévoués et prêts en toute conscience, à se sacrifier pour le défendre, quelque soient la puissance et la tyrannie de ceux qui veulent le faire dévier de son cours originel.

En décidant de réagir et de ne pas céder aux pressions omayyades, al-Hussayn savait pertinemment qu'il avait affaire à forte partie: Mu'âwîyah avait pu renforcer solidement le pouvoir des Omayyades; et à une partie difficile et intraitable: si lui-même n'avait pour arme que les principes, les valeurs et les idéaux dont il ne pouvait ni ne voulait n'écart, ses adversaires n'hésitaient devant rien: tous les moyens leur étaient bons: la ruse, le mensonge, l'assassinat, la déviation, l'immoralité. A un pouvoir solidement assis, à la riche fabuleuse de la Umma islamique dont les Omayyades disposaient, et aux moyens perfides qu'ils utilisaient, l'Imam al-Hussayn ne pouvait opposer que sa foi, son intégrité, son prestige moral et ses principes. De là, la valeur de symbole son combat.

Devant la crainte de voir la déviation, déjà largement entamée, se généraliser et se banaliser, et la civilisation islamique s'engager définitivement dans une voie qui s'écartait Message, al-Hussayn estimait que seule une autorité morale, une force morale, était capable de faire mouvoir et d'émouvoir la conscience de la Umma et de rappeler à celle-ci la gravité sa situation déviationniste. Or il n'y avait que lui-même pour incarner cette force morale, et faire face courageusement à la puissance des Omayyades, contester légalement leur idéologie déviationniste, s'opposer légitimement à leurs agissements déviés, et atteindre, quelque soit l'issue de sa bataille, les objectifs de sa Révolution: s'il l'emportait sur les ennemis, il pourrait diriger la Umma et rétablir les lois du Coran et de la Sunna du Prophète, et s'il mourait pendant sa Révolution et que celle-ci venait à avorter, son sang de martyr, celui du fils de l'Imam 'Ali et du petit-fils du Prophète, jaillirait à tout jamais et rappellerait à ses contemporains et à toutes le générations futures que la sauvegarde et l'intégralité du Message ne sauraient faire l'objet de compromis et de marchandage.

En fait, en décidant d'affronter les Omayyades, al-Hussayn espérait moins obtenir une victoire matérielle et immédiate contre eux, que les empêcher de porter injustement le titre de la légitimité et de la légalité. Mieux, tout porte à croire que lorsqu'il décida d'engager la lutte contre Yazid et son empire, il savait préalablement qu'il y perdrait sa vie. Ainsi lorsque quelques-uns de ses proches - tels 'Omar Ibn 'Ali Ibn Abi Tâlib (son frère), Om Salama (la femme du Prophète) et Mohammad Ibn al-Hanafiyya - essayèrent de le convaincre de revenir sur sa décision d'affronter les Omayyades en arguant de l'issue désespérée de cet affrontement, il restait inébranlable, leur expliquant qu'il n'ignorait pas ce qui personnellement l'attendait. La preuve en est ce témoignage de 'Omar Ibn 'Ali Ibn Abi Tâlib: «Lorsque mon frère al-Hussayn refusa de prêter serment d'allégeance à Yazid, à Médine, j'entrai chez lui et le trouvai seul. Je lui dis: "Que Dieu me sacrifie pour toi, ô Abou 'Abdullah! Car ton frère Abou Mohammad al-Hassan m'a raconté". Mes larmes m'empêchèrent de terminer et je me mis à pleurer. Al-Hussayn m'étreignit et me dit:

- On t'a dit que je serais mort...!

- A Dieu ne plaise, ô fils du Messager de Dieu! dis-je.

- Par ton père, je t'ai demandé, s'il t'a parlé de mon assassinat? insista al-Hussayn.

- "Oui", répondis-je. "Ne veux-tu pas bien prêter serment d'allégeance?"

- "Mon père m'a dit que le Messager de Dieu prédit assassinat(75) et le mien et prévit que mon tombeau serai du sien", dit al-Hussayn. " Crois-tu donc que tu savais ce que je ne savais pas?!" ajouta-t-il».(76)

Lorsque Om Salma, la femme du Prophète le pria d'abandonner son projet en lui disant que son grand-père, le Prophète, avait prédit son assassinat dans le combat qui l'attendait, il ne dit pas autre chose: «Oui, mère, je sais que je tué». [/J]

___________________________

73. Ibn al-'Athir, "Al-Kâmil fil Târikh", op. cit., Tom. IV, p. 16

74. Voir: Aboul 'Alâ' al-Mawdoudi, op. cit., p. 99

75. De son père, l'Imam 'Ali

76. Ibn Tâwûs, "Maqtal al-Hussayn", p. 12
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